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Les Livres

Le Livre d’Amray, Yahia Belaskri (par Mona)

Ecrit par Mona , le Lundi, 14 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Roman, Maghreb, Zulma

Le Livre d’Amray, mai 2018, 144 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Yahia Belaskri Edition: Zulma

 

Le Livre d’Amray c’est la profession de foi d’un poète « depuis deux mille ans en quête d’amour », blessé par des « voleurs de rêves », qui cherche en vain sa place dans la cité. Yahia Belaskri met en forme « rien d’autre qu’une tragédie sans fin ni mesure ».

L’auteur plante le décor dans une terre des temps immémoriaux qu’il choisit de ne jamais nommer, et la majuscule au mot Livre dans le titre inscrit l’histoire du poète « amoureux du monde et de ses mystères » dans un registre sacré et intemporel qu’il faut garder en mémoire (« rappelez-vous de moi »).

Et pourtant, le drame du poète n’a rien d’abstrait : il subit la terreur dans sa chair et on reconnaît bien l’Algérie dans cette terre mutilée à travers les siècles. Le narrateur, né comme l’auteur avec la guerre d’Algérie (« Je suis né et le monde a basculé dans la terreur ») doit porter en terre le corps de sa femme massacrée par les terroristes islamistes lors de la décennie noire. Ce nœud dramatique bouleverse la structure même du récit et fait éclater le point de vue narratif : l’ami, Ansar, prend alors le relais d’Amray le narrateur.

Grayson Perry, Vanité, identité, sexualité, Camille Morineau, Lucia Pesapane (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Lundi, 14 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Arts

Grayson Perry, Vanité, identité, sexualité, Camille Morineau, Lucia Pesapane, Editions Lienart, octobre 2018, 200 pages, 29 €

 

Le stéréotype et son contraire

Grayson Perry et « Claire » (son double féminin) sont à Paris. L’artiste qui se définit comme « motard, travesti, issu de la classe ouvrière et qui s’en est plutôt bien sorti » utilise le textile et la poterie – arts féminins – pour s’opposer à ce qui résiste dans le monde de l’art admis. Son livre permet d’approfondir ce qui est le cœur de l’œuvre présentée pour la première fois en France en institution muséale.

A la Monnaie de Paris sont présentées diverses tenues de « sa » Claire, puis les objets qu’il fabrique avec la céramique, le bois, le métal, la tapisserie, en cherchant toujours ce qui est le plus dénigré dans l’art. L’artiste et auteur ne cherche pas forcément plus l’originalité que la diffusion. Néanmoins à travers ces travaux, il impose ses idées sur le genre, l’identité et la société anglaise. Et Camille Morineau comme Lucia Pesapane insistent néanmoins sur le caractère inédit des images complexes et puissantes

30 ans dans une heure, Sarah Roubato (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 14 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, publie.net

30 ans dans une heure, septembre 2018, 142 pages, 14 € . Ecrivain(s): Sarah Roubato Edition: publie.net

 

30 ans dans une heure : qu’est-ce qui relie les paroles de ces presque trentenaires d’ici et d’ailleurs ? Un âge qui marque une étape importante dans la vie, l’âge où la pression sociale se fait plus forte et où on commence à prendre conscience du temps qui passe.

Toutes ces voix rassemblées dans ce roman forment une polyphonie dont la note commune est un questionnement sur le sens, une quête de sens, de liberté et d’authenticité. Tout ne coule pas de source, et dans le monde qui se présente à elles, elles n’ont plus forcément envie de perpétuer des habitudes, des modes de vie et de pensée sans en interroger véritablement le sens. C’est une sorte de crise qui se traduit plus fortement pour ces personnes – pour cette génération ? – par un besoin pressant et vital de cohérence.

« C’est une espèce de courbature à l’âme. Comme un muscle qui tire chaque fois qu’on triche ».

Certains ont déjà fait le pas, le pas de côté.

En attendant le printemps, Alexandra Fuller (Par Laurent LD Bonnet)

Ecrit par Laurent LD Bonnet , le Vendredi, 11 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Afrique, Roman, Jean-Claude Lattès

En attendant le printemps (Quiet Until the Thaw), octobre 2018, trad. anglais Anne Rabinovitch, 224 pages, 20 € . Ecrivain(s): Alexandra Fuller Edition: Jean-Claude Lattès

 

En matière d’édition, confier à Anne Rabinovitch la traduction d’un roman américain, c’est lui offrir un smoking de marque qui, dès l’entrée en scène, séduira tout lecteur francophone amateur de belle langue. Il y a du respect dans ce travail. On le ressent. On s’y installe en confiance : nous lisons bien du Alexandra Fuller. Ces deux plumes se sont accordées chez Lattes depuis 2012. Notre plaisir s’installe donc, grandit page après page, sans jamais fléchir. Il est subtilement accompagné par le choix du département Éditions des deux terres qui nous confie des livres au format souple, intelligent, au grammage complice.

Sachant cela, homme blanc et femme blanche ! Vous ! Pour qui l’idée que certains peuples ne vivent pas ensemble en fonction d’une hiérarchie, mais par étapes, par cycle, dans des cerclesdépasse peut-être l’imagination, eh bien tamisez vos lumières, éteignez vos téléphones, et immergez-vous quelques heures dans notre temps !

Deuils, Eduardo Halfon (Par Mona)

Ecrit par Mona , le Vendredi, 11 Janvier 2019. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Amérique Latine, Roman, La Table Ronde

Deuils, avril 2018, trad. espagnol David Fauquemberg, 160 pages, 15,80 € . Ecrivain(s): Eduardo Halfon Edition: La Table Ronde

 

Avec les mots simples et bruts du narrateur, on entre dans le vif du sujet dès l’ouverture : « Il s’appelait Salomon. Il est mort à l’âge de cinq ans, noyé dans le lac d’Amatitlàn. C’est ce qu’on me racontait, enfant, au Guatemala ».

Cette mort, dans la famille, il fallait la taire, ne jamais poser de questions, d’où la « blessure à l’intérieur » dont souffre le narrateur (« Il y avait là, dedans, une chose qui était en train de me tuer »). Hanté par le fantôme de l’enfant mort, le narrateur, qui vit aux USA, part au Guatemala en quête de la vérité sur la mort mystérieuse de cet oncle qu’il n’a jamais connu.

Le récit s’organise à partir de la question dramatique qu’il se posait enfant : la photo au nom de Salomon trouvée dans un grenier, qui montre un enfant dans la neige, à New-York, en 1940, est-elle celle du petit Salomon noyé dans le lac ?