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La Une Livres

Confiteor, Jaume Cabré

Ecrit par Marc Ossorguine , le Mercredi, 08 Juin 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Espagne, Actes Sud

Confiteor (Jo confesso), trad. catalan Edmond Raillard, 784 pages, 26 € . Ecrivain(s): Jaume Cabré Edition: Actes Sud

 

Un monument !

Quelques lignes pour rendre compte de la lecture de Confiteor… Cela semble relever du défi tant le monument qu’a bâti Jaume Cabré est touffu, riche, plein de couloirs et de portes qui surprennent… Il serait peut-être plus raisonnable de s’en tenir là et de tout simplement conseiller au lecteur de faire le grand plongeon dans ces presque 800 pages, avec ou sans boussole. Un monument qui a pris huit années à son auteur…

Confiteor c’est l’histoire d’un violon… Non. Confiteor c’est une expérience d’écriture qui reprend et développe à l’infini l’écriture faulknérienne… Non. Confiteor c’est un roman philosophique ou de la philosophie mise en récit sur l’histoire du mal et l’impuissance de la culture contre les fanatismes obscurs qui rythment l’histoire… Non. Confiteor c’est l’histoire d’un amour impossible perpétuellement contrarié… Non. Confiteor c’est un roman qui mêle avec une diabolique habileté la réalité et la fiction… Confiteor c’est… C’est tout cela à la fois. Et d’autres choses encore. Comme une expérience de lecture exigeante, perturbante, fascinante, épuisante, réjouissante… Tout cela à la fois.

Voulez-vous partager ma maison ?, Janine Boissard

Ecrit par Jeanne Ferron-Veillard , le Mercredi, 08 Juin 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Fayard

Voulez-vous partager ma maison ?, mars 2016, 304 pages, 20 € . Ecrivain(s): Janine Boissard Edition: Fayard

 

Vous entrez doucement dans ce livre comme dans un jardin, en trois parties, ce livre est un jardin. L’auteur s’adresse à vous « directement » et la narratrice, Line, vous invite chez elle. Une voix off et la voix d’une femme entrée en cinquantaine. L’atmosphère est agréable, a priori, l’émotion est tangible. Oui c’est un peu ça, un livre confortable qui vous prend par la main et vous dit : regarde.

La narratrice enfant et son père, et son père au-dessus d’elle, son père lui tenant un doigt de la main, son père derrière elle quand il faudra ôter les roulettes du vélo, ce père militaire qui lui intimera « envole-toi ». Ensuite, le mari militaire. Augustin. Le transfert est établi, le cliché est facile. Qu’importe. Vous êtes à Angers, enfin tout près, Line se tient maintenant sur le seuil de sa maison, elle est veuve.

Ses renoncements. Les parenthèses nombreuses où elle entrepose pêle-mêle ses considérations et ses tiraillements. Raconter ce que son mari était, tout ce qu’il n’était pas. Son propos, vous le jugez amusant parfois, enjoué toujours : un ton bienveillant malgré les remontées qui se veulent acides.

Une rivière, un jardin, une maison.

Voir et entendre Critique de la perception imaginative, Santiago Espinosa

Ecrit par Marc Michiels (Le Mot et la Chose) , le Mercredi, 08 Juin 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais

Voir et entendre Critique de la perception imaginative, éd. Encre Marine, présenté par Clément Rosset, avril 2016, 168 pages, 21 € . Ecrivain(s): Santiago Espinosa

 

« L’homme recherche la vérité : un monde qui ne se contredise pas, ni ne trompe, un monde vrai – un monde où l’on ne souffre pas… Il ne doute pas qu’il existe un monde tel qu’il doit être… Visiblement la volonté de vérité est ici le simple désir de se trouver dans un monde qui demeure »

Nietzsche, Fragments posthumes

 

Ce livre est une invitation au cheminement philosophique de l’être, de ce que l’on croit voir et savoir pour veiller à son secret, tout en préservant l’inviolabilité du possible. De la prédominance de la vision au détriment de l’écoute. Et pourtant : « si ce n’est pas moi, mais le Sens, que vous avez entendu, il est sage alors de dire dans le même sens : Tout est Un ».

Effacer sa trace, Malika Wagner

, le Mardi, 07 Juin 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Albin Michel

Effacer sa trace, mars 2016, 192 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Malika Wagner Edition: Albin Michel

 

Encore un ? Oui, encore un roman pour raconter la mort d’un père. Cet « invariant » de la psychanalyse continue d’irriguer la production romanesque (L’Absolue perfection du crime, de Tanguy Viel, 2001 ; La Chute de cheval, de Jérôme Garcin, 1998 ; etc.)

La littérature s’est éloignée, à force de réécritures, de l’enquête psychanalytique que constituaient au siècle dernier les récits de la mort du père, chez Samuel Beckett ou Claude Simon. Ce qui était à l’époque un thème de fiction passe maintenant l’épreuve du feu qu’écrivain-e-s, lectrices et lecteurs semblent unanimement exiger de tous les thèmes de fiction : la dissolution harmonieuse dans l’écriture autobiographique.

Le propos général est limpide : Malika Wagner parvient, à travers l’enterrement de son père en Algérie, à « effacer sa trace », à être soi-même en se délivrant du poids du passé qui la rattachait à l’histoire familiale et à cet « homme peu fréquentable » (p.8). C’est donc un roman optimiste sur la liberté individuelle, malgré l’incessant rappel de ses origines que la société française inflige à la narratrice dans la troisième partie, tant par des discriminations que quand des collègues bien intentionnés lui proposent de se trouver un pseudonyme plus « ronflant » que son propre prénom (p.172).

Ode au recommencement, Jacques Ancet (2ème article)

Ecrit par Marie du Crest , le Mardi, 07 Juin 2016. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Théâtre

Ode au recommencement, Lettres Vives, 2013, 100 pages, 20,70 € . Ecrivain(s): Jacques Ancet

 

A l’occasion de la reprise d’Ode au recommencement (poème dansé) au Croiseur (Lyon) le 11 et 12 mai 2016, Jacques Ancet, spectateur de son texte : « Une chose de bouche, de chair, de mouvements, d’air, de sonorités où ne cesse de se chercher, se perdre, se retrouver l’irrésistible élan de cet inconnu qu’on appelle la vie ».

« Les canettes de couleur »

Le poème, l’ode se lisent, se disent, s’accompagnent de musique, s’entendent et s’écoutent. Gislaine Drahy (fondatrice de Théâtre Narration) découvrit les versets de Jacques Ancet, les lut, s’en fit une matière intime en les apprenant par cœur comme autant d’exercices spirituels. La lectrice redevint comédienne pour faire résonner, entendre « le bruit des syllabes frottées, le ressac des images de la phrase » comme le dirait l’auteur lui-même, sur le plateau.

La comédienne, le chorégraphe/danseur (Frédéric Cellé), et le musicien Alain Lamarche en firent un poème dansé.