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L’Aventuriste, J. Bradford Hipps

, le Mardi, 30 Janvier 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Belfond

L’Aventuriste, janvier 2018, trad. Jérôme Schmidt, 352 pages, 21 € . Ecrivain(s): J. Bradford Hipps Edition: Belfond

 

Sans doute jugé très peu sexy, le monde de l’entreprise a longtemps été boudé par la littérature contemporaine. On se souvient de Michel Houellebecq qui, en 1984 avec son Extension du domaine de la lutte, fut largement salué pour avoir héroïsé le salarié moyen et jeté un œil acerbe sur son identité sociale. Bien sûr, il n’est pas le seul à s’être distingué en disséquant milieux et relations professionnels, mais c’est alors bien souvent pour faire ressortir des personnages déviant de la norme sociale. Pensons seulement au fameux American Psycho de Bret Easton Ellis ou encore au Démon d’Hubert Selby.

Sauf qu’avec J. Bradford Hipps, on est vraiment très loin des marginaux, des psychopathes et des dépressifs impénitents. Ses personnages n’ont d’ailleurs rien de bien extraordinaire : ce sont des êtres humains mus par leurs désirs et ambitions, leurs valeurs et fêlures personnelles, lesquels ne nous sont pas si étrangers.

Je voulais leur dire mon amour, Jean-Noël Pancrazi

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 30 Janvier 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

Je voulais leur dire mon amour, janvier 2018, 130 pages, 12,50 € . Ecrivain(s): Jean-Noël Pancrazi Edition: Gallimard

 

 

Né à Sétif en 1949, Jean-Noël Pancrazi a vécu à Batna avant de s’exiler avec sa famille, juste après les accords d’Evian. Crève-cœur, déracinement, vie à Perpignan. On est en 1962.

Cinquante-trois plus tard, le romancier revient à Bône, devenu Annaba (ancienne Hippone de Saint Augustin) pour être juré dans le nouveau festival cinématographique qui décerne les « Anab d’or » parmi une sélection de films des bords de la Méditerranée.

Le récit Je voulais leur dire mon amour retrace avec acuité, mémoire et nostalgie un voyage aller/retour amer ; l’écrivain se faisait une joie de revoir la terre natale, de retourner, comme on lui avait promis, une fois le festival clôturé, dans la ville de sa dernière résidence algérienne de 1962, Batna.

Rien à voir avec l’amour, Claire Gallen

Ecrit par Martine L. Petauton , le Lundi, 29 Janvier 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, La Brune (Le Rouergue)

Rien à voir avec l’amour, janvier 2018, 297 pages, 21 € . Ecrivain(s): Claire Gallen Edition: La Brune (Le Rouergue)

 

Qui autour de nous n’a pas dit un jour en fronçant le nez – bof, c’est un film français… qui. Les mêmes, sans doute, de détourner les yeux des « romans français », parce que voyez-vous, l’Amérique ! sa littérature et ses films, c’est quand même autre chose…

Alors qu’ils viennent ces gens, devant ce Rien à voir avec l’amour – le roman aujourd’hui, n’en doutons pas, le film demain.

Le titre pourrait nous perdre un peu, convenons-en, qu’on ne s’y fie pas trop. Second roman d’une auteure qui semble écrire-Amérique, regarder-Amérique, penser peut-être Amérique, et signe ici un « roman américain », magnifiquement français et plus que prometteur. Sa formation journalistique, du reste, et notamment AFP, est probablement à la racine de cet effet gros paquets de mer sans essuie-glaces, quotidienneté volontairement non littéraire ; le dru, le précis et le rapide, le cœur de cible étant ici un langage sinon une atmosphère. Récit fort comme d’autres écritures d’outre Atlantique – chacun fera le rapprochement qu’il choisira – situées dans les banlieues de L.A., noires à force d’être éclaboussées de tous les néons des turn pike. Récit mi-ombres, mi-flash aveuglant, cogneur, inquiétant, aux personnages de roman noir absolu, policier ou thriller psychologique.

La mort en berne, Denis Emorine

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 29 Janvier 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

La mort en berne, 5 Sens éditions, mars 2017, 133 pages, 12,60 € . Ecrivain(s): Denis Emorine

 

La mort a droit de vie sur nous et ferait, sans doute, l’objet d’une belle élocution. Cette conscience omniprésente de la mort augmente l’adrénaline de vie de ce roman largement autobiographique. Elle devient caresse dans la chevelure de l’aimée. Dominique Valarcher, le héros de cette narration en recherche d’affection motivée par une sorte d’exil à la « Stefan Zweig », rappelle, à bien des égards, « Louis », le personnage principal du grand romancier dans sa nouvelle Le Voyage dans le passé, avec ce sens aigu de l’exclusivité amoureuse et, quelque part, une certaine dose d’autosatisfaction admirative un peu narcissique :

« Ce soir-là, en quittant cette jeune fille qui le fascinait, Dominique s’était seulement fait cette réflexion : Je crois qu’elle m’aime puisqu’elle aime ce que j’écris. La mort en berne, l’étudiant avait marché longtemps dans les rues de la ville qu’il identifiait à son amour ».

La vie princière, Marc Pautrel

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 26 Janvier 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

La vie princière, janvier 2018, 10,50 € . Ecrivain(s): Marc Pautrel Edition: Gallimard

« Ton enthousiasme est extraordinaire, c’est la chose la plus précieuse chez toi, cette électricité rieuse, cette acceptation par principe de toute proposition, et la façon dont tu me salues quand j’arrive ensuite : en faisant de la main, paume ouverte dressée à la verticale dans ma direction et oscillant de droite à gauche, comme ces dizaines de mobiles de carton en forme de mains que j’avais vus une fois, accrochés avec une ventouse sur la baie vitrée de l’aéroport Marco Polo de Venise, face aux pistes d’envol… ».

La vie princière est une lettre à l’aimée, L.

Une adresse romanesque, ciselée, ouvragée, où chaque mot, chaque phrase semble pesée par une balance Trébuchet – il y a de la poudre d’or dans ce roman. Le narrateur séjourne au Domaine, lieu où se côtoient des chercheurs, des scientifiques, des universitaires et un écrivain. Le soir de son arrivée, le narrateur tombe sur L. « – Oh, pardon, je ne vous avais pas vue », un éclair traverse sa vie, la foudre qui s’abat sur son regard et enflamme sa peau. Elle, travaille « sur la figure du Christ chez les auteurs du XXe siècle ». Lui, écrit des livres, l’un sur « un pays lointain, ou plutôt ma succession de projets autour de mon impossible roman sur ce thème ».