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La Une Livres

Mon Frère, Daniel Pennac

, le Lundi, 28 Mai 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

Mon Frère, avril 2018, 144 pages, 15 € . Ecrivain(s): Daniel Pennac Edition: Gallimard

 

Structuré par l’alternance de deux textes, typographiquement clairement distincts, l’un étant une fiction et le second renvoyant au travail de la mémoire, le roman de Daniel Pennac fait écho à celui de Georges Perec, W ou le souvenir d’enfance. Là s’arrêtent les similitudes, puisque ce dernier donne à voir la défaillance de la mémoire et la volatilisation incompréhensible des souvenirs alors que l’autre, motivé par la disparition d’un frère, tente au contraire de réinvestir presque physiquement la présence du disparu. Ce sont plutôt la comparaison et la recherche de parallélismes entre les deux textes enchevêtrés qui s’imposent au lecteur.

Les chapitres pairs, en italiques, reproduisent de façon stricte bien que fragmentaire la nouvelle d’Herman Melville, Bartleby le scribe (traduite par Pierre Leyris). Quant aux chapitres impairs, ils recueillent un récit que l’on devine autobiographique, sans pour autant connaître la vie de l’auteur. Dès l’incipit, ce dernier nous renseigne sur l’omniprésence de l’intertextualité, à savoir son désir de monter au théâtre le Bartleby de Melville et les motifs qui y ont présidé.

Music is my Mistress, Mémoires inédits, Duke Ellington

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 25 Mai 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Biographie, Slatkine

Music is my Mistress, Mémoires inédits, Duke Ellington, 2016, trad. anglais (USA) Clément Bosqué, Françoise Jackson (1ère édition, 1973), présentation de Claude Carrière, 408 pages, 25 € Edition: Slatkine

Take the « A » Train

Take the « A » Train, c’était l’indicatif du grand orchestre de Duke Ellington. Normal qu’il ouvre cet article qui lui est consacré, non ? Après, nous pourrions reprendre l’une des histoires souvent racontée concernant le sieur Edward Kennedy Ellington (1899-1974), plus connu comme Duke Ellington, voire plus simplement the Duke. Après avoir présenté son orchestre et ses musiciens, le Duke annonçait parfois à son public : « And now, let me introduce the pianist in the band… ». Le public s’attendait alors à voir surgir des coulisses un autre pianiste, mais ce n’était que le Duke qui rejoignait son piano… Donc nous dirons pour notre part : « And now… let’s introduce the writer in the band ! ». Nous découvrons en effet ici une autre facette de l’artiste, celle du conteur et du raconteur qui sait comme peu rendre hommage à tous ceux l’ont accompagné, brièvement ou le temps d’une vie, autour de cette maîtresse que peut être la musique. Et il s’agit bien de musique, et non seulement de jazz. Le Duke est en effet de ceux qui ont toujours repoussé les limites du genre, avec une ambition, une générosité et une inventivité, une créativité qui fait qu’il n’est sans doute pas de musicien de jazz, voire de musicien tout court, qui ne lui soit plus ou moins redevable.

Le Coq de Renato Caccioppoli, Jean-Noël Schifano

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 25 Mai 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman, Gallimard

Le Coq de Renato Caccioppoli, avril 2018, 104 pages, 10 € . Ecrivain(s): Jean-Noël Schifano Edition: Gallimard

 

Rien de Naples ne lui est étranger.

Schifano, né en 1944 ou 1947, selon les sources, et ce mystère est bien dans la nature du bonhomme devenu Napolitain, citoyen d’honneur du Vomero et des alentours (c’est moi qui me moque), a consacré à « sa » ville adorée une bonne dizaine d’ouvrages depuis l’inaugural de 1981, Naples, essai, paru au Seuil. Depuis, la mer baigne toujours Naples (pour reprendre un beau titre d’Ortese) et l’eau littéraire a coulé sous les doigts de Giannatale comme l’appelait familièrement la Morante. De Chroniques napolitaines (I, 1984) à ce Coq de Renato Caccioppoli (2018) : que de chemin parcouru par le Directeur de l’Institut italien de Naples (Il Grenoble), devenu directeur de collection chez Gallimard, de tout temps traducteur de l’italien (Morante et Eco, surtout).

Le Foyer des mères heureuses, Amulya Malladi

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 25 Mai 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Asie, Roman, Mercure de France

Le Foyer des mères heureuses, février 2018, trad. anglais (Inde) Josette Chicheportiche, 350 pages, 24,50 € . Ecrivain(s): Amulya Malladi Edition: Mercure de France

 

Amulya Malladi traite en ce roman un sujet actuel qui donne lieu à de multiples réactions, d’opposition ou d’adhésion, et qui incite nos sociétés à une réflexion d’ordre scientifique, moral, religieux, éthique : celui des mères porteuses.

Après plusieurs fausses couches, Priya, une Américaine fille d’un couple mixte américano-indien, se résout à avoir un enfant par le procédé de la Gestation Pour Autrui. Elle réussit, au prix de maintes disputes et discussions, à rallier à sa décision son époux Madhu, informaticien indien qu’elle a connu pendant qu’il poursuivait sa formation universitaire aux Etats-Unis, où il s’est installé après ses études.

Le couple prend contact avec un organisme indien spécialisé, dont la directrice, le docteur Swati, accueille dans une clinique ad hoc de jeunes femmes indiennes nécessiteuses, recrutées pour porter par insémination les futurs enfants de couples occidentaux stériles.

Le cinéphile, Walker Percy

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 24 Mai 2018. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, USA, Roman, Rivages poche

Le cinéphile (The Moviegoer, 1961), trad. américain Claude Blanc, 335 pages, 8,50 € . Ecrivain(s): Walker Percy Edition: Rivages poche

 

Sur la voie glorieuse des écrivains du Sud, de Mark Twain à Ron Rash en passant par William Faulkner, Shelby Foote et tant d’autres, Walker Percy occupe une place à la fois éminente et absolument originale. Si le Sud, et en particulier la Nouvelle-Orléans, est constamment présent dans son œuvre, c’est à sa manière unique qui ne ressemble en rien à celle de ses pairs. Walker Percy écrit len-te-ment, on pourrait dire avec un souci du détail qui fait de son style une sorte d’exercice métonymique, de décorticage des choses, de gros plans successifs, à la manière d’un John Cassavetes au cinéma.

De cinéma, il est évidemment fortement question dans ce magnifique roman. Le héros/narrateur, Jack Bolling dit Binx, en dehors de sa triste activité d’agent immobilier, est un fou de cinéma. Il passe dans les salles obscures un temps considérable et, sorti desdites salles, sa vie – monotone et grise – est sans cesse prolongée par les images, les acteurs et actrices, les scènes des films qui peuplent son imaginaire. « A son égard j’adopte une attitude distante dans le style de Gregory Peck. Plutôt grand, les cheveux noirs, je sais aussi bien que lui garder ma réserve, les yeux mi-clos, les joues creusées, les lèvres pincées, et lâcher un mot ou deux avec un hochement de tête ».