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Critiques

Oiseau-moi, Edith Azam (par France Burghelle Rey)

Ecrit par France Burghelle Rey , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Editions Lanskine

Oiseau-moi, avril 2018, 36 pages, 12 € . Ecrivain(s): Edith Azam Edition: Editions Lanskine

 

Le nouvel opus d’Edith Azam s’ouvre sur un vers performatif qui, en même temps que la parole, fait naître, dans son identité, celle ici d’un oiseau, celle qui semble bien le double de la narratrice, comme l’indique le titre formé de chaque côté du trait d’union des deux termes équivalents. Il convient également de rapprocher deux noms, celui d’Hannah, premier mot de l’incipit, et le patronyme Azam. Tous les deux sont d’origine hébraïque puisque l’un est issu de l’hébreu et signifie « grâce », mère du prophète Samuel ou de la Vierge Marie selon les testaments, et le second est une variante régionale du nomde baptême Adam.

Dans son recueil précédent publié en 2015 chez POL, Edith Azam a déjà donné à une autre un nom, éponyme du titre, Caméra, qui comme il l’indique scrute lucidement la vie et, du même coup, le néant. Trouvera-t-elle dans ce nouvel opus une raison à espérer ? Car, avant encore, elle a écrit à propos de l’autre : « Il contamine notre espace, veut nous réduire à petit feu ».

Dès les premiers poèmes, apparaissent des affirmations de solutions possibles : l’eau, l’air, les éléments qui peuvent sauver et, au milieu d’eux, le corps, évident, avec ses souffrances, qui entre en résonance avec les mots malgré leur chute.

Je suis un zèbre, Le témoignage bouleversant d’une ado surdouée, Tiana (par Cathy Garcia)

Ecrit par Cathy Garcia , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Récits, Petite bibliothèque Payot

Je suis un zèbre, Le témoignage bouleversant d’une ado surdouée, août 2018, 188 pages, 7,50 € . Ecrivain(s): Tiana Edition: Petite bibliothèque Payot

Un témoignage à la fois très personnel, mais très important aussi sur un sujet que l’on connaît peu ou surtout très mal. En effet, si le terme zèbre reste encore peu connu, tout le monde a une idée plus ou moins claire et surtout très préconçue de ce que peut et doit être un surdoué. Alors pourquoi zèbre ?

Parce que de ces enfants, ados, adultes dits surdoués, pas deux ne se ressemblent, par contre une bonne partie d’entre eux non seulement peuvent être en échec dans leur vie ou leur scolarité, mais plus encore, peuvent être enfermés dans des problématiques graves qui leur interdit toute vie normale et pouvant les conduire jusqu’au suicide. Nous sommes donc loin de cette image d’Épinal du brillant génie qui ne peut que tout réussir, plus et mieux que tout le monde et être la fierté de ses parents et professeurs.

C’est pour cela qu’un témoignage tel que celui de cette toute jeune Tiana est capital.

« C’est quoi un surdoué ? C’est quelqu’un dont le cerveau pense différemment » – ce qui commence à être prouvé maintenant scientifiquement : il s’agit, effectivement et véritablement, d’un fonctionnement cognitif différent. « Pas plus intelligent. Pas plus doué. Différent. Très sensible. Trop, même ».

Les derniers jours d’Henri-Frédéric Amiel, Roland Jaccard (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 14 Septembre 2018. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, La rentrée littéraire, Serge Safran éditeur

Les derniers jours d’Henri-Frédéric Amiel, septembre 2018, 15,90 € . Ecrivain(s): Roland Jaccard Edition: Serge Safran éditeur

 

« J’ai compris trop jeune que je serais incapable de réaliser mes idéaux, que le bonheur est une chimère, le progrès une illusion, le perfectionnement un leurre et que, même si toutes mes ambitions étaient assouvies, je ne trouverais encore là que vide, satiété, rancœur. La désillusion complète m’a conduit à l’immobilité absolue. N’étant dupe de rien, je suis mort de fait ».

Entre 1839 et 1881, Henri-Frédéric Amiel tient son Journal intime, soit 16.847 pages ; plus modeste Roland Jaccard écrit le journal intime du Genevois, prend sa voix et sa plume le temps d’un petit roman. Il se glisse dans la peau du professeur en désespoir, du collectionneur de conquêtes qu’il s’empresse d’abandonner, de l’écrivain qui choisit le cimetière de Clarens, au-dessus de Montreux comme dernier domicile connu, face au lac Léman, sans savoir que Vladimir Nabokov y repose également : Je ne me doutais pas qu’un jour lointain… nous irions comme deux fantômes au lever du jour à la chasse aux papillons. Roland Jaccard qui s’y connaît en trahisons, trouve là un allié, un vieux complice, comme le sont aussi Schopenhauer, Schnitzler et Cioran.

Les Larmes, Pascal Quignard (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 14 Septembre 2018. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Roman, Folio (Gallimard)

. Ecrivain(s): Pascal Quignard Edition: Folio (Gallimard)

 

Le grand érudit latiniste, féru d’histoire romaine, grecque, franque, le romaniste averti se fait mémorialiste des temps carolingiens dans ce « roman », pétri d’histoire, de culture, de références, et d’invention de son lot. L’écriture, reconnaissable dès les premiers paragraphes, allie une poésie corsetée, une description ascétique des corps et des âmes, une vision « historique » par son lexique, ses exigences. Le phrasé est coupé court (il évoquera bien sûr dans son récit romanesque la « Cantilène de Sainte Eulalie » dont il fallut couper le cou puisque les flammes n’érodaient nullement son corps. De son cou s’éleva une colombe). On retrouve ce style si particulier que Terrasse à RomeCarusLes Escaliers de ChambordBoutèsAbîmesLes Solidarités mystérieusesLe Nom sur le bout de la langueLes Ombres errantesVilla AmaliaSur le jadis, dans des registres différents, ont mis en exergue.

Le règne de Charlemagne et de ses descendants directs (surtout deux petits-fils jumeaux non reconnus comme légitimes, fils de Bertha, sa fille, …) occupe l’espace temporel (des années 777 à 843 : l’occasion donnée à notre écrivain d’évoquer les séquences d’Eulalie, les fameux serments de Strasbourg, et cette Europe, déjà morcelée alors, toujours vaillante et déchirée).

L’enfant-mouche, Philippe Pollet-Villard (par Lionel Bedin)

Ecrit par Lionel Bedin , le Vendredi, 14 Septembre 2018. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Roman, J'ai lu (Flammarion)

L’enfant-mouche, août 2018, 480 pages, 8 € . Ecrivain(s): Philippe Pollet-Villard Edition: J'ai lu (Flammarion)

 

L’enfant-mouche est l’histoire de Marie, une petite fille livrée à elle-même, sans attaches (orpheline aux origines troubles) qui va devoir survivre dans un monde compliqué : le monde des adultes dans une campagne sinistre en temps de guerre.

Mais le premier personnage que l’on rencontre est Anne-Angèle, infirmière militaire dans un dispensaire à Casablanca. Elle a 60 ans, ne croit ni en Dieu, ni au Diable, qui dit que « être inquiète, réfléchir, ça ne sert à rien » et « seule la réalité compte ». Elle sera la tutrice de Marie tout au long de cette histoire. Marie, dont le lecteur fait la connaissance à Paris à l’été 1944, a 12 ans. Elle est renfermée, instable. Sa mère est-elle vraiment cette Faustina, stripteaseuse dans un cabaret louche ? Après divers événements, Anne-Angèle et Marie sont contraintes d’aller vivre dans un village de la Marne.