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La Une Livres

Pour saluer la parution de Jack London dans la Pléiade (1)

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 22 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Livres décortiqués, USA, Roman, Nouvelles, Aventures, La Pléiade Gallimard

Jack London, Oeuvres, 2 tomes, 110 € les deux volumes, Octobre 2016 . Ecrivain(s): Jack London Edition: La Pléiade Gallimard

 

Jean-Marie Rouart, dans un texte intitulé « Je demandais aux livres : “Comment fait-on pour vivre, pour aimer, pour être heureux ?” » (paru dans la revue Commentaire en 2015), écrit ceci :

« Je n’imaginais pas que j’éprouverais autant d’émotions en remettant mes pas dans des coups de foudre parfois anciens. Soudain je retrouvai intacte mon ancienne ferveur en relisant […] le début du Peuple de l’abîme de Jack London ».

Reprenons ce début, tel qu’il est traduit par Véronique Béghain, dans le volume de la Pléiade :

« Mais c’est impossible, vous savez », me dirent des amis auprès desquels je venais chercher de l’aide pour m’immerger dans l’East End londonien. « Vous auriez intérêt à demander un guide à la police », ajoutèrent-ils, après réflexion, s’efforçant non sans mal de s’adapter aux mécanismes psychologiques du fou venu les trouver avec plus de références que de cervelle.

Témoin, Sophie G. Lucas

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 21 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Récits, La Contre Allée

Témoin, 96 pages, 12 € Edition: La Contre Allée

 

Certains médias aiment à parler de violence et de misère sociale, mais pas trop tout de même. Des politiques aiment aussi à exploiter ce filon sociétal pour racler quelques voix à peu de frais. Pas sûr que les uns et les autres sachent de quoi ils parlent. Pas sûr. Et même, il ne paraît pas idiot de penser qu’ils n’en ont au fond pas grand-chose à faire. Que « ces gens-là » restent où ils sont. Tout sera bien. On sait bien ce que c’est. Pas besoin d’y aller voir de plus près.

Tout le monde ne se contente pas d’images toutes faites. Heureusement. La poétesse Sophie G. Lucas, elle, est allée y voir de plus près. Non pas dans une immersion pseudo-ethnographique, ou carrément journalistique, mais en un lieu où se disent leurs histoires et où peuvent aussi se décider ce que la société fera d’elles et eux, ce que « nous » leur permettrons de faire de leur vie. Des semaines à suivre les audiences d’un tribunal de la misère ordinaire. Un de ces lieux où l’on enchaîne des histoires, les « cas » de petites délinquances, souvent récidivées.

Pour que la mort ne crie pas victoire, Alexis Ruset

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 21 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Roman

Pour que la mort ne crie pas victoire, éd. Zinedi, janvier 2017, 211 pages, 19 € . Ecrivain(s): Alexis Ruset

Avec ce roman d’Alexis Ruset, le lecteur est plongé dans l’atmosphère trouble et mouvante d’un village situé sur la ligne bleue des Vosges, sur le front-est de la guerre de 14/18, quasiment entre les armées allemande et française dont les mouvements le mettent tantôt sous occupation ennemie tantôt en zone provisoirement libérée.

Le lieu de l’action constitue une scène idéale pour une intrigue qui met aux prises dans le petit village de La Harpaille des protagonistes dont certains profitent de l’état incertain des hostilités dans une guerre qui n’en finit pas de ne pas finir, pour donner libre cours à leurs bas instincts, à leurs jalousies, à leur haine de celui qui ne leur ressemble pas, de celui qui n’est pas « des leurs ».

Car le personnage central est venu de l’Alsace, alors allemande, avant la guerre et, dès son installation dans le village, il a suscité curiosité, moqueries, animosité, suspicion, superstition et répulsion. Il est nain, difforme, il arrive un soir monté sur un grand bouc blanc, il parle un alsacien mâtiné d’allemand, il est accueilli et logé par une vieille femme solitaire elle-même rabougrie, laide et édentée, dont la demeure est à l’extrême bout du village (représentation classique de la sorcière et de son habitation excentrée par rapport à la communauté villageoise) et qui lui loue un cabanon isolé dans la forêt proche. Il a, pour compléter l’archétype, des dons « diaboliques » de guérisseur et de vétérinaire. Le monstre et la sorcière…

La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Olivier Bessard-Banquy

Ecrit par Ivanne Rialland , le Vendredi, 21 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Histoire

La Fabrique du livre. L’édition littéraire au XXe siècle, Presses universitaires de Bordeaux & Du Lérot, septembre 2016, 510 pages, 29 € . Ecrivain(s): Olivier Bessard-Banquy

 

Olivier Bessard-Banquy nous propose ici une traversée du monde de l’édition du XXe siècle, nourrie par un impressionnant travail d’archives. Au fil de chapitres ordonnés chronologiquement, l’on assiste ainsi à la mutation de l’édition française, depuis le travail familial et artisanal de la fin du XIXe siècle à la concentration et l’industrialisation du secteur à l’orée des années 1970 – l’auteur laissant de côté la période contemporaine, objet d’un précédent livre : L’Industrie des lettres. Étude sur l’édition littéraire contemporaine.

Comme il le précise, Olivier Bessard-Banquy ne recherche pas de la sorte à bouleverser l’histoire de l’édition, dont les grandes étapes sont déjà connues, mais il insère dans un panorama général très complet des monographies fouillées sur des figures marquantes du monde de l’édition, et des anecdotes parfois savoureuses sur les exigences d’écrivains ou d’ayants droit impécunieux. Le lecteur aura notamment plaisir à découvrir les débuts d’hommes qui ont laissé leur nom à de grandes maisons d’édition, à les suivre dans leurs succès et leurs déboires : Albin Michel, Grasset, Pauvert, Bourgois, etc…

Le Séducteur, Jan Kjærstad

Ecrit par Yann Suty , le Jeudi, 20 Avril 2017. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Pays nordiques, Roman, Monsieur Toussaint Louverture

Le Séducteur (Forføreren), Traduit du norvégien par Loup-Maëlle Besançon, 608 p. 23€ . Ecrivain(s): Jan Kjærstad Edition: Monsieur Toussaint Louverture

 

Cette critique pourrait être toute entière dédiée à Monsieur Toussaint Louverture. Chaque parution de la maison d’édition bordelaise pilotée par Dominique Bordes emmène ses lecteurs vers des sommets littéraires. L’éditeur est un chineur. Il aime aller farfouiller dans l’histoire de la littérature et en ressortir des textes oubliés ou mal publiés, qui n’ont pas réussi à se faire en France la place qu’ils mériteraient. Chacun de ses livres s’avère une petite merveille. Pas forcément petite, d’ailleurs, car Monsieur Toussaint Louverture a plutôt le goût des textes longs, qui pèsent leur poids, avec lesquels on vit pendant un certain nombre de jours. Ses livres sont aussi de beaux objets aux couvertures particulièrement soignées qui provoquent leur effet au pied du sapin ou dans une bibliothèque. Mais le véritable cadeau, c’est quand on ouvre ces pages et qu’elles nous convient dans des mondes aussi différents que celui du script-doctor d’Hollywood qui ne parvient plus à être saoul (Karoo), du facteur qui lit le courrier qu’il distribue (Mailman), de la famille de bûcherons du Grand-Ouest américain (Et quelque fois j’ai comme une grande idée) ou d’une bande d’enfants dans un orphelinat quelque peu étrange (La maison dans laquelle).