En  matière littéraire comme en la plupart des domaines artistiques, la  postérité ne se trompe pas aussi souvent qu’on le prétend, et ses  jugements sont en général fondés, même s’ils peuvent être parfois sujets  à révision ou à appel, dans un sens comme dans l’autre, au fil du temps  (l’exemple-type étant celui de Thomas Corneille, jadis plus lu que son  frère). La probabilité de découvrir sous la poussière des bibliothèques  et des librairies d’anciens un écrivain de premier ordre qui aurait  échappé à toutes les investigations des historiens de la littérature  n’est pas aussi élevée que le croient en général les étudiants en  doctorat.
Cela étant, il arrive que de grands  auteurs soient injustement négligés, pour des raisons externes à leur  œuvre proprement dite et à sa qualité, ainsi la langue dans laquelle ils  l’ont composée. Durant une très longue période, pratiquement jusqu’au  XIXe siècle, tous les écrivains européens furent bilingues,  capables d’employer une langue vernaculaire (celle de leur pays) et une  langue véhiculaire (le latin).