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Russie

L’oiseau qui buvait du lait, Jaroslav Melnik (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Mercredi, 18 Octobre 2023. , dans Russie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Actes Sud

L’oiseau qui buvait du lait, Jaroslav Melnik, Actes Sud, janvier 2023, trad. russe, Michèle Kahn, 492 pages, 24,50 € . Ecrivain(s): Jaroslav Melnik Edition: Actes Sud

 

Audra Rumšaite, photographe, a reçu une commande d’un magazine féminin, elle doit prendre des photos de la ville de Vilnius en Lituanie. Nous sommes au mois d’octobre, elle gravit le mont des Trois-Croix, le jour à peine levé pour avoir une vision panoramique de la ville. Arrivée au sommet alors que le soleil commence à percer, elle aperçoit décrivant des cercles au-dessus de Vilnius un grand aigle planant toutes ailes déployées. Son premier réflexe est de vouloir saisir l’oiseau en plein vol, mais en bonne professionnelle elle plante les pieds de son appareil dans la terre et elle prend des photos du paysage à peine éclairé d’un soleil rougeoyant. Son travail achevé, elle voit dans son objectif l’oiseau continuant à décrire ses courbes dans le ciel. Là, elle le saisit puis se prépare à reprendre sa route lorsqu’elle voit à travers les feuillages une masse gisant sur le sol.

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 08 Septembre 2023. , dans Russie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Gallimard

Le Docteur Jivago, Boris Pasternak, Gallimard, mai 2023, trad. russe, Hélène Henry, 704 pages, 26 € Edition: Gallimard

 

Quelle belle et opportune incitation à relire (ou à lire) une œuvre figurant, à juste titre, au patrimoine universel de la littérature que cette réédition par Gallimard au prétexte justifié d’une nouvelle traduction ! Il serait sans doute fort intéressant, pour un universitaire, pour un fieffé lettré, pour un critique érudit, tous fins connaisseurs de l’œuvre et capables de lire le texte original, de comparer cette version française à celles qui l’ont précédée, en particulier et en priorité à la plus courante, celle parue, déjà, chez Gallimard en août 1958, non signée mais dont les quatre traducteurs qui en avaient assumé la charge sont identifiés.

L’objectif du présent article est infiniment plus modeste : il ne s’agit que de recenser dans notre magazine cette nouvelle édition, présentée dans son beau volume, afin de susciter ou de ressusciter chez tout lecteur de la rubrique l’envie de se laisser emmener, emporter, transporter :

- Dans un étonnant, étourdissant, passionnant voyage de sept cents pages au long, en large et au travers des immensités russes, dans la profonde intimité de leurs paysages changeant au fil des descriptions, savoureusement poétiques, de variations saisonnières continues ;

Le Corps de l’âme. Nouveaux récits, Ludmila Oulitskaïa (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 19 Janvier 2023. , dans Russie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Gallimard, En Vitrine

Ludmila Oulitskaïa, Le Corps de l’âme. Nouveaux récits, traduit du russe par Sophie Benech, Paris, Gallimard, 2022, 206 pages, 18, 50 €. . Ecrivain(s): Ludmila Oulitskaïa Edition: Gallimard

 

Le nom de Ludmila Oulitskaïa figurait sur la liste informelle établie par les parieurs anglais avant l’attribution du Prix Nobel de littérature 2022. Elle eût fait une lauréate très estimable, mais c’était oublier l’aversion séculaire des Suédois pour ce qui vient de Russie. On est désolé (pour l’Académie Nobel) de rappeler que les premiers lauréats de son Prix furent des auteurs aussi indispensables que Sully-Prudhomme, Theodor Mommsen, José de Echegaray, Bjørnstjerne Bjørnson, Rudolf Eucken et Paul Heyse, tout cela parce qu’il ne fallait surtout pas l’attribuer au plus grand écrivain alors vivant, Léon Tolstoï, qui présentait le tort irréparable d’être aussi russe qu’on peut l’être. Sa mort en 1910 ne changea rien. Bounine et Pasternak n’obtinrent la récompense suédoise en 1933 et 1958 que parce qu’ils furent, le premier apatride, le second en délicatesse avec les autorités soviétiques. Tout cela pour dire que Ludmila Oulitskaïa est, elle aussi, un grand écrivain et son recueil de nouvelles en apporte une preuve supplémentaire.

Les aventures d’un sous-locataire, Iouri Bouïda (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Mercredi, 13 Octobre 2021. , dans Russie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Les aventures d’un sous-locataire, octobre 2021, trad. russe, Véronique Patte, 456 pages, 24 € . Ecrivain(s): Iouri Bouïda Edition: Gallimard

 

On pourrait d’abord croire lire avec ces aventures de Stalen le récit des pérégrinations picaresques d’un personnage haut en couleurs, drôle, attachant, capable d’un humour féroce mais toujours sensible et généreux. La dimension comique de ce roman saute aux yeux – en particulier dans les 150 premières pages – et fait d’ailleurs de cette lecture un temps de sourire réjouissant. Les déambulations de Stalen, dans un Moscou fascinant, glacial dessus, bouillant dessous, ramènent à la grande littérature d’aventure que Bouïda salue d’ailleurs par les titres qu’il donne à chacun des chapitres de ce roman :

Chapitre 1, Où il est question du bouton supérieur d’une chemise, de métamizole sodique et de diminution de frais d’entretien / Chapitre 2, Où il est question de la promiscuité de l’existence, d’une femme à la petite vessie et de poésie picaresque.

Ce n’était que la peste, Ludmila Oulitskaïa (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 24 Juin 2021. , dans Russie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Gallimard

Ce n’était que la peste, avril 2021, trad. russe, Sophie Benech, 138 pages, 14 € . Ecrivain(s): Ludmila Oulitskaïa Edition: Gallimard

 

Ce fut un accident idiot – comme au fond ils le sont tous. Un biologiste travaillant dans un institut de recherches à Saratov, sur des souches de la peste pulmonaire, reçoit en pleine nuit, alors qu’il est dans son laboratoire, un appel téléphonique lui enjoignant de se rendre sans délai à Moscou. Dans l’Union soviétique de Staline, ce n’est pas le genre de convocation qui fait plaisir, et pas seulement parce que cela représente un voyage aller-retour de mille cinq cents kilomètres. Dans la précipitation, le chercheur ne rajuste pas son masque correctement et, sans le savoir ni le vouloir, il emporte ainsi la peste dans le train, puis dans la capitale, à son hôtel et à l’hôpital où son état le conduira. Il sera le premier à mourir, mais pas le seul. En 1720, la peste fit disparaître entre 30.000 et 40.000 personnes, la moitié de la population marseillaise. Moscou comptait en 1939 plus de quatre millions d’habitants…