Nicolas Le Flahec – Jean-Patrick Manchette : écrire contre (par Jean-Jacques Bretou)
Nicolas Le Flahec – Jean-Patrick Manchette : écrire contre – Éditions Gallimard – 729 p. – 30 €
Edition: Gallimard
Ce livre anniversaire parait pour les trente ans de la disparition de Manchette et les soixante dix ans de la Série Noire (SN). Si la lecture d’Eliott Chaze (numéro196 de la SN) a marqué fortement à l’âge de 11 ans Jean-Patrick Manchette, on apprend en parcourant son journal que son cursus scolaire fut sinon normal tout du moins celui d’un jeune homme qui ne se prépare pas à écrire des polars. Le Flahec dans son gros mémoire qui à l’origine était une thèse de doctorat nous livre ainsi une multitude de choses sur celui qui en onze livres fut l’auteur français phare de la SN. Il a exploité chez le littérateur qui écrivait énormément : livres, correspondances (Paul Buck, Maud Mannoni, Richard Morgiève, Echenoz, Siniac etc,) auxquels il faut ajouter son journal (qui a fait l’objet d’une publication), ses carnets, les manuscrits de scénarios, et la littérature purement alimentaire y compris érotique ; enfin toute la somme représentant la construction de ce qu’était J-P M.
Manchette, élève quelconque, s’est cependant beaucoup intéressé à la lecture de Marx, de Hegel, de Flaubert entre autres avant de découvrir le situationnisme et Debord. Plus tard d’ailleurs il y aura un échange de correspondances assez virulent avec Leibovici avant qu’ils ne se réconcilient : j’avais tort avoue Manchette.
J-P M. n’ayant pas réussi à intégrer une grande école et ne voulant pas enseigner, ses parents lui coupèrent les vivres. C’est ainsi que dans l’urgence il accepta quelques travaux littéraires et se mit à écrire. Il commença par la littérature alimentaire puis les scénarios de film et enfin les polars où il trouva sa voie en étant édité par Marcel Duhamel dans sa prestigieuse collection de chez Gallimard.
Manchette a très vite compris quel était le format de la SN. Vite reconnu, il sera même en mesure de donner quelques conseils à Paul Buck, auteur américain, pour être édité à la SN. Manchette lui confie ce qui lui parait capital : il faut faire dans le behaviourisme, le comportementalisme, éviter le roman psychologique à la française : écrire à l’os, sans muscle ni gras. Son modèle est l’écrivain américain Dashiell Hammett ce qui ne l’empêchera pas de lire avec intérêt Albert Camus. L’écriture doit être tranchante. On invente le terme de néo-polar pour Manchette et on en fait le pape, l’auteur de Ô dingos, ô châteaux réfute cette dénomination de même qu’il rejette violemment tous les jeunes écrivains se réclament du nouveau polar. Une seule chose importe pour J-P M « écrire contre ».
Le Flahec, spécialiste de Manchette, nous fournit avec ce livre, à la portée de tous, la référence littéraire J-P. M.
Jean-Jacques Bretou
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