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Quand nous regardions depuis notre terre, Jean-Louis Rambour, Jérôme Delépine (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) 25.08.21 dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie

Quand nous regardions depuis notre terre, Jean-Louis Rambour, Jérôme Delépine, éditions L’herbe qui tremble, juin 2021, 38 pages, 16 €

Quand nous regardions depuis notre terre, Jean-Louis Rambour, Jérôme Delépine (par Murielle Compère-Demarcy)

Nous pourrions trébucher sur le titre : où nous emmène le poète lorsqu’il écrit Quand nous regardions depuis notre terre – avec en toile de fond, pour la première de couverture, Lumière du jour du monde (2021), du peintre Jérôme Delépine dont l’œuvre accompagne les 31 poèmes de l’opus ? Temps révolu, étayé par l’emploi de l’imparfait de l’indicatif introduit par une conjonction de coordination indiquant un point de repère temporel, « quand » ? Nous sommes bien ici dans le réel, non dans un monde conditionnel. Le poète Jean-Louis Rambour n’a pas intitulé son recueil Si nous regardions depuis notre terre, mais bel et bien Quand nous regardions depuis notre terre. N’y trouvons pas de nostalgie (même si quelquefois restent « (…) des traces de doigts / de cheveux, regrets, noirceurs »), n’y cherchons pas un paradis perdu, Rambour est, ainsi que l’avaient titré les Cahiers d’arts et de littératures dont un numéro (n°7) lui était consacré aux éditions du Petit Véhicule, un « poète en temps réel ».

Retrouvons ici plutôt la fresque d’une époque révolue où nous étions encore connectés au monde complexe de façon simple, objective, attentive. Nous apprenons également à la fin du recueil que le livre a été réalisé en partenariat avec la Galerie Papiers d’Art, sise à Paris dans le 3e arrondissement, et représentée par Yuri Levy-Kumata, dans le cadre de l’exposition homonyme, Quand nous regardions depuis notre terre, en mai 2021. Le contexte est éclairci.

À la page 29 le poème reprend le titre dans son premier vers à partir duquel une vision du monde se déploie, focus contextualisé :


Quand nous regardions depuis notre terre

nous avions devant nos yeux

un petit Golgotha, une sorte de mont du crâne

pour enfants, un centre du monde

en miniature. Avec des erreurs

dans la représentation : le Christ était déjà

dans son tombeau, deux pleureuses

se soutenaient maladroitement

et le ciel n’était fendu d’aucune déchirure.


Les balises de notre immersion dans le monde étaient ainsi installées, jalonnant de leur symbolisme l’espace-temps, nous interprétions le monde depuis son cadastre civilisationnel marqué par l’Histoire et nos histoires personnelles. Quelle que soit l’époque, le mystère du monde demeure, et même si


nous étions proches d’obtenir le palimpseste

qui nous aurait permis de recréer

sur les erreurs, les paroles vaines, fausses


écrit le poète, nous ne sommes pas parvenus à « retrouver les origines ».

Si le point de vue de notre regard a changé / change, est-ce notre posture face à l’éternité qui a déplacé nos horizons modifiant la lumière de nos passages sur terre ?

Ne plus regarder depuis notre terre, n’est-ce pas survoler l’espace-temps ? Au détriment de la terre, ou, du point de vue de notre évolution personnelle et au fil du temps nous retrouvant comme en apesanteur et délestés des peurs qui engluent nos souffles du poids des choses du quotidien ? Avons-nous été capables de vivre nos rêves, la question est posée :


Nous ramions, nous ramions, bientôt

les paumes de nos mains s’y efforçaient

elles-mêmes, en vain. Nous étions des bêtes

incapables de ronger nos amarres.


Depuis quelle hauteur peut-on se targuer de pouvoir fêter en un royaume durable les noces de la vie et de l’imaginaire comblés ? Ecrire, vivre le chant / la danse poétique du monde, est-ce pétrir les mots et mettre le cap vers le « lac aux eaux blanches » des origines situé au centre de la Terre, là où se risquent les savants, les fous, les explorateurs ?


Murielle Compère-Demarcy


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A propos du rédacteur

MCDEM (Murielle Compère-Demarcy)


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Murielle Compère-Demarcy (pseudo MCDem.) après des études à Paris-IV Sorbonne en Philosophie et Lettres et au lycée Fénelon (Paris, 5e) en École préparatoire Littéraire, vit aujourd'hui à proximité de Chantilly et de Senlis dans l’Oise où elle se consacre à l'écriture.

Elle dirige la collection "Présences d'écriture" des éditions Douro.

 

Bibliographie

Poésie

  • Atout-cœur, éditions Flammes vives, 2009
  • Eau-vive des falaises éditions Encres vives, collection "Encres blanches", 2014
  • Je marche..., poème marché/compté à lire à voix haute, dédié à Jacques Darras, éditions Encres vives, collection "Encres blanches", 2014
  • Coupure d'électricité, éditions du Port d'Attache, 2015
  • La Falaise effritée du Dire, éditions du Petit Véhicule, Cahier d'art et de littérature Chiendents, no 78, 2015
  • Trash fragilité, éditions Le Citron gare, 2015
  • Un cri dans le ciel, éditions La Porte, 2015
  • Je tu mon AlterÈgoïste, préface d'Alain Marc, 2016
  • Signaux d'existence suivi de La Petite Fille et la Pluie, éditions du Petit Véhicule, 2016
  • Le Poème en marche, suivi de Le Poème en résistance, éditions du Port d'Attache, 2016
  • Dans la course, hors circuit, éd. du Tarmac, 2017
  • Poème-Passeport pour l'Exil, co-écrit avec le photographe-poète Khaled Youssef, éd. Corps Puce, coll. « Parole en liberté », 2017
  • Réédition Dans la course, hors circuit, éd. Tarmac, 2018
  • ... dans la danse de Hurle-Lyre & de Hurlevent..., éd. Encres Vives, collection "Encres blanches" , n°718, 2018
  • L'Oiseau invisible du Temps, éd. Henry, coll. « La Main aux poètes », 2018
  • Alchimiste du soleil pulvérisé, Z4 Éditions, 2019
  • Fenêtre ouverte sur la poésie de Luc Vidal, éditions du Petit Véhicule, coll. « L'Or du Temps », 2019
  • Dans les landes de Hurle-Lyre, Z4 Éditions, 2019
  • L'écorce rouge suivi de Prière pour Notre-Dame de Paris & Hurlement, préface de Jacques Darras, Z4 Editions, coll. « Les 4 saisons », 2020
  • Voyage Grand-Tournesol, avec Khaled Youssef et la participation de Basia Miller, Z4 Éditions, Préface de Chiara de Luca, 2020
  • Werner Lambersy, Editions les Vanneaux ; 2020
  • Confinés dans le noir, Éditions du Port d'Attache, illustr. de couverture Jacques Cauda; 2021
  • Le soleil n'est pas terminé, Editions Douro, 2021 avec photographies de Laurent Boisselier. Préface de Jean-Louis Rambour. Notes sur la poésie de MCDem. de Jean-Yves Guigot. Illustr. de couverture Laurent Boisselier.
  • l'ange du mascaret, Editions Henry, Coll. Les Ecrits du Nord ; 2022. Prélude et Avant-Propos Laurent Boisselier.
  • La deuxième bouche, avec le psychanalyste-écrivain Philippe Bouret, Sinope Editions ; 2022. Préface de Sylvestre Clancier (Président de l'Académie Mallarmé).
  • L'appel de la louve, Editions du Cygne, Collection Le chant du cygne ; 2023.
  • Louve, y es-tu ? , Editions Douro, Coll. Poésies au Présent ; 2023.