Je suis mon instinct comme un animal, Valérie Fauchet (par Marjorie-Rafécas Poeydomenge)
Je suis mon instinct comme un animal, Valérie Fauchet, Avril 2025, 163 pages, 19,90 €, Editeur : Les Ouvreurs de Mondes

Ce nouvel essai poétique et pluriel, à la fois philosophique et esthétique (illustré par 18 photos de Bob Ostrovidow) rayonne d'énergie féline et se lit avec l’instinct de l'instant. Clin d’œil à L'intuition de l'instant de Gaston Bachelard, Valérie fauchet interroge subtilement : « Et si l'intuition de l'instant c'était l'instinct ? » Comme un coup de talon, l’instinct nous raccroche à l’instant présent et à la vraie beauté… Structuré autour de 14 poésies, ce livre est également intensément vivant par le nombre de témoignages recueillis par l’auteure sur l'instinct qui sauve, qui console et qui rend à la vie sa puissance.
Contrairement à l'intuition qui est un concept abstrait et protéiforme, l'instinct, plus sauvage, vibre en chacun de nous, comme une force vitale, qui nous porte et nous rapproche de notre véritable nature. « Il est temps de repenser poétiquement la vie », cette phrase de Jean-Pierre Siméon citée dans le livre, illustre parfaitement l’intention de l’auteure qui danse à travers les pages.
Comme l’écrit Laurent Gounelle dans la dernière de couverture, « l’instinct est l’intelligence du corps en chacun de nous ! ». Valérie Fauchet persiste et signe : l’intelligence animale reste le meilleur rempart contre l’intelligence artificielle. L’acronyme « IA », signifiant aussi « Intelligence Animale » … Selon l’auteure, l’instinct a quelque chose de poétique, de l’ordre de la grâce et du divin.
L’instinct peut paraître sauvage car il surgit parfois brutalement et de nulle part. Imprévisible, il ressemble à la fois au parfum des fleurs, à la forme des nuages, au son d’une voix, à un rouge-gorge, à une coccinelle… Difficile de le dompter. Il est aussi un fil d’ariane qui nous relit aux autres. Les arbres sont aussi instinctifs, ils « se racontent des contes, des histoires par leurs racines ». L’instinct revient toujours au galop. « Encre bleue, encre noire ! Qu'importe jeter les amarres sur notre instinct créatif, se libérer en grande urgence de toute emprise, et surtout de nos propres emprises ». L’instinct est comme les rayures d’un zèbre, si on les gomme, le zèbre n’est plus.
Comme le rappelle le psychanalyste Claude-Eric Martin, invité dans le livre, les instincts sont un équilibre entre la pulsion de vie et la pulsion de mort. La pulsion de vie est celle qui nous reconnecte à notre nature animale dans une sauvagerie positive et salvatrice. « La psychanalyse nous apprend néanmoins que, lorsque nous cherchons à éliminer de notre conscient une partie de nous-même - comme l'agressivité par exemple, nous la retrouverons nécessairement dans l'inconscient, d'autant plus violente et pervertie que le refoulement aura été injuste et inadapté ». D’ailleurs, hypothèse originale de Freud, la pulsion de mort serait « la force qui pousserait la vie à revenir à son état originel, de l'organique à l'inorganique, comme la nécessité d'un retour de la nature à sa plus simple expression ». Pulsion de vie, pulsion de mort sont deux forces qui s'entremêlent, s'opposent, mais se soutiennent, sans lesquelles nous ne pourrions ni exister ni nous construire.
Selon Claude Ostrovidow, énergéticienne et ancienne enseignante (autre invitée du livre), l’instinct serait la magie de l’invisible et est la faculté de capter des choses inaccessibles par raisonnement, mais par le biais de l'intensité des émotions qu'elles suscitent. Cela rejoint d’après elle la conception du philosophe américain Ralph Waldo Emerson, « L'homme devrait apprendre à détecter et à observer cette lueur qui, de l'intérieur, traverse son esprit comme un éclair. »
Je remercie aussi Valérie Fauchet de m’avoir conviée dans cet ouvrage singulier, pour converser philosophiquement de l’instinct avec elle dans un dialogue de « salonnières », dans son univers « baroque et onirique ». Et d’avoir laissé une place à mon interprétation de l’instinct artistique. « Mystère des arbres centenaires, beauté éphémère des fleurs, légèreté des papillons, tout stimule l'esprit poétique. La caresse d'un chat, les pois farceurs d'une coccinelle, la danse des flamants-roses, la trompe saxophone d'un éléphant... Il faut saisir tous ces instants, ces fragments de beauté universelle. Tel un chasseur de papillons, capturez tous les mots écrits sur un coin de table, les images intimes au lever du jour et les esquisses d'un sourire. Car la poésie est dans l'inattendu, c'est ce que nous enseigne Valérie Fauchet ».
« Il faut considérer l'instinct comme humain, poétique, comme une protection solaire, pour soi et pour tous les êtres et les animaux qui nous entourent de près ou de loin ».
Un livre à lire pour retrouver la confiance en soi, au sens d’Emerson, le courage d’être soi et le charme de l’enfance.
A propos de l’auteur
Née à Rennes et diplômée de lettres modernes, Valérie Fauchet est écrivain, poète, parolière et scénariste. Après la trilogie romanesque La vie est une affaire personnelle, Je suis mon instinct comme un animal constitue son troisième essai.
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