Finistère, Anne Berest (par Alix Lerman Enriquez)
Finistère, Anne Berest, Albin Michel 2025, 432 p. 23,90 €
Edition: Albin Michel
On se souvient du roman très remarqué d'Anne Berest La carte postale qui retraçait l'histoire de sa famille maternelle déportée dans les camps de concentration. Avec Finistère, l’écrivaine signe un très beau roman également : Un livre très attachant sur sa famille paternelle bretonne où se mêlent la description de paysages à la beauté sauvage et accidentée du Finistère et la biographie de son père Pierre Berest, célèbre physicien, et dont elle vient d'apprendre la grave maladie.
L’histoire commence avec le grand-père de son père Eugène et raconte l’ascension sociale d’une famille bretonne mais également les idéaux de jeunesse paternels qui font de ce personnage un être complexe et attendrissant.
La richesse et l’originalité de de cette biographie proviennent de ces allers-retours incessants entre le passé de ce père mystérieux et révolutionnaire et la maladie présente de ce père désormais affaibli :
« … je me contentais de faire le portrait d’un homme timide et de déchiffrer ce que le silence ne peut révéler. Toute ma vie, j’ai regardé mon père comme un mystère. » écrit Anne Berest dans une confession crue et troublante, où elle livre beaucoup d’elle- même et notamment de cette parole devenue impossible entre elle et Pierre. « Très vite, j’eus l’impression qu’aux yeux de mon père, je ne méritais pas le Finistère ».
Comme si tout au long de sa vie, Anne avait cherché ce regard approbateur d’un père qui n'était jamais venu, d’un père aimant mais taiseux, terriblement pudique. Ce père maladroit dans les gestes de la vie quotidienne mais scientifique émerveillé des phénomènes naturels et notamment des mouvements lunaires sur la mer : « Le bleu du ciel lui parlait de la physique ondulatoire et, dans la lucarne de son œil, l’ensemble du monde s’organisait en corps, en systèmes mécaniques, en trajectoires- tout n’était que masses, chiffres, rapports de vitesse, combinaisons de structures matérielles, rapports de poids. »
Finistère est assurément un très beau témoignage pudique et poignant sur un homme hors du commun, dont on ne ressort pas indifférent.
Alix Lerman Enriquez
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