Concerto pour marées et silence, revue n°18 – 2025 Dir. Colette Klein (par Murielle Compère-Demarcy)
Concerto pour marées et silence, revue n°18 – 2025 Dir. Colette KLEIN Poésie [228 p.] – 15 €

Revue au contenu de substantielle qualité que cet ouvrage rassemblant un florilège d’auteurs (pas moins de 55) contribu(ant) aux accords d’un puissant Concerto dans l’édition de son numéro 18 paru en mai 2025 ! Dans sa mise en pages originale, c’est ici la dernière page, et non la première porteuse habituelle de l’exergue, qui nous propose une citation (de Michèle Gautard), nous invitant par sa partition à relancer en boucle via le mouvement de ses poèmes et articles/notes, l’interrogation qu’il porte comme une partition musicale agrémentée de signes de renvoi et de reprise :
…
Que faire de toutes ces cendres qui se
griment de souvenirs éteints ?
Orchestrant un Concerto polyphonique, la baguette de « chef d’orchestre » de l’écrivain-poète Colette Klein ravive en braise les cendres de mots ponctués de trois intermèdes illustratifs dont le mouvement se dessine en un pastel sur toile dans Claire voix (série Exuvies) de Laurent Noël (p.13), se déploie en une gravure de la poétesse Danièle Corre (p.139) et prend forme dans un bronze d’Anita Bonici figurant 3 pèlerins (p.75). Si la forme aérienne d’une silhouette danse et s’enflamme dans le tableau de Laurent Noël, un promeneur avance accompagné de son chien vers l’horizon dans la gravure de Danièle Corre et le bronze d’Anita Bonici montrant Les 3 pèlerins nous emporte, lui, sous leurs pas (comme la terre dans son vaste mouvement, ainsi que le titrait Colette Klein dans l’un de ses recueils : C’est la terre qui marche sous mes pas (éd. La Feuille de thé ; 2019). 15 auteurs parmi les 55 y font l’objet de note(s) ou d’article(s) aux côtés des autres proposant des textes poétiques.
Nous l’aurons compris, ce Concerto pour marées et silence, revue délègue à la Musique les notes de ses poèmes, la musique figurant « la parole la plus profonde de l’âme, le cri harmonieux de sa joie et de sa douleur » comme nous le rappelle, dans le Prélude signé Colette Klein, la citation empruntée à Romain Rolland. En hommage le "1er mouvement" de ce Concerto reprend le début du livre homonyme de Pierre Esperbé, sur un rythme et tempo Moderato ; de même pour le 2ème mouvement : Adagio ; le 3ème : Allegro. Rappelons en effet que Le titre (de la revue) a été donné avec l’autorisation de Pierre Esperbé qui avait publié Concerto pour marées et silence, à la Librairie Chambelland, en 1974 (…). J’ai adopté le titre d’un livre de Pierre ESPERBÉ pour célébrer la poésie, précise C. Klein. Mais elle nous confie aussi dans ce numéro 18 qu’au moment de l’invasion de l’Ukraine elle a renoncé à écrire de la poésie. « J’avais trop parlé de la guerre, trop écrit sur la guerre. L’approche du désastre bouleversait mes convictions ancrées en moi depuis l’adolescence, m’avait fait comprendre que mon combat était vain ». Elle choisit par conséquent de laisser les mots à d’autres qu’elle publie ici, réconfortée malgré tout par l’humanité encore véhiculée par leurs voix. Désertée par la croyance d’un monde possiblement pacifique au vu de la violence absurde qui persiste à s’y déverser malgré les messages adressés jusqu’à nous par l’Histoire, Colette Klein s’en remet à l’espoir d’une paix encore envisagée par la poésie des autres, tout en restant fidèle à la conviction suivant laquelle l’art poétique et l’exploration scientifique nous proposent, chevillés au même texte universel qu’offre l’univers, une vision éclairante du monde.
Dans ce numéro 18 de Concerto pour marées et silence, revue « le mot paix existe », déclare-t-elle, « et je m’en abreuve ». Abreuvons-nous-en aussi en remerciant, et les poètes contributeurs de la vivacité de cette ressource, et Colette Klein offrant cet espace à la source jaillissante du Poème afin que, même souterraine ou à fleur de peau de nos sensibilités, ressurgisse intarissable l’espérance, celle d’un monde comme un homme hissé à hauteur d’humanité « pétri de paix et de riches promesses » (Léon Bralda).
© Murielle COMPÈRE-DEMARCY (MCDem.)
- Vu: 268