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Trois poèmes, par Charles Orlac

Ecrit par Charles Orlac 05.03.18 dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

Trois poèmes, par Charles Orlac

 

Capitale du gris

 

Il est des capitales de la couleur

Et puis Paris

Souterraine capitale du gris

Ombre pour ceux qui ne furent que l’ombre

Là-haut en surface l’hiver, le bruit

Et puis la bouche du métro

Accueillante à s’endormir

Glissante à en mourir

Faïence froide de l’oubli

……

Il ne s’agit pas de fuir

 

Quand on a franchi les maisons renversées

les longs silences des ruines,

les rues désertes encombrées de fantômes

de gravats de cadavres

on arrive aux bambous géants du fleuve,

large et tranquille,

à la rive où le matin chaussé d’espadrilles,

vient dans le bruissement de l’air et de l’eau

oublier les horreurs de la veille.

 

Il ne s’agit pas de fuir ce qui est

également laid :

la misère d’une terre qui craque au soleil,

la liberté au fond des cachots, enchaînée.

Il s’agit de retrouver la force de vivre,

se détacher de la rive

telle une embarcation fantôme qui rend

à nouveau le rêve possible.

……

 

Invisibles musiciens

 

Au-dessus du fleuve silencieux

Un panache de sons colorés.

La musique sur la toile

Dans l’azur la couleur en lamelles.

Arc-en-ciel peut-être ou possible illusion

Carillon frêle d’une voix

Sur la portée courbe du temps.

 

Invisible musicien

Le peintre sur sa toile

Qui peint la musique

Et la donne à entendre, muette,

Comme un sourd l’entend

Dans les mouvements de la danse.

 

Et parce qu’il doit peindre

Mouvements, durées, tonalités

Sa peinture est devenue dessin.

Mais celui dont le trait jamais

Sur lui-même, ne se referme.

Qui laisse apparaître

Dans ce qui reste d’hésitation

Mouvements, durées, tonalités,

Présence projetée au bord du visible

Et qui continue d’apparaître,

Même l’œuvre achevée.

……

 

J’aime les mots comme un marmot sa maman

Qui sait, sans elle, ne pouvoir grandir.

Les mots de marbre sur les stèles des statues

Les mots de pluie l’hiver sur les toits

Le vent qui pleure dans la chevelure des saules

Les mots engloutis qui n’ont que le sanglot

Pour rejaillir en fusion, désarticulés

Des mots libérés de toute censure

……

 

Charles Orlac

 


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A propos du rédacteur

Charles Orlac

 

Charles Orlac, né en Italie en 1953, a vécu sa jeunesse dans le sud de la France avant de s’installer à Paris en 1980. Agrégé de musique et diplômé d’une maîtrise d’italien, il partage son temps entre l’enseignement, son activité de musicien et l’écriture. Son recueil de poésie, Vie d’origami et autres pliages, est paru chez Edilivre en septembre 2016. Quelques-uns de ses textes ont été publiés dans diverses revues de poésie comme Le Capital des Mots, Lichen, Recours au poème.

https://www.edilivre.com