American Housewife, Helen Ellis
American Housewife, juin 2016, trad. anglais (USA) Sophie Brissaud, 208 pages, 18 €
Ecrivain(s): Helen Ellis Edition: La Martinière
La première des 12 nouvelles qui composent ce recueil, Ce que je fais de mes journées, détaille d’emblée la frénésie de la journée d’une new-yorkaise résidente de l’Upper East Side. Courses, tâches ménagères, réceptions, banalités d’usage, photos et vacheries sur le physique de quelques autres invitées. Le ton est donné.
Les nouvelles suivantes nous dépeignent l’univers sombre de la domesticité. Univers presque exclusivement féminin, si l’on excepte le passage de maris aux capacités étranges (L’ajusteur), quelque peu désespérés ou désespérants, tel le « Dr Boulette ».
Se posent bien sûr les questions liées à la féminité : la séduction ; la maternité, refusée ou au contraire malheureusement provoquée puis remplie d’enfants presque monstrueux ; les conventions familiales absurdes et exigées par une belle-mère toujours omnipotente ; des rapports entre femmes obsédées et agressives que l’on reçoit tout de même dans son « Club des Lectrices ».
Tout cela est dépeint avec justesse, et un humour grinçant qui fait sourire, voire franchement rire. Des problèmes de voisinage aux nécessaires assemblées artistiques ou culturelles, tout est disséqué. Sans oublier les mécanismes mensongers de l’émission de télé-réalité – « Chine avec les stars » – à laquelle notre « écrivain » se prête volontiers. Le stéréotype de la femme suggéré par la couverture vole en éclats pour dépeindre, en creux, la réalité du relationnel dans cette société new-yorkaise.
Les douze nouvelles qui servent ce projet sont composées de manières variées. L’une épouse le mode épistolaire, de manière moderne puisque les lettres sont en réalité des courriels ; d’autres prennent la forme de « mode d’emploi », ou encore suivent une structure narrative classique. Mais aucune n’évite la « chute » traditionnelle du genre, surprenante, parfois suspendue, pour mieux laisser au lecteur le doute ou la surprise.
Un recueil à lire comme un kaléidoscope sans concessions d’un certain univers féminin.
Christine Perrin-Lorent
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