Chapitre V
Regardant sa mère, après le déjeuner, piquer distraitement du bout de sa fourchette sa part de tarte, Rose ne pouvait se sortir cette phrase de l’esprit : « À la fin les enfants furent bien punis ». Elle commençait à comprendre ou du moins à entrevoir ce qui avait pu se passer. Un garçon dont les autres se moquent, sa mère y compris, à contrecœur peut-être, sans doute parce qu’elle n’ose pas le défendre. Ou parce que, comme les autres, elle le trouve bizarre. Ou peu importe. On se moque du garçon, on le rejette, on le laisse seul, en classe, dans la cour, au village. Dans la forêt. Les enfants du village devaient se retrouver dans la forêt, au printemps, après la classe, pendant les vacances d’été. Le garçon les suivait. Parce qu’il aimait la forêt. Parce qu’il voulait jouer avec eux. Ou parce qu’il habitait dans la forêt.
Il habitait dans la forêt…
Et puis, un jour, quelque chose se passe. Un accident. Une plaisanterie qui tourne mal. Dans la clairière. Dans l’arbre creux. Alors le regret, le remords. Toute la vie. Toujours.
C’était ça ?