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La Une Livres

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 29 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Essais, Classiques Garnier

Le Plaisir de lire des romans, Daniel Mortier, Classiques Garnier, 2023, 258 pages, 32 € Edition: Classiques Garnier

 

À bien des égards, le roman est un genre littéraire paradoxal, ne serait-ce que dans la mesure où, apparu tardivement et plus ou moins méprisé pendant des siècles par rapport aux « grands » genres, aux genres nobles qu’étaient la tragédie et l’épopée, il a pris une revanche aussi éclatante qu’écrasante : à peu près tout ce qui se publie depuis un moment déjà sous l’appellation de « littérature » (en dehors, donc, des documentaires, des essais et des ouvrages pratiques) appartient au genre romanesque ; la poésie et le théâtre se trouvant, en dehors des classiques, réduits à la portion congrue. Non seulement le roman a remplacé les autres genres littéraires, à la manière d’une espèce invasive – animale ou végétale – qui supplanterait des espèces de longue date acclimatées, mais encore, comme le remarquait Bakhtine, le roman a annexé et phagocyté les autres genres littéraires. La Mort de Virgile en est un exemple magnifique, même si cette œuvre symphonique ne ressemble que de loin à ce qu’on appelle en général un roman.

Les enfants d’Izieu, Rolande Causse-Gibel, Gilles Rapaport (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 28 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Histoire

Les enfants d’Izieu, Rolande Causse-Gibel, Gilles Rapaport, Éditions D’eux, avril 2024, 74 pages, 18 €

Izieu, 1944

Rolande Causse-Gibel (née en 1937, fondatrice de l’association La Scribure en 1975) est l’auteure d’un long poème, Les enfants d’Izieu, dont la déportation et l’assassinat sont de la responsabilité de Klaus Barbie (1913-1991, criminel de guerre allemand, officier de police SS sous le régime nazi), après la dénonciation d’un Français de Metz. Léa Feldblum (1918-1989), animatrice scolaire, a été la seule survivante de la rafle d’Izieu, ce dont elle a témoigné au procès de Klaus Barbie.

Ce texte émouvant et sobre nous fait revivre les ultimes moments, les petits mots de ces quarante-quatre innocents, âgés de quatre à dix ans, déportés « Le premier jour des vacances de Pâques / C’était le JEUDI 6 AVRIL 1944 ». Chacun de ces enfants a un vécu et une provenance différents, venus de toute l’Europe se réfugier à Izieu (commune du département de l’Ain, dans le Bugey). En arrière-fond, la guerre résonne, la peur de la délation, même si Radio-Londres diffuse des nouvelles rassurantes. Les enfants s’amusent, rêvent, dessinent, colorient, écrivent, fabriquent de petits objets, bien que séparés de leurs familles.

Histoire de l’Île, Evgueni Vodolazkine (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 27 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Russie, Roman, Récits, Editions des Syrtes

Histoire de l’Île, Evgueni Vodolazkine, Editions des Syrtes, janvier 2024, trad. russe, Anne-Marie Tatsis-Botton, 320 pages, 23 € Edition: Editions des Syrtes

Pour raconter son Histoire de l’Île, lieu inexistant et donc ouvert à tous les possibles, l’écrivain russe Evgueni Vodolazkine choisit une forme à la fois éloignée et proche du roman, la chronique. Ce sont donc trois-cent-cinquante années d’une lente évolution du Moyen Âge à l’époque contemporaine qui défilent en quelque trois cents pages, racontées par divers chroniqueurs au fil des siècles, depuis Nicanor l’Historien jusqu’à Innocent, longue lignée de moines qui racontent leurs époques respectives.

Ils racontent ainsi l’évolution politique de l’Île, avec comme constante et fil conducteur le couple princier formé par Xénie et Parthène, tous deux dotés d’une longévité exceptionnelle et non seulement témoins mais aussi commentateurs. En effet, l’Histoire de l’Île se présente comme étant l’édition complète d’une chronique connue et étudiée depuis son origine, édition sous l’égide d’un certain Philippe, qui a proposé à Parthène et Xénie de donner « leurs avis », « notes [qui] insensiblement ont pris le caractère d’un journal ». Par ces « notes », on glisse doucement d’une réflexion sur la chronique à une réflexion sur la longévité et la modernité, au regard posé par deux vieillards tricentenaires alertes issus d’une autre époque sur l’époque contemporaine, la nôtre.

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 23 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, Au Diable Vauvert

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet, éd. Au Diable Vauvert, mai 2024, 400 pages, 22 € Edition: Au Diable Vauvert

 

« Ce sont des anges de passage. Des anges aux visages graves. Vous aurez peut-être la chance de les entrevoir depuis les gradins des arènes. Ou dans certains tableaux de Modigliani. Fermez les yeux. Voilà. Croyez-moi sur parole. Une cape, des ailes, une épée ».

« L’art magique et prodigieux de toréer a aussi sa musique propre (intérieure et extérieure), et c’est ce qu’il a de mieux. Musique pour les yeux de l’âme et pour l’oreille du cœur, qui est la troisième dont nous parlait Nietzsche, celle qui écoute les harmonies supérieures », José Bergamín (1).

La corrida et les toreros fascinent les écrivains depuis bien longtemps. La liste est longue et passionnante des auteurs qui à leur façon ont touché la corne d’un toro bravo ou croisé le regard d’un torero : Hemingway évidemment, mais aussi Georges Bataille, Yvan Audouard, Jean-Marie Magnan, Jean Cau, Jacques Durand, ou encore Philippe Sollers.

Une fille sans histoire, Tassadit Imache (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 23 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions

Une fille sans histoire, Tassadit Imache, éditions Hors d’atteinte, avril 2024, 128 pages, 17 €

 

La deuxième génération

Tassadit Imache, née en 1958 à Argenteuil d’une mère française et d’un père algérien, est l’autrice de 8 romans, dont Une fille sans histoire, publié en 1989 chez Calmann-Lévy et sélectionné pour le Goncourt du premier roman. Ce roman est republié ici chez Hors d’atteinte. Sa voix, jointe à celle de Mehdi Charef, est issue de la deuxième génération d’enfants d’immigrés. Phonation qui a émergé de descendants d’anciens colonisés, condamnés à l’obscurité, à l’effacement et à un destin douloureux. À ce sujet, Faïza Guène s’interroge : « Comment, avec de simples mots, pourrais-je réparer les dégâts commis par un exil douloureux, par votre indifférence et par son rêve brisé ? ».