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Avilion, Robert Holdstock (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 01 Mai 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Science-fiction, Iles britanniques, Folio (Gallimard)

Avilion, Robert Holdstock, Folio, 2015, trad. anglais, Florence Dolisi, 528 pages, 9,90 €

 

« Je suis l’un des neuf aigles […]. Je suis l’un des neuf cerfs. Je suis l’un des neuf hommes perdus dans la forêt qui ont protégé une enfant. Je suis l’une des neuf voix. Je suis toute la vie qui s’est déroulée avant moi… ». Ainsi s’exprime Peredur, guerrier mythologique issu d’un fonds légendaire celtique, durant cette quête tant guerrière qu’existentielle qu’est Avilion. Ce roman est le cinquième et ultime volet d’une suite d’histoires relativement indépendantes les unes des autres et pourtant profondément imbriquées qui forment le cycle de La Forêt des Mythagos, création géniale et ambitieuse de l’Anglais Robert Holdstock étalée entre 1984 et 2009. Peredur s’exprime de la sorte car, comme chacun des personnages de ces cinq romans, il est une histoire et en contient de nombreuses à raconter, des histoires terribles puisque mythologiques, des histoires à la frontière entre notre monde et ceux contenus dans la forêt des Ryhope, des histoires racontant avant tout la quête de soi.

Un Shtetl, suivi de Père et fils, Yitskhok Meyer Weissenberg (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 30 Avril 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Pays de l'Est, Roman, Classiques Garnier

Un Shtetl, suivi de Père et fils, Yitskhok Meyer Weissenberg, Classiques Garnier, 2023, trad. yiddish, Jean Spector, 132 pages, 22 € Edition: Classiques Garnier

Les œuvres d’Yitskhok Meyer Weissenberg (1881-1938) appartiennent à une Atlantide doublement engloutie : celle de la littérature d’expression yiddish, d’une part, cette langue jadis parlée de l’Alsace à la Russie et qui, sans en avoir le prestige politique, religieux et intellectuel, connut seule une extension géographique comparable à celle du latin. Certes, il demeure en Israël et aux États-Unis des locuteurs de yiddish et même des écrivains qui publient dans cette langue. Mais – et c’est le second point – le yiddish israélien ou américain est fondamentalement une langue déracinée, car le terreau de cet idiome furent les shtetleh, ces bourgades juives d’Europe orientale, qui n’étaient pas à proprement parler des ghettos, mais des villages où la population était majoritairement juive, bien qu’il ne fût pas expressément interdit à un catholique de s’y établir – et cette cohabitation, qui donna lieu parfois à des scènes touchantes, fut incarnée par le personnage du shabbes goy, ce chrétien (qui finissait par connaître, sinon la théologie sous-jacente, du moins les usages du judaïsme, la praxis, aussi bien que les Juifs eux-mêmes) rémunéré par la communauté juive pour accomplir les besognes prohibées durant les fêtes religieuses, à commencer par le shabbat

La poésie est sur la table, Denise Le Dantec (par Marie-Hélène Prouteau)

Ecrit par Marie-Hélène Prouteau , le Mardi, 30 Avril 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Poésie, Unicité

La poésie est sur la table, Denise Le Dantec, éditions Unicité, 2023, 170 pages, 15 € . Ecrivain(s): Denise Le Dantec Edition: Unicité

Depuis plus de cinquante ans la poète Denise Le Dantec a composé une œuvre novatrice, inclassable, publiée chez : Flammarion, Stock, La Part commune, L’Herbe qui tremble, Le Silence qui roule, Tarabuste, les éditions des Instants, Unicité, entre autres. Celle qui fut liée à des poètes, tels Michel Leiris, Salah Stétié, Guillevic, Claude Roy, livre ici un très beau recueil aux éditions Unicité dans la Collection Brumes & Lanternes, dirigée par l’écrivain Éric Poindron.

Tous à la table de la poésie ! Le titre du recueil, les trois épigraphes, l’une de Suzanne Doppelt, « Le monde est une table », celle de Jack Spicer, poète américain de la Beat generation, celle aussi d’un extrait des Vedas, placent au cœur du recueil l’évocation de la nourriture, réelle ou symbolique. La jouissance des mets et des breuvages rejoint ici la symbolique poétique en une sorte de métaphore filée. Les cent cinquante-neuf poèmes du recueil, d’une extrême variété de formes, allant d’illuminations, de souvenirs d’enfance à des poèmes de réflexion poétologique se trouvent unis par la thématique de la nourriture. Défilent de drôles de mets, confiture achetée dans « une laverie automatique », salade fattouche, asperges peintes par Édouard Manet, vareniki d’Ukraine et boissons de même acabit, des quatre coins du monde :

Aujourd’hui, Amos, Anne Cortey, Janik Coat (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Mardi, 30 Avril 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Grasset, Jeunesse

Aujourd’hui, Amos, Anne Cortey, Janik Coat, Grasset-Jeunesse, 2016, 40 pages, 13 € Edition: Grasset

 

Instants de vie, instants de poésie

Ce livre délicieux donne l’illusion d’un carré, de par ses dimensions (16,7x17,6 cm), et comme il est indiqué, est « fait avec amour en pays de poésie ». Anne Cortey (née en 1966 à Avignon, ayant étudié l’histoire de l’art), et Janik Coat (née en 1972 à Rennes, diplômée de graphisme des Beaux-arts de Nantes), ont conçu à elles deux ce charmant album jeunesse très onirique.

Il s’agit ici du récit d’une journée d’Amos, un jeune garçon hybride bleu et rouge, à la fois koala et lapin, aux belles oreilles rouges, doté de grands yeux jaunes et d’une drôle de petite truffe noire toute ronde. Ce dernier est sage, rêveur et appliqué. Par ailleurs, il adore la campagne, l’odeur de la terre et des trésors qu’elle renferme et fait pousser… Doué d’inspiration, Amos écrit des poèmes !

Un geste vers le bas, Bartabas (par Alix Lerman Enriquez)

Ecrit par Alix Lerman Enriquez , le Lundi, 29 Avril 2024. , dans La Une Livres, Les Livres, Critiques, Récits, Gallimard

Un geste vers le bas, Bartabas, Gallimard, Coll. Blanche, mars 2024, 112 pages, 17 € Edition: Gallimard

 

Ce livre est le récit d’une rencontre et d’une amitié exceptionnelle entre Bartabas, célèbre écuyer, fondateur du théâtre équestre Zingaro, et Pina Bausch, grande danseuse allemande. Mais il est également le récit d’une autre rencontre, celle de cette même danseuse et d’un cheval nommé Micha Figa.

Bartabas révèle l’alchimie entre ces deux corps gracieux qu’un long travail d’entraînement a façonné sous le regard bienveillant de l’écuyer. Ce dernier décrit avec précision et enchantement ce corps-à corps sinueux, ce langage corporel habité par la grâce entre la danseuse et le cheval : « Il lui fait face, sabots plantés à l’aplomb de lui-même en signe d’interrogation. Question muette, à laquelle elle s’efforce de répondre avec les mots de son corps… Chez l’homme, comme chez l’animal, chaque geste dévoile un sentiment. Les sillages qu’ils creusent par le mouvement de leurs corps sont plus que des prières. Cette nuit, je sais que ce ne sont pas mes yeux qui ont vu, mais mon cœur qui a déterré un poème enseveli ».