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La Une CED

Ah ! Ça ira !

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 05 Juin 2015. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

 

 

 

 

Ce soir les éclopés, les ploucs, les prolétaires,

La lie, les va-nu-pieds, la boue, les culs-terreux,

Les gueux, les affamés, les flous, les ténébreux,

Désertent les clapiers, les égouts, les tanières.

 

Au glas turbulent des beffrois

Les rebuts jouent les rabat-joie

Dans les tours trépidant d’effroi

Le bourdon bat chez les bourgeois

Shutter Island, l’autre terreur, par Léon-Marc Levy

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 04 Juin 2015. , dans La Une CED, Les Chroniques, Chroniques régulières, Côté écrans

 

Je ne quitte décidément plus ce ponton d’arrivée des ferries sur une île bostonienne. La scène d’ouverture de Shutter Island est rigoureusement située au même endroit que celle du Ghost Writer de Polanski. C’est le premier choc hallucinant de ce film. Polanski et Scorsese se sont-ils donné le mot ? Il y en a d’autres des chocs… plein d’autres, presque trop, ce qui, à un moment, peut paraître surcharge de la narration : à force de jouer sur les nerfs du spectateur, Scorsese les « sature » en quelque sorte, jusqu’à installer un sentiment de banalisation de l’incertitude et de l’horreur inattendue. L’effet est évidemment voulu : banaliser l’inquiétude pour accroître le choc de la vérité.

Il faut dire (il faut bien !) d’abord que Shutter Island est un film somptueux et magistralement dirigé, porté par un Leonardo Di Caprio gigantesque, habité, génial. J’avais lu en 2003 le livre de Dennis Lehane. Assez bien. Martin Scorsese en fait un film immense.

C’est un thriller. Ah bon, tout le monde vous l’a dit ? A la fois film policier et thriller paranoïaque, où s’entrecroisent les cauchemars réels et les cauchemars de la folie.

Artaud ou « la machine de l’être à regarder de traviole » Quel fut / quel est le style d’Antonin Artaud ?

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 03 Juin 2015. , dans La Une CED, Ecriture, Création poétique

 

Son style n’est pas :

– Tric Trac du Ciel, recueil de poèmes édité en mai 1923 c/o Kahnweiler éditeur.

Ce « petit livre de vers en effet ne me représente en aucune façon », écrit Artaud en 1946.

Ne le représente pas effectivement parce que ces vers « ont un petit air désuet d’une littérature à la (…), farces d’un style qui n’en est pas un » – un style « comme celui d’un dandy qui ferait glacer ses manchettes, n’ayant plus pour col de chemise que le tronc d’un guillotiné ».

Autrement dit le style d’un écrivain (écri-vain ?) qui de façon imagée n’aurait plus sa tête – puisque « guillotiné », non pas « décapité » mais « guillotiné » c’est-à-dire dont on a coupé la tête / la liberté d’esprit – au sens figuré un écri-vain qui n’aurait plus la pleine possession de son esprit.

Le Jardin de derrière (24 & FIN) Où il n’y a pas de fumée sans feu

Ecrit par Ivanne Rialland , le Lundi, 01 Juin 2015. , dans La Une CED, Ecriture, Ecrits suivis

 

Georges et Hélène étaient accoudés sur le balcon, regardant le ciel de juillet se foncer insensiblement, laissant apparaître les premières étoiles. Un peu plus d’un an s’était écoulé. Hélène s’était installée à l’automne dans la maison et passait deux ou trois jours par semaine à Paris. Louise et Pierre allaient au collège-lycée d’Avallon. Pierre ne voyait plus Tristan ni aucun membre de son groupe. Il en avait fondé un autre, avec qui il répétait ce soir-là dans une grange d’un village voisin. Louise fréquentait toujours les deux enfants du jardinier, avec qui elle était en ce moment même dans la grange, à regarder des DVD des Experts. Avec Camille Martineau, elle avait trouvé un job d’été à la pépinière qui avait enfin ouvert ses portes dans la ZAC. Elles y espionnaient Julien, qui rempotait des géraniums en rêvant à sa future moto tandis que la petite Jeanne distribuait en douce dans les rayons des tracts anti-avortement.

Georges et Hélène respiraient tranquillement l’air tiède du crépuscule. En tendant bien l’oreille, on aurait peut-être entendu le ronronnement de la turbine enterrée sous le pré, et peut-être encore le gloussement d’une poule en train de rêver, dans le poulailler tout neuf que Georges avait installé au printemps.

« Une traversée des apparences » - Une histoire à tenir debout, Régine Salvat

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Samedi, 30 Mai 2015. , dans La Une CED, Les Chroniques

Une histoire à tenir debout, Régine Salvat, Editions J.C Lattès, 2011

 

Comment parler du livre de Régine Salvat sans évoquer l’émotion violente et incompressible qui nous étreint en le lisant, sans évoquer la présence à chaque mot, de RémY, pendant notre lecture.

RémY (avec un Y !), un être doté d’une grande intelligence, sensible, magnanime et qui a su gagner tant de combats contre sa maladie, à différentes étapes, pour apprendre à lire, à écrire, quand sa maladie l’entravait, qui a refusé le plus longtemps possible le fauteuil roulant, pratiqué l’aïkido et qui a décidé tel un samouraï de suivre cette éthique exemplaire qu’il admirait : la droiture est le pouvoir de décider une certaine ligne de conduite en accord avec la raison, sans hésiter ; mourir lorsqu’il faut mourir, combattre quand il faut combattre ; « le courage est la vertu des héros… c’est un réel courage de vivre lorsqu’il est juste de vivre et de mourir seulement lorsqu’il est juste de mourir ». Des phrases qu’il avait soulignées dans son livre préféré. « Rémy c’était mon Gandhi, et plus encore », disait de lui son ami Loïs.