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La Une CED

Parias, Hannah Arendt et la “tribu” en France (1933-1941), Marina Touilliez (par Marie-Pierre Fiorentino)

Ecrit par Marie-Pierre Fiorentino , le Mercredi, 21 Mai 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Parias, Hannah Arendt et la “tribu” en France (1933-1941), Marina Touilliez, Editions L’Echappée, octobre 2024, 500 pages, 24 €

 

« Ami entends-tu… »

Joseph Kessel et Maurice Druon,

Le chant des partisans.

Ce livre, très richement documenté et agrémenté de photographies dans une mise en page et une graphie élégantes, repose sur la tension bien équilibrée entre biographie et histoire. En effet, Marina Touilliez raconte comment des réfugiés, pour la plupart Allemands et Juifs, pris en otages entre le totalitarisme nazi, vite et fermement établi en Allemagne, le totalitarisme en gestation du régime de Vichy et même celui stalinien à travers des persécutions orchestrées à distance, comment, donc, plusieurs de ces hommes et de ces femmes forment en France, à partir de 1933, une « tribu ». De ces huit années pourtant, Arendt trouvera encore, à la fin de sa vie, la force de déclarer qu’« elles furent assez heureuses ».

Ainsi Parlait Goethe, Roland Krebs (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mardi, 20 Mai 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Arfuyen

Ainsi Parlait Goethe, Arfuyen, trad. allemand, Roland Krebs, bilingue, 190 pages, 2025, 14 €

 

Esprit

Il est difficile de résumer en quelques lignes le massif conceptuel que représente la poésie de Goethe. Je dis cela sans considérer la portée historique du poète allemand ni son importance pour le passage de l’esthétique classique à celle du romantisme. Je ne veux ici que resserrer son importance par un simple mot : esprit. Car à mon sens, sans entrer dans des considérations analytiques ou linguistiques, c’est le mot esprit qui est le plus fort et qui rejaillit le plus fortement dans ses dits et maximes, une pensée ample, concentrée, fine. L’on ressent à cette lecture une impression souveraine de maîtrise de soi, d’une manière de style, un entendement qui se joue des coupures et des contradictions, jusqu’à se condenser dans l’idée, le côté solaire de l’idée platonicienne.

Griffes 19 (par Alain Faurieux)

Ecrit par Alain Faurieux , le Lundi, 19 Mai 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

 

Lakestone, Sarah Rivens, 2024, Hlab Editions, 800 pages, 20 €

Un livre incroyable ! Vraiment incroyable. Écrit par « l’auteure Algérienne la plus lue de l’Histoire » ! 9.000.000 de lecteurs ! Créatrice de la trilogie Captive qui a captivé tous les réseaux (pas lue). Il a l’aspect d’un livre, épais, belle couverture, avec des pages pleines de texte. Dommage qu’il soit incroyablement vide. 800 pages de vide. Je n’ose plus appeler ça un livre. Tout comme son auteure (avec un tel pseudo beaucoup de ses lecteur/es la pensent anglaise, ou américaine), la chose n’a aucune identité. Quelques noms baladés ici où là dans le texte (New York, Seattle) nous disent que l’action est censée se passer aux États-Unis mais le décor planté par notre Sarah ressemble aux accessoires cheap d’un téléfilm M6. On nous parle de ministre et de journal de vingt heures. L’héroïne est étudiante ! une fac ça s’écrit fac, et ça suffit. Pas la peine de parler de rues, bâtiments, campus, ou étudiants.

Mercurio, Philippe Mezescaze (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Mercredi, 14 Mai 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Roman, Mercure de France

Mercurio, Philippe Mezescaze, Mercure de France, avril 2025, 192 pages, 19 €

 

Mercurio, le personnage éponyme du dernier roman de Philippe Mezescaze, c’est Monsieur de Bougrelon. Je m’explique : dans le roman de Jean Lorrain publié en 1897 et chroniqué dans cette revue en octobre 2024, nous sommes à Amsterdam à une date indéterminée, une Amsterdam hivernale, puritaine et dévergondée à la fois. Le narrateur anonyme et son ami y font la connaissance d’un singulier compatriote, de souche normande comme eux, qui semble avoir pour préoccupation première, à travers ses discours et sa gestuelle, et en dépit de son allure décatie, d’imposer de soi et de son passé, de ses conquêtes, de sa relation de jadis avec Monsieur de Mortimer, son double embelli, une image fastueuse. Des doutes naissent sur la véracité des propos du « vieux fantoche », que l’épilogue confirmera : Monsieur de Bougrelon subsiste péniblement en tenant un humble rôle de violoniste dans un cabaret minable.

La Conversation de Bolzano, Sándor Márai (par Mona)

Ecrit par Mona , le Mardi, 13 Mai 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Pays de l'Est

La Conversation de Bolzano, Sándor Márai, Editions Le Livre de Poche, 2002, trad. hongrois, Charles Zaremba, 284 pages

Sándor Márai, l’un des plus grands auteurs hongrois de la Mitteleuropa longtemps méconnu en France, victime tour à tour du nazisme et du communisme, fait un pied de nez aux tyrans avec La Conversation de Bolzano. Son roman s’inspire d’un épisode des mémoires du grand séducteur libertin du 18ème siècle, Giacomo Casanova, évadé de la prison des Plombs à Venise en compagnie d’un moine défroqué. De retour à Bolzano, le fugitif sème la zizanie dans la petite ville où il s’était battu en duel avec le comte de Parme pour l’amour de la jeune Francesca. Le roman oscille entre bouffonnerie et drame : Giacomo, qui ambitionne de devenir écrivain, se proclame « rebouteux de l’amour » et prodigue ses conseils loufoques aux bons bourgeois tandis que le comte tente de libérer sa bien-aimée de « l’envoûtement de l’amour ». La Conversation de Bolzano condense deux joutes verbales en une nuit inoubliable : le face à face de Giacomo et du comte, puis celui de Francesca face à Giacomo, remarquablement mis en scène par Jean-Louis Thamin au théâtre de l’Atalante à Paris en 2012. Dans une première tirade pleine de verve, le comte disserte sur le bref courrier d’amour destiné à sa femme qu’il a intercepté et propose à Giacomo un contrat surprenant : argent et protection en échange d’une nuit avec elle à condition de disparaître à jamais.