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La Une CED

Ton corps est là, Répons de Ténèbres, François Rannou (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 25 Août 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

Ton corps est là, Répons de Ténèbres, François Rannou, éd. Bruno Guattari, 2025, 97 p. 12€

 

Transparence et opacité

Pour donner à entendre mon sentiment à l’égard de ce recueil de François Rannou que publient les éditions Bruno Guattari, je dirais que ce voyage (petit en termes de volume) m’a conduit à la fois à travers transparence et opacité, un voyage au sein des ténèbres et de la lumière. Là où le corps est dans son éclipse. Selon moi, le travail qui inaugure le livre vient du chapitre I de l’Évangile de Matthieu, de la description des filiations - la partie très claire du livre. Donc, une sorte de quête dans le temps des créatures, chemin générique et génésique tout à la fois, un arrière-monde d’utopie, de mythe, le mythe d’une famille. Puis, l’on avance dans l’opacité, dans la profondeur d’une réponse énigmatique au monde, peut-être là aussi éclipse du corps : matérialité impénétrable, conscience en demi-teinte, à moitié sûre de la présence du corps à lui-même.

Judéobsessions, Guillaume Erner (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 21 Août 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Flammarion

Judéobsessions, Guillaume Erner, Flammarion, 2025, 300 pages, 20 €.

 

On doit partir d’une considération simple : les personnes professant (et encore faudrait-il s’entendre sur le sens de ce mot) la religion juive représentent moins d’un quart de pourcent de la population mondiale. Il y a sur la planète moins de Juifs qu’il n’y a d’habitants au Kazakhstan, au Cambodge ou au Sri Lanka. Pour que l’attention médiatique universelle soit durablement attirée par le Kazakhstan, le Cambodge ou le Sri Lanka, il faudrait que s’y produise une explosion atomique – et même plusieurs. Une guerre ne suffirait pas : après tout, le Sri Lanka fut pendant près de trente ans le théâtre d’une atroce guerre civile menée par le mouvement des Tigres tamouls (une organisation terroriste jugée plus dangereuse qu’Al-Qaida par les services américains) dans une indifférence internationale complète ; la même indifférence avec laquelle l’opinion mondiale accueille depuis un demi-siècle le mur édifié par la Turquie et coupant en deux l’île de Chypre.

Minuscule & immense poésie de René Cloitre (par Gilles Cervera)

Ecrit par Gilles Cervera , le Mardi, 19 Août 2025. , dans La Une CED, Les Chroniques

 

Il y a partout par ici et par là, entre les talus de chênes qui verticalisent le plat du ciel ou entre les lanières de champs des plaines, moissons à cette saison, entre les tours des villes, verticales elles aussi ou les rues toutes pareilles, semble-t-il au premier regard, des lotissements urbains et périurbains, des poètes.

Il y a des milliers de milliards de poètes. Par ici et par là.

Minuscules et nombreux sous les mansardes surchauffées, moissons à brûle-pourpoint, ou sous l’ombreuse claie des nuages en campagne (i.e la ruralité comme certains technos disent), ils sont nombreux et tellement, tellement discrets.

Sortons-les de leurs limbes, désencastrons-les de leurs astres !

L’impartagée, Joël Mansa (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 18 Août 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques, Poésie

L’impartagée, Joël Mansa, préf. Thibault Biscarrat, éd. Le Nouvel Athanor, 2025, 102 p., 18€

 

Se recueillir, voilà à quoi confine le dernier recueil de poésie de Joël Mansa. Car le sentiment esthétique se lie ici au sentiment moral. J’y ai vu pour ma part une accointance avec l’univers de Charles Juliet, c’est-à-dire un style fluide, sans enflure, juste cependant, plein et dissert, une appréhension de la vie simple dans son âpreté, et le sentiment d’avoir échappé au pire. Donc, une voix claire qui sait dire ce qu’elle a à dire (aspect tautologique du Gardeur de Troupeau de Pessoa ?). Ce qui nous mène malgré tout vers une métaphysique.

L’impartagé reste ce qui se partage néanmoins dans le poème, en marge, comme l’on partage le silence dans l’amitié complice, comme est la part commune de la parole. Ce hors champs devient, selon son rythme poétique, un lien avec l’impartagé existentiel. Lien susceptible de partage - y compris pour celui qui cherche le silence -, vérité presque inaudible du poème refusant le tout venant du langage, préférant chercher, quitte à expliquer en quoi il est définitivement impartageable dans sa puissance radicale, dans sa puissance.

Griffes 21 (par Alain Faurieux)

Ecrit par Alain Faurieux , le Jeudi, 10 Juillet 2025. , dans La Une CED, Les Livres, Les Chroniques

 

La vallée, Arnaud Sagard. 2025, Seuil. 224 p. 20,50 €

Et un navet, un ! Encore !

Présenté comme un roman dystopique, un vilain petit machin. Quoi ne PAS aimer en fait dans ces plus de deux cents pages ? Tout. D’abord se débarrasser du côté SF : c’est à peu près aussi dystopique qu’une pub pour un café éco-responsable. Un simple prétexte. Mais pour quoi ? L’objet scientifique central étant finalement plus décevant qu’innovant. Et surtout peu révolutionnaire pour 2025 (sans parler du fait qu’il ne soit jamais qu’en construction tout au long du livre). Un implant neuronal qui permettrait à la Boîte possédant le Groupe de faire vivre à ses abonnés leurs rêves de toujours (entre Astérix et La Guerre des Étoiles). C’est expédié, comme tout le reste, en à peu près et écrans de fumée. Public ? Tout le monde.