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Essais

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm / Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 24 Novembre 2022. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Pierre Reverdy, Écrire, pour survivre, Roger Aïm, Éditions La Simarre, juin 2022, 132 pages, 15 €

Julien Gracq, Prix Goncourt 1951, Histoire d’un refus (Essai), Roger Aïm, Éditions La Simarre, août 2020, 75 pages, 13 €

 

« Écrire m’a sauvé – j’ai sauvé mon âme. Je ne peux pas imaginer ce qu’eût été ma vie si je n’avais pas écrit. Mais je crois que je ne suis ni un poète, ni un écrivain, ni un artiste. Mais un homme qui n’a pas trouvé d’autre moyen de garder le contact avec la vie, de surnager. J’ai écrit comme on s’accroche à une bouée » (Lettre de Pierre Reverdy à Jean Rousselot, 16 mai 1951).

« Dadaïste avant le mouvement Dada, surréaliste avant Breton, il s’inscrit dans la discipline constructive (Apollinaire) du cubisme. Même si plus tard il préserve ses relations avec les artistes surréalistes comme il l’avait fait avec les cubistes, sa trajectoire poétique originale sera autre, dans la solitude (Roger Aïm).

Manuel du Prince Indien, L’Arthashastra de Kautilya (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mercredi, 16 Novembre 2022. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie, Les Belles Lettres

Manuel du Prince Indien, L’Arthashastra de Kautilya, morceaux choisis introduits, commentés et traduits du sanskrit par Marinette Dambuyant, photographies et postface par Anthony Cerulli, avril 2022, 272 pages, 23 € Edition: Les Belles Lettres

 

Dans sa préface à la traduction de l’Offrande Lyrique de Tagore, Gide a rappelé le mot d’un écrivain oublié, Paul de Saint-Victor (1827-1881) : « Entre l’esprit européen et celui de l’Inde se dressent cent millions de dieux monstrueux ». Des dieux, mais pas seulement : des manuscrits par millions également (entre sept et trente millions, selon les estimations, et un écart pareil indique à lui seul l’ampleur du travail d’inventaire encore à accomplir) ; des manuscrits comme ceux photographiés par Anthony Cerulli, un professeur américain, dont les clichés émouvants agrémentent les pages de ce volume ; des manuscrits très différents, au point de vue matériel, des codices occidentaux (ils furent copiés sur des feuilles de palmier ou de bananier réunies par une simple couture dans la marge, entre deux ais de bois) et conservés dans des conditions parfois aléatoires, le climat chaud et humide du subcontinent étant mauvais pour eux – sans même évoquer d’autres circonstances favorables à la disparition de bibliothèques entières, comme les convulsions politiques, dont l’histoire indienne fut prodigue.

Sauvegarde, Journal 2001-2003, Imre Kertész (par Olivier Verdun)

Ecrit par Olivier Verdun , le Mercredi, 09 Novembre 2022. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays de l'Est, Actes Sud

Sauvegarde, Journal 2001-2003, Imre Kertész, Actes Sud, 2012, trad. hongrois, Natalia Zaremba-Huzsvai, Charles Zaremba, 223 pages, 19,80 € . Ecrivain(s): Imre Kertész

 

« La vie est une erreur que même la mort ne répare pas » (Imre Kertész, Sauvegarde, p.82).

« Depuis notre naissance, nous sommes des prisonniers condamnés à mort ; moi, le destin me le rappelle sans cesse. Et comme je suis partisan des principes raisonnables, je ne peux en vouloir à personne pour cela. De ce point de vue, Job avait la partie facile, avec son Dieu amateur de paris » (ibid., p.87).

Pour ceux qui ne connaissent pas Imre Kertész, prix Nobel de littérature en 2002, il faut lire Sauvegarde, le journal que le grand écrivain hongrois a tenu de 2001 à 2003. On y découvrira un homme au soir de sa vie, diminué par la maladie de Parkinson qui restreint l’usage de sa main et qui le contraint à tenir son journal grâce à un ordinateur – un homme profondément lucide sur le monde et sur lui-même, taraudé par les « humiliations physiques de la vieillesse », arpentant les « antichambres grises de la mort », un homme d’une sincérité absolue, à l’ironie subtile et jamais cynique, qui n’hésite pas à déclarer, avec la verve qu’on lui connaît : « Je ne suis pas un humaniste, il me reste encore quelque sentiment humain ».

Les Chasseurs-cueilleurs, ou L’Origine des inégalités, Alain Testart (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 08 Novembre 2022. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Les Chasseurs-cueilleurs, ou L’Origine des inégalités, Alain Testart, Folio, mai 2022, 400 pages, 9,40 € Edition: Folio (Gallimard)

Aujourd’hui encore, l’école fait miroiter un « âge d’or » préhistorique, pré-néolithique, celui d’une société de chasseurs-cueilleurs proto-communistes, où l’égalitarisme aurait été la règle. Entre marxisme caricatural et souvenir fumeux du Jardin d’Eden, le tout saupoudré d’un rien de rousseauisme, cette vision est touchante, et, tant au point de vue sociétal qu’au point de vue écologique, l’apparition de la domestication, tant animale que végétale, est décrite comme le moment-clé où tout bascule, du paradis vers l’enfer – outre que cela génère des regrets voire des remords, cela pourrait inciter à un retour illusoire vers ce supposé paradis.

Comme toute vision binaire, historique ou autre, elle laisse songeur, et ce fut le grand mérite d’Alain Testart, en 1982, de publier un essai qui a fait date, Les Chasseurs-cueilleurs, ou L’Origine des inégalités, dans lequel il montrait que le stockage, même s’il ne menait pas de façon mécanique à l’apparition de l’inégalité, était une possibilité d’émergence de cette inégalité. Pour ce faire, son étude, brillante et complète, propose deux champs d’investigation : l’un synchronique, celui de l’ethnologie, l’autre diachronique, celui de l’archéologie, et permet d’ainsi faire dialoguer l’humanité d’aujourd’hui et celle d’hier.

Dictionnaire amoureux de la Belle Epoque et des Années folles, Benoît Duteurtre (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 07 Novembre 2022. , dans Essais, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Plon

Dictionnaire amoureux de la Belle Epoque et des Années folles, Benoît Duteurtre, Editions Plon, août 2022, 644 pages, 25 € Edition: Plon

 

 

Une machine à rêver

« Quoi de plus raisonnable qu’un dictionnaire ? » s’interrogeait Roland Barthes dans les années 80. On y trouve des classements précis, un ordre et une rigueur. On y glane des connaissances, des informations et il vient renseigner nos sollicitations. Mais, toujours selon Barthes, cet « objet robuste » est aussi « une machine à rêver », riche en découvertes et en évasions de toutes sortes. Un ouvrage raisonné et onirique, voilà donc ce que serait un dictionnaire. On retrouve ces deux qualités dans la publication de Benoît Duteurtre consacrée à la Belle Époque et aux Années folles, un dictionnaire « amoureux » qui sait nous transmettre la passion que ces deux époques font immanquablement naître.