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Critiques

Histoire de l’Île, Evgueni Vodolazkine (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Lundi, 27 Mai 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Russie, Roman, Récits, Editions des Syrtes

Histoire de l’Île, Evgueni Vodolazkine, Editions des Syrtes, janvier 2024, trad. russe, Anne-Marie Tatsis-Botton, 320 pages, 23 € Edition: Editions des Syrtes

Pour raconter son Histoire de l’Île, lieu inexistant et donc ouvert à tous les possibles, l’écrivain russe Evgueni Vodolazkine choisit une forme à la fois éloignée et proche du roman, la chronique. Ce sont donc trois-cent-cinquante années d’une lente évolution du Moyen Âge à l’époque contemporaine qui défilent en quelque trois cents pages, racontées par divers chroniqueurs au fil des siècles, depuis Nicanor l’Historien jusqu’à Innocent, longue lignée de moines qui racontent leurs époques respectives.

Ils racontent ainsi l’évolution politique de l’Île, avec comme constante et fil conducteur le couple princier formé par Xénie et Parthène, tous deux dotés d’une longévité exceptionnelle et non seulement témoins mais aussi commentateurs. En effet, l’Histoire de l’Île se présente comme étant l’édition complète d’une chronique connue et étudiée depuis son origine, édition sous l’égide d’un certain Philippe, qui a proposé à Parthène et Xénie de donner « leurs avis », « notes [qui] insensiblement ont pris le caractère d’un journal ». Par ces « notes », on glisse doucement d’une réflexion sur la chronique à une réflexion sur la longévité et la modernité, au regard posé par deux vieillards tricentenaires alertes issus d’une autre époque sur l’époque contemporaine, la nôtre.

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 23 Mai 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Récits, Au Diable Vauvert

Lettres à Juan Bautista (Vingt ans après), Yves Charnet, éd. Au Diable Vauvert, mai 2024, 400 pages, 22 € Edition: Au Diable Vauvert

 

« Ce sont des anges de passage. Des anges aux visages graves. Vous aurez peut-être la chance de les entrevoir depuis les gradins des arènes. Ou dans certains tableaux de Modigliani. Fermez les yeux. Voilà. Croyez-moi sur parole. Une cape, des ailes, une épée ».

« L’art magique et prodigieux de toréer a aussi sa musique propre (intérieure et extérieure), et c’est ce qu’il a de mieux. Musique pour les yeux de l’âme et pour l’oreille du cœur, qui est la troisième dont nous parlait Nietzsche, celle qui écoute les harmonies supérieures », José Bergamín (1).

La corrida et les toreros fascinent les écrivains depuis bien longtemps. La liste est longue et passionnante des auteurs qui à leur façon ont touché la corne d’un toro bravo ou croisé le regard d’un torero : Hemingway évidemment, mais aussi Georges Bataille, Yvan Audouard, Jean-Marie Magnan, Jean Cau, Jacques Durand, ou encore Philippe Sollers.

La Poésie comique, du Moyen Âge à nos jours, Collectif, Anthologie, Stéphanie Lecompte (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mercredi, 22 Mai 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Folio (Gallimard), Anthologie

La Poésie comique, du Moyen Âge à nos jours, Collectif, Anthologie, Stéphanie Lecompte, Folio+Lycée, novembre 2023, 272 pages, 4,20 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Dans l’imaginaire collectif, poésie rime le plus souvent avec mélancolie, parfois avec folie, courtoisie ou philosophie, mais rarement avec gauloiserie. C’est tout l’intérêt de la présente anthologie, à destination il est vrai d’un public scolaire, préparation du Bac 2024 oblige, que de faire sourire voire rire en vers – envers et contre tout, aurait-on envie d’ajouter, puisque quelques textes combattent par l’humour. En effet, en respectant la chronologie et en explorant différentes formes poétiques (le rondeau, le fatras, le coq-à-l’âne, mais aussi le sonnet ou le poème en prose), Stéphanie Lecompte propose un parcours souriant de l’histoire de la poésie française, y invitant les plus grands noms, de Rutebeuf à Tardieu en passant par Villon, Marot, Du Bellay, Scarron, Baudelaire, ou encore Rimbaud. Même Hugo, pourtant guère surnommé « le rigolo », est présent le temps d’une Chanson, extraite des Châtiments.

La revenante, Françoise Gérard (par Marie-Hélène Prouteau)

Ecrit par Marie-Hélène Prouteau , le Mercredi, 22 Mai 2024. , dans Critiques, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Récits

La revenante, Françoise Gérard, édition La Chambre d’échos, mars 2024, 82 pages, 14 €

 

 

Françoise Gérard qui a publié plusieurs livres aux éditions La Chambre d’échos nous offre ici un périple de la mémoire et de la rêverie qui nous emmène dans une ville du Nord. Ce n’est que plus avant dans le récit que l’on apprend qu’il s’agit d’Armentières. L’importance, en effet, n’est pas dans le jeu référentiel mais dans la résonance d’une fibre intérieure, celle de la « revenante », ce personnage féminin au cœur du récit présenté à la troisième personne. D’elle, nous ne saurons que très peu de choses. La « revenante » demeurera pour le lecteur une sorte d’être de fuite, assez peu dessiné. Sauf par quelques détails biographiques liés aux aménagements de la maison familiale à l’arrivée de la grand-mère devenue veuve.

Allez-y voir, Ecrits sur la peinture, Raymond Queneau (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Mardi, 21 Mai 2024. , dans Critiques, Les Livres, Essais, La Une Livres, Gallimard, Arts

Allez-y voir, Ecrits sur la peinture, Raymond Queneau, Gallimard, mars 2024, 208 pages, 21 € Edition: Gallimard

 

Les lunettes de Raymond Queneau

Les photographies que nous connaissons de Raymond Queneau nous le représentent toujours chaussé de lunettes, certaines fines et d’autres souvent cerclées de montures épaisses. Qu’il fût myope n’est pas le problème, mais notre poète facétieux a toujours su se démarquer par son regard. Voyait-il le monde comme le sens commun ? Certainement pas. Quel regard portait-il sur l’art et notamment la peinture ? Il faut aller y voir, comme le propose l’ouvrage qui rassemble nombre de ses écrits sur des peintres qu’il a côtoyés.

L’ouvrage au titre engageant, Allez-y voir, recollecte des textes de Queneau écrits en revues, dans des catalogues, préfaces ou autres monographies. Ils sont présentés d’une manière chronologique de la fin des années vingt jusqu’aux années soixante-dix. Ce sont des textes sur divers peintres, ceux qu’il a aimés particulièrement, Juan Miró, Jean Dubuffet, Elie Lascaux, par exemple. On y découvre un Queneau amateur d’art, bien perspicace dans ses avis.