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Les Chroniques

L’Heureux retour , Un Vaisseau de Ligne & Pavillon haut, Cecil Scott Forester, Folio (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 24 Août 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Folio (Gallimard)

Cecil Scott Forester, L’Heureux retour (336 p.), Un Vaisseau de Ligne (384 p.) & Pavillon haut (336 p.), trad. de l’anglais par Louis Guilloux et René Robert, Gallimard/Folio, mai 2021, 8,60 €

 

Cecil Scott Forester (1899-1966) a débuté sa carrière littéraire comme polygraphe, publiant durant les années vingt et le début des années trente des essais historiques (dont deux sur Napoléon et un sur Nelson, comme des préparations aux romans maritimes à venir), un récit de voyage sur un yacht, des récits policiers et d’autres de guerre maritime, situés tant durant les guerres napoléoniennes (dont le virulemment titré Death to the French, 1932) que durant la Première Guerre mondiale. En 1935, il publie un roman sous haute inspiration conradienne, The African Queen, dont l’adaptation cinématographique en 1951 fait partie des classiques du septième art. Et deux ans plus tard, il publie le premier tome des aventures du Capitaine Hornblower, The Happy return ; le succès de ce roman dans les pays anglo-saxons l’incitera par la suite à dédier essentiellement sa plume à ce personnage jusqu’à sa mort – survenue alors qu’il vient d’écrire une dernière nouvelle relative à Hornblower, The Last Encounter.

L’œuvre poétique I, Sundgäu, Nathan Katz (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 23 Août 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

L’œuvre poétique I, Sundgäu, Nathan Katz, éd. Arfuyen, mai 2021, trad. allemand, Théophane Bruchlen, Collectif, 276 pages, 19,50 €

 

Erlkönig

Cette traduction de Nathan Katz des éditions Arfuyen peut se prévaloir de deux simples mots, tirés des vertus théologales : la foi et l’espoir. Qualités morales non pas strictement en relation avec une religion, mais plutôt portées vers la hantise des disparus, soldats, paysans, dans des révoltes, des combats sociaux. Le poète prie pour le salut de leur âme, et voit une résurrection possible au moins par le poème. Il pourrait revendiquer la force de la foi (laquelle demandée à la divinité est capable de déplacer des montagnes). J’ai dit force et je dis aussi espoir. Cette force sensible, bien souvent au travers de cette poésie, s’apparente à un espoir extraordinaire dans la capacité de faire revenir les Lazare de 1914/18 à la vie. Propos de résurrection. Propos de paix. Propos d’Apocalypse. Espoir presque sacré.

Sélection du Prix littéraire de la vocation, 2021 Fondation Marcel Bleustein-Blanchet pour la vocation @FdtVocation (par Sylvie Ferrando)

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Vendredi, 20 Août 2021. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

(1) Toni tout court, Shane Haddad (POL, janvier 2021, 160 pages, 17 €)

Il s’agit d’un livre à l’écriture minimaliste. Par petites touches, par courtes phrases, la narratrice (Toni, 20 ans) dépeint le temps qui s’écoule, geste après geste, depuis son lever, un certain vendredi d’anniversaire et de match. Ce monologue intérieur ininterrompu s’exprime sous différentes formes énonciatives : tout d’abord à la deuxième personne du singulier, comme une injonction à sortir de soi, à dire sa vie, ses pensées, ses émotions – l’instance dialogique de Mikhaël Bakhtine fait ici ses preuves (« Avance Toni », « Pourquoi tu fais ça », « Tu devrais sortir », « Tais-toi Toni »). Mais le texte s’exprime aussi plus classiquement en « elle » (« Toni regarde ses mains ») ou en « je » (« Mes cheveux mes cheveux »). Les apostrophes y sont nombreuses, parfois nourries de références littéraires : « Mon frère, tu te souviens du mariage de nos parents », « Arbre Pantagruel, intelligence de ta vieille force. Gros et bienheureux ».

Ayn Rand (par Mélanie Talcott)

Ecrit par Mélanie Talcott , le Vendredi, 20 Août 2021. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

Lire Ayn Rand, c’est pénétrer dans un ghetto intellectuel, un univers sulfureux, compliqué, fascinant, touffu, contradictoire et ambigu. La lecture de La Source Vive, de La Grève et de La vertu d’égoïsme, deux romans-plaidoyers, le premier écrit en 1943 et le second en 1957, et le dernier, une compilation d’articles publiés entre 1961 et 1964, n’est pas aisée, tant se mêle à l’intrigue une harangue apolégétique, parfois confuse, voire indigeste et souvent réitérative, des convictions de l’auteure. L’exercice ressemble à détricoter un pull sans jamais tirer un fil unique, d’autant plus qu’étant riches en digressions, il faut les lire et les relire pour s’imprégner du message d’Ayn Rand.

Pour saisir sa pensée, il faut d’abord la jalonner de quelques faits. Ayn Rand est née Alissa Zinovievna Rosenbaum, à Saint-Pétersbourg en 1905, au sein d’une famille de la petite bourgeoisie juive. Son père était propriétaire d’une pharmacie, et sa mère, femme au foyer, en charge de l’éducation de ses trois filles. Alissa avait douze ans lorsqu’en pleine première guerre mondiale, la Révolution Russe de 1917 renversa le tsar et le remplaça par le gouvernement provisoire d’Aleksander Kerenski, un régime parlementaire qui accorda l’égalité politique et juridique aux Juifs.

Firmaman, Jean-Paul Gavard-Perret (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 19 Août 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Firmaman, Jean-Paul Gavard-Perret, éditions Sans escale, mai 2021, 30 pages, 13 €

Sexe

J’espère avoir fait une lecture juste de ce petit livre où pèsent, se mesurent, se développent la chair amoureuse et les organes sexuels. Du reste, les textes calquent davantage l’action que le jouir, pour mettre en exergue la corporalité naturelle des étreintes sexuelles. Il y a donc quelque chose de Molinier, pour les cuisses gainées, les dessous chics, ou de Bellmer pour le bizarre parfois des positions et des points de vue. Et puis, on connaît aussi Paul-Armand Gette qui travaille depuis longtemps, légèrement amusé, sur les culottes des femmes, posées sur des sapins de Noël par exemple. Nous sommes donc en terrain connu.

Ce qui est neuf toutefois, c’est le traitement du sujet. On entrevoit Sade, mais pas le sadisme, plutôt le sadien, avec me concernant, la peur ressentie à la vision du Salo de Pasolini. Ainsi, Firmaman n’est pas tout à fait un poème, mais davantage une performance linguistique, des récits courts, un texte récitatif plutôt que contemplatif. Pour tout dire, l’auteur est en action. Il me semble aussi que l’on pourrait utiliser le terme homérique dans les deux sens du terme. Quant à moi, j’ai pensé à l’Iliade, avec ses différentes morts toujours nouvelles dans leur facture. Les scènes érotiques de J.-P. Gavard-Perret sont variées, et on voit presque la réalité des corps à corps amoureux. Donc pas de lyrisme mais de l’épique.