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Les Chroniques

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma (par Vincent Robin)

Ecrit par Vincent Robin , le Jeudi, 06 Janvier 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Seuil, Histoire

Les Communards, Michel Winock, Jean-Pierre Azéma, mars 2021, 224 pages, 8 €

Par tradition, le terme de « Communards » désigne ces citadins qui prirent part à l’insurrection parisienne de 1871. Ce fut ainsi, au lendemain de la sévère défaite napoléonienne de Sedan (le 1er sept. 1870), que cette population urbaine entendit s’opposer vigoureusement, d’abord à l’invasion prussienne, ensuite à l’Assemblée versaillaise conduite par Thiers et préconisant une collaboration avec l’envahisseur. Par recul historique faut-il considérer que ces citadins révoltés furent essentiellement des ouvriers et artisans soutenus par des membres de la petite bourgeoisie parisienne. Forte de la Garde nationale qui se rangea majoritairement à ses côtés, cette importante fraction insurgée, le plus souvent populaire, entendit alors répondre aux menaces qui se profilaient face à elle de deux côtés. Par une réaction armée, par une reconsidération des statuts sociaux courants et par l’affirmation de son autonomie. C’est ainsi, grâce à une charte élaborée par l’assemblée communale élue à la majorité que cette émanation populaire définissait bientôt ses principes d’immunité et de régulation sociale. Au bout de quelques mois cependant, ce mouvement collectif aux aspirations d’indépendance démocratique et de justice sociale allait succomber dans un affreux bain sanglant, généré par l’acharnement et la sévérité militaires de « Français-Versaillais », finalement bien plus compréhensifs et dociles à l’égard de l’occupant germanique.

La Troisième Main, Des techniques matérielles aux technologies intellectuelles, Michel Guérin (par Pierre Windecker)

Ecrit par Pierre Windecker , le Mercredi, 05 Janvier 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, Essais, La Une CED, Actes Sud

La Troisième Main, Des techniques matérielles aux technologies intellectuelles, Michel Guérin, Actes-Sud, octobre 2021, 224 pages, 23 €

Disons-le tout de suite. A mesure qu’on avance dans la lecture de La Troisième Main, un sentiment s’installe et gagne peu à peu la force de l’évidence : voilà un livre qui fraye un chemin qui n’est pas encore relevé sur les cartes de l’anthropologie. Il ouvre dans l’enquête sur l’humain un nouvel espace de compréhension et de recherche, qui permet de se repérer tout autrement dans la traversée de champs qui ont été déjà parcourus longuement et en tous sens, parce qu’ils contiennent les enjeux les plus critiques du développement humain : le devenir historique du travail et de la technique, celui de l’écriture – depuis celle des langues dites « naturelles » jusqu’à celle des codes cybernétiques –, celui de l’économie productive et de l’antagonisme social qui ne manque jamais de l’accompagner.

Mais un chemin nouveau n’est pas un chemin surgi de nulle part : il suppose au contraire de solides camps de base à l’arrière. Il y en a ici de deux sortes, ceux que Michel Guérin a dressés lui-même dans des travaux antérieurs, notamment dans Philosophie du Geste, et ceux qui ont été édifiés et laissés en héritage dans le champ de l’anthropologie par d’autres chercheurs, parmi lesquels une place à part doit être réservée au préhistorien André Leroi-Gourhan.

Le Mot et le Reste : deux livres sur la musique automne 2021 (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Mardi, 04 Janvier 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Le Mot et le Reste

 

Rock’n’roll – Rhythm’n’blues, Rockabilly, Revival, Christophe Brault, Le Mot et le Reste, novembre 2021, 312 pages, 22 €

Musiques, Traverses & Horizons en 400 disques, Philippe Robert, Le Mot et le Reste, octobre 2021, 444 pages, 32 €

 

Chez Le Mot et le Reste, on aime sortir des sentiers battus, et on publie des ouvrages qui parlent d’images, de bandes dessinées ; qui sont de la plume d’Hakim Bey, de Noam Chomsky ou d’un Honoré de Balzac montrant déjà la veulerie journalistique ; qui parlent de la vie mais surtout de la nature (c’est ici que Thoreau et Mary Austin entre autres ont trouvé refuge, dans de belles traductions renouvelées avec sagacité) ; qui parlent aussi et surtout de musique, même de musiques, au pluriel – un peu comme si tout cela allait de pair.

Tientos, Iñigo de Satrústegui (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 03 Janvier 2022. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Tientos, Iñigo de Satrústegui, éditions Fario, novembre 2021, 54 pages, 10 €

 

Ainsi se comprend le silence de l’intelligence dans l’art (Iñigo de Satrústegui)

 

Une personne

Ce qui frappe dans ce petit livre d’Iñigo de Satrústegui, c’est l’aperçu certain de l’homme derrière le texte. On y voit l’homme agir comme une personne, devenir son propre Pygmalion. Car ici la personne de l’artiste est visible, se rend visible par des écrans scripturaux, où derrière un certain flegme aristocratique, on devine de la lucidité et des blessures. Du reste le terme le plus approprié serait celui de dasein, d’un destin d’étant. Tiento, ce style de chant flamenco confine au duende, c’est-à-dire à la partie la plus haute de l’émotion. Cette écriture qui est la sienne ouvre sur de faibles éléments biographiques mais savamment utilisés pour convenir à une sorte de livre essai, essai de style et de chant du style.

Le Yark, Bertrand Santini & Laurent Gapaillard (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 16 Décembre 2021. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Grasset, Jeunesse

Le Yark, Bertrand Santini & Laurent Gapaillard, Grasset Jeunesse, octobre 2021, 80 pages, 17 €

 

Fabuleuse bestiole

La légende du Yark écrite par Bertrand Santini, illustrée par Laurent Gapaillard a déjà dix ans d’existence, et a été traduite en quinze langues. Ce nouvel album magique est doté d’une jaquette et agrémenté d’une planche tirée à part. Les titres typographiés en rouge basque tranchent sur le noir et blanc de l’ensemble. De suite, l’exergue de John Locke à propos de la malignité des enfants, nous met sur la piste du registre de l’épouvante et du merveilleux. Le texte de B. Santini rime joliment tout en présentant le terrifiant Yark tel un monstre « immense comme une lune noire », mais qui souffre parfois, même en commettant le pire ! À mi-chemin entre l’ogre du Petit Poucet, King Kong et la gigantesque créature extraterrestre Cthulhu, Yark en possède quelques caractéristiques, notamment le pouvoir d’évoluer dans la stratosphère et d’être toujours affamé.