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Roman

Trois heures avant l’aube, Gilles Vincent

Ecrit par Catherine Dutigny/Elsa , le Mercredi, 30 Avril 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, Polars, La Une Livres, Jigal

Trois heures avant l’aube, février 2014, 224 pages, 18,50 € . Ecrivain(s): Gilles Vincent Edition: Jigal

 

Trouver un sens à sa vie, c’est ce que croit Kamel, jeune français, en partant au Pakistan suivre l’entraînement au combat des djihadistes, puis en faisant la guerre sainte une fois revenu à Marseille, ce dont rêve Sabrina, dans sa cité du nord de la France, obsédée par les meurtriers pédophiles qui peuvent bénéficier d’une remise de peine et sortir de prison, ce qu’espère Grégor, ouvrier modèle et pourtant licencié, décidé à ne pas assister à la fermeture de son usine bretonne, sans tenter un coup d’éclat. Trois êtres aux destinées tragiques, qui vont développer, chacun à sa manière, une stratégie pour faire justice ou du moins ce qu’ils pensent s’en approcher le plus. D’où des attentats, des meurtres et un enlèvement. Trois enquêtes qui vont lancer à leur poursuite des flics de Marseille à Valenciennes en passant par le Morbihan. Des trajectoires différentes, a priori sans aucun rapport entre elles, mais qui inexorablement se croiseront au point équidistant du triangle de leurs dérives respectives, comme une fatalité morbide.

La préparation de la vie, Colette Fellous

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 28 Avril 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

La préparation de la vie, mars 2014, 208 pages, 21 € . Ecrivain(s): Colette Fellous Edition: Gallimard

 

L’hommage à R.B.

« Dans le fond, c’était lui qui m’avait poussée à écrire et à dire je, peut-être ne l’avait-il jamais su, mais aujourd’hui j’avais envie de le retrouver comme j’avais retrouvé la voix de Jeff » note Colette Fellous, dans les premières pages de son récit. « Lui », c’est Roland Barthes. La narratrice suivit, entre 1972 et 1976, son séminaire au 6 de la rue Tournon. Jeff, c’est son premier amour. Un américain rencontré furtivement à Paris, avec qui elle entretint une correspondance avant de le retrouver à Washington, pour trois jours seulement, et de le laisser seul à son American way of life… Un peu comme dans un roman de Françoise Sagan.

Ces deux figures, celle de l’amour raté et celle du « guide vagabond », viennent à se croiser alors que Colette Fellous cherche dans de vieux cartons une lettre de Barthes. Y trouvant celles de Jeff, elle y trouve aussi l’occasion de le recontacter et d’entendre, près de 40 ans plus tard, le son de sa voix. Et l’envie de faire revivre celle de Barthes, de la ranimer, la saisit alors, car cette voix, nous dit-elle, l’a toujours accompagnée.

Rue des Syriens, Raphaël Confiant

Ecrit par Patryck Froissart , le Samedi, 19 Avril 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Rue des Syriens, Octobre 2013 (pour lm'édition Folio) 384 pages . Ecrivain(s): Raphaël Confiant Edition: Folio (Gallimard)

 

Chaque roman de Raphaël Confiant constitue un menu des plus goûteux.

Truculence et succulence sont deux termes qui s’imposent, une fois de plus, au lecteur amené à savourer celui-ci.

Car c’est bien de langue qu’il s’agit d’abord. De cette langue pimentée que Confiant manie d’une façon inimitable, de cette langue qui est celle de son peuple, de son île, de son pays, de cette langue qu’il partage et dont il revendique fièrement l’héritage, de cette langue qu’il s’approprie, qu’il pétrit, qu’il métisse, qu’il assaisonne de condiments culturels d’origines diverses, qu’il fait sienne, et qui se révèle sous sa plume une langue au goût exquis, une langue qui fait saliver de plaisir, une langue de grande et belle littérature.

Et puis il y a l’histoire.

L’Absence d’oiseaux d’eau, Emmanuelle Pagano

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Vendredi, 18 Avril 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, P.O.L

L’Absence d’oiseaux d’eau, 297 pages, 18 € . Ecrivain(s): Emmanuelle Pagano Edition: P.O.L

 

Recueil de lettres pensées, senties, écloses, vécues, portées, bruissantes de pensées d’amour, de pensées d’espoir, de pensées de réconciliation, de pensées d’étreintes, de pensées de rivières, de pensées de fleuves. De pensées de baisers, enfin : ces frôlements de lèvres ou l’incisif de la douceur, avec la langue.

Lettres envoyées, où se lit à chaque instant un moi aimant totalement énucléé de son égoïté. Un moi qui pour toujours et à jamais – c’est en tout cas ce qu’il semble de prime abord – s’adresse à un être aimé, c’est-à-dire s’adresse à Toi, comme l’écrit Jankélévitch. La majuscule et l’absence d’article sont de rigueur, comme le précise le philosophe : « Il y a un monde entre Toi (sans article) et le toi, – entre toi que j’assiste ou que j’aime, et ce « toi » de la conjugaison qui est deuxième personne grammatique, mais qui est pneumatiquement troisième, qui est corrélat d’un duel grammatical, et non point partenaire d’un duo amatif ; le toi devenu chose indifférente ne se distingue des autres personnes de la conjugaison que par son numéro ordinal ».

L’égaré de Lisbonne, Bruno d’Halluin

Ecrit par Lionel Bedin , le Vendredi, 18 Avril 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres

L’égaré de Lisbonne, Éditions Gaïa, février 2014, 246 pages, 18 € . Ecrivain(s): Bruno d’Halluin

 

Après la relation d’un récit de voyage sur les mers – La Volta Au cap Horn dans le sillage des grands découvreurs, éditions Transboréal, 2004 – Bruno d’Halluin s’était déjà frotté au roman historique, avec Jon l’Islandais (Gaïa 2010). Et déjà avec la même époque en arrière-plan, le XVe siècle. Et déjà avec un sujet identique : des explorateurs qui, à bord de voiliers de plus en plus performants, repoussent les limites du monde connu. C’est dire si la période et l’exploration maritime sont les thèmes chers à l’auteur, qui récidive avec ce roman, particulièrement réussi : L’égaré de Lisbonne.

Le roman débute en 1500. L’histoire est racontée par Joao Faras, médecin et cosmographe. La première partie se déroule en mer et est très agitée, effroyable. Ça tangue, ça roule, ca tempête, ça vomit, ça gueule, ça prie, ça chavire, ça naufrage, beaucoup meurent, et quelques-uns survivent.

L’expédition de treize nefs et caravelles commandée par Pedro Alvares Cabral est entraînée jusqu’à la terre de Vera Cruz (le Brésil), contourne le cap de Bonne-Espérance, navigue le long de la côte orientale de l’Afrique, et subit tant de déboires et de pertes qu’on ne sait plus si l’on est encore humain.