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Roman

Au départ d’Atocha, Ben Lerner

Ecrit par Martine L. Petauton , le Samedi, 03 Mai 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, L'Olivier (Seuil)

Au départ d’Atocha, traduit de l’anglais (USA) par Jakuta Alikavazovic, février 2014, 206 pages, 21 € . Ecrivain(s): Ben Lerner Edition: L'Olivier (Seuil)

 

« Le héros de Ben Lerner restera une voix incontestablement singulière… ». C’en est une autre, inoubliable – celle de Paul Auster – qui le dit. On a envie de lui faire confiance en mettant le pied dans ce livre « singulier ». On ne le regrette pas !

L’histoire tient dans le sac de voyage vite bouclé que le héros traîne partout avec lui. Un américain – époque Bush 2 – est en résidence à l’ombre d’une confortable bourse (et de la carte bleue – pour urgences – de papa, maman) à Madrid. Il est enregistré « poète » et doit au bout de son année maîtriser l’Espagnol. Il loge quelque part au-dessus de la Plaza Santa Ana, boit à toute heure, grappille des tortillas, et surtout fume des joints. Un remake littéraire de L’auberge espagnole, avec Romain Duris dans le rôle-titre ? Pertinent, souventes fois ; en moins léger, pourtant ! Car, important, aussi, le gars est  bipolaire sujet aux crises d’angoisse, et ne fait rien sans « ses pilules blanches… après des heures à réécrire des poèmes, je fondais soudain en larmes, le visage enfoui dans une serviette pour ne pas déranger les voisins, ou, en sortant pour acheter des cigarettes, du vin ou du shit, je ressentais un léger clivage et le monde s’incurvait aux angles ». Voilà l’histoire.

Le mendiant de Velázquez, François Rachline

Ecrit par Philippe Chauché , le Samedi, 03 Mai 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Albin Michel

Le mendiant de Velázquez, mars 2014, 272 pages, 19,50 € . Ecrivain(s): François Rachline Edition: Albin Michel

 

« Elevez-vous, Velázquez, je vous soutiendrai toujours ».

Vitalité du 17° siècle espagnol, vitalité de Velázquez et de ses Ménines, de La Famille. Le tableau prend vie à l’Alcázar, la demeure royale, il illumine aujourd’hui Le Prado, Palais des peintres, et n’aura cessé d’interroger Picasso, 58 toiles peintes en 1957 s’en inspirent directement. Tout espagnol sait que « la vie est un songe », Velázquez n’en a jamais douté et François Rachline en bon romancier ne saurait s’en défaire.  Songez donc à cette improbable rencontre entre le carrosse du peintre et un mendiant, Mendigo. Songez que le peintre va l’inviter à s’installer à ses côtés à L’Alcázar, un palais où les plus grands peintres dialoguent avec le sévillan, à devenir son modèle, son confident, son allié. Songez à ce qui se joue là, dans l’entourage de Philippe IV, les hommes de cour qui voient d’un œil noir ce peintre qui intrigue pour porter la croix de Santiago, et ce manant qui désormais le suit comme une ombre.

Les ingénieurs du bout du monde, Jan Guillou

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Vendredi, 02 Mai 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Pays nordiques, Actes Sud

Les ingénieurs du bout du monde, 2013 trad. du suédois par Philippe Bouquet. 622 p. 26,80 € . Ecrivain(s): Jan Guillou Edition: Actes Sud

Vaste fresque à l’ancienne, récit picaresque de grandes aventures, peinture d’un XXème siècle de technologie galopante et de rêves si souvent brisés, Les Ingénieurs du bout du monde est tout cela à la fois. Une sorte de roman à la Jules Verne mais là où Verne regardait devant, Guillou regarde dans le rétroviseur. Il revisite après coup la « religion » scientifique et technologique du XXème siècle.

Trois frères, nés dans une famille rurale très pauvre du nord de la Suède, se révèlent de remarquables élèves – en particulier en sciences – et ces talents, alliés à une immense habileté manuelle, les amène à réaliser, pour jouer, une réplique parfaite d’un drakkar viking très ancien. Leur exploit retentit jusqu’en Allemagne – alors à la pointe du progrès technologique – et les trois fils de pêcheur vont se voir offrir une bourse pour aller faire leurs études d’ingénieurs à Dresde.

Trois destins aventureux et brillants semblent s’ouvrir. Et curieusement ce sera deux destins. L’un des trois frères se révèle homosexuel et va vivre à Londres son amour pour un homme. Disparition définitive du personnage, dont nous n’aurons plus aucune nouvelle de tout le livre, effacé en quelque sorte par son « crime » d’homosexualité ! Quel est le choix de l’auteur ? Mystère ! On peut – vaguement - espérer (s’agissant d’un premier volume à une vaste fresque), que le frère homosexuel et maudit réapparaitra un jour !

La Couleur du crépuscule, Ces vies-là, Alfons Cervera

Ecrit par Marc Ossorguine , le Vendredi, 02 Mai 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Espagne, Récits

La Couleur du crépuscule (El color del crepúsculo, 1995), traduit de l’espagnol par George Tyras, Editions La Fosse aux Ours ; Ces vies-là (Esas vidas), traduit de l’espagnol par George Tyras, Editions La Contre Allée . Ecrivain(s): Alfons Cervera

La Couleur du crépuscule


« Des pages qui renferment, parmi toutes les complexités du monde, une seule certitude : il y a un langage pour raconter les histoires et un autre pour le silence ».

Sunta a toujours vécu à Los Yesares, village perdu où, disait le clown Willy qui y a vécu quelques années, ne vivent que les souvenirs, l’ennui et les fantômes des morts. Mais Sunta a gardé en elle les paroles du grand-père qui considérait que l’on devait vivre et mourir au plus près du lieu de sa naissance. Si les autres partent, elle, elle a choisi de rester. A la veille d’un mariage tardif et hésitant, elle a senti la nécessité de ne pas laisser filer la mémoire de toute ces années, de tous ces récits, des personnages et des images qui l’habitent. L’ombre du caudillo et de serviteurs zélés, parfois grotesques et dérisoires, parfois inquiétants, habite aussi ce pays que le temps et l’histoire semblent avoir oublié. La mort de Franco, à Los Yesares, c’est surtout un portrait décroché.

La piste des sortilèges, Gary Victor

Ecrit par Cathy Garcia , le Jeudi, 01 Mai 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Vents d'ailleurs

La piste des sortilèges, janvier 2014, 590 pages, 14,50 € . Ecrivain(s): Gary Victor Edition: Vents d'ailleurs

 

Voici un roman intensément fabuleux, qui plairait sans aucun doute à un Tim Burton ou à un Lewis Carroll. Cette quête initiatrice dans laquelle nous entraîne Piripit, sorte d’Alice en version jeune mâle musclé au pays vodou, est un grand chaudron dans lequel macèrent toutes sortes de faits, de créatures et de choses toutes plus étranges et plus inouïes les unes que les autres, l’ensemble dégageant un parfum de goyave, d’embruns et de kleren*, mêlé de sueur et de charogne. C’est la piste des sortilèges.

Parmi certains des personnages, on pourrait citer l’incontournable Bawon Samedi et son insatiable fille Gede Loray, Legba, l’ouvreur de portes, ainsi que Petit-Noël Prieur, un chef de bande d’esclaves révoltés, qui refusait l’autorité des généraux durant les guerres de l’Indépendance, mais aussi le maudit Grenn Bôt, « une seule botte », et le Basilic, un redoutable reptile géant.