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Roman

Que ton règne vienne, Xavier de Moulins

Ecrit par Gilles Brancati , le Mardi, 04 Mars 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Jean-Claude Lattès

Que ton règne vienne, février 2014, 220 pages, 18 € . Ecrivain(s): Xavier de Moulins Edition: Jean-Claude Lattès

 

 

Saint-Exupéry disait qu’un livre est achevé quand il n’y a plus rien à retirer. Xavier de Moulins a parfaitement réussi cet exercice et nous propose un roman sobre sans être dépouillé. Ses phrases courtes donnent le rythme qui convient à l’histoire qu’il nous raconte et dans laquelle il nous entraîne. Il y a de très belles pages comme la 155. C’est l’histoire de gens ordinaires, sans pathos, sans fioritures inutiles, sans surcharge. Ce qui leur arrive pourrait nous arriver et pourtant on n’a pas envie de lâcher, on s’y attache. L’alternance des chapitres datés font passer du présent, date de la reconstruction de Paul, à son passé et aux évènements qui l’ont conduit à sa dégringolade. Jusqu’à la page 150 on attend, on espère un basculement, une tragédie, enfin un de ces rebondissements qui relance. Il viendra. On le pressent, puis on se dit que non, puis finalement, que si, c’était bien ça. La construction est donc réussie.

Deux garçons, Philippe Mezescaze

Ecrit par Arnaud Genon , le Vendredi, 21 Février 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Mercure de France

Deux garçons, février 2014, 128 pages, 13,80 € . Ecrivain(s): Philippe Mezescaze Edition: Mercure de France

 

Philippe, pour fuir la folie de sa mère, arrive à La Rochelle et s’installe chez sa grand-mère. Il a 17 ans. Il doit obtenir son bac, mais ce qu’il désire plus fort que tout, c’est devenir acteur. Il s’inscrit alors à la maison de la culture et intègre la troupe de la Croco. Pour ses cours, il choisit de jouer la scène 14 de l’acte II de Caligula. Il interprètera le rôle du personnage éponyme. Scipion, ce sera un jeune comédien qui vient de rejoindre le groupe. Il s’appelle Hervé. Il va avoir 14 ans.

Un jour, ils présentent leur travail, mais ce qu’ils montrent « excède les leçons de théâtre » : « quand nous avons terminé, les spectateurs restent silencieux, interdits, jusqu’à ce que Marie-Claire esquisse un geste agacé et libérateur qui rompt la tension ». Comme le notera, dans Mes parents (1986), Hervé Guibert devenu écrivain, « Un amour véritable s’est conspiré et s’est amplifié dans la scène dont nous ne pouvons plus redire les mots ».

L’été des lucioles, Gilles Paris

Ecrit par Martine L. Petauton , le Vendredi, 21 Février 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Héloïse D'Ormesson

L’été des lucioles, janvier 2014, 220 p. 17 € . Ecrivain(s): Gilles Paris Edition: Héloïse D'Ormesson

 

Voilà encore un livre où c’est l’enfant qui dit « je ». Ah ! Une petite « Guerre des boutons » bis ? un livre carrément gnian-gnian, sucré – faussement dégoulinant de choses sacrées de l’enfance ? Cela semble si facile d’écrire-enfant ; un jeu de môme… et au bout, souvent, n’intéresser personne, ni gamin, ni adulte…

Sauf quand on est Gilles Paris. Lui, il connaît parfaitement (ses livres, les prix qui vont avec, sont là pour le dire) ce code, cette musique-là ; pas une seule fausse note dans sa partition ! Au point qu’on a parfois des doutes : serait-il, ce Gilles Paris, un magicien, qui a les tours qu’il faut dans sa besace étrange ? Ou, mieux, serait-il lui-même encore un enfant ? malgré les apparences – sérieuses, de l’éditeur, de l’auteur. A-t-il gardé des secrets de savoirs, d’écriture, de langage, pour – quasi parfaitement – nous embarquer chez les 10/14, aussi sûrement qu’Alice (il doit bien, du reste, la connaître un peu) traverse le miroir.

La robe des léopards, Kristopher Jansma

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 20 Février 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Editions Jacqueline Chambon

La robe des léopards (The unchangeable spots of leopards) Trad. (USA) Laure Manceau. Octobre 2013. 363 p. 23 € . Ecrivain(s): Kristopher Jansma Edition: Editions Jacqueline Chambon

 

Jansma signe là un roman captivant, drôle et d’une grande originalité. Sur le ton de la dérision – mais chaleureuse et réjouissante ce qui, par les temps qui courent, devient rare. On est averti dès avant le début du roman :

«  Si vous pensez être l’auteur de ce livre, vous êtes prié de contacter Haslett & Grouse Publishers (New York, New York) dans les meilleurs délais. »

C’est que la question n’est pas exclue a priori : il se peut que l’un d’entre nous soit l’auteur de ce livre. Après tout. Les deux héros du livre – deux jeunes et brillants universitaires, sportifs et écrivains – jouent sans cesse avec la paternité littéraire, jusqu’à en faire un thème obsessionnel. Et Kristopher Jansma lui-même met cette question au centre de son roman. L’un écrit un livre universellement célébré. L’autre – par dilettantisme ou angoisse ? – perd tout ce qu’il écrit dans une sorte de fascination du vide. Alors il fera « carrière » de son amitié avec celui qui a réussi en littérature.

La musique des pierres, Nicolas Idier

Ecrit par Philippe Chauché , le Jeudi, 20 Février 2014. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

La musique des pierres, janvier 2014, 336 pages, 21 € . Ecrivain(s): Nicolas Idier Edition: Gallimard

 

« Je marche tous les jours, par tous les temps, même les nuits pluvieuses. Les villes d’Asie ne dorment jamais à poings fermés. Moi non plus, depuis le jour-sans-nom ».

Les beaux livres ne dorment jamais, comme les vagues qui viennent de si loin que l’on se demande souvent si elles ne sont pas éternelles, nées du caprice d’un dieu. L’écrivain regarde les vagues de loin, s’avance, ses pieds se posent sur mille petites pierres roulées, le corps s’élance dans le mouvement permanent de l’eau, les bras, les jambes, la tête, ce n’est pas un nageur, c’est un ange. Les beaux livres offrent au lecteur attentif aux récifs, des nuits blanches et calmes, des nuits dessinées au pinceau avec grande attention, comme les pierres de Liu Dan qui s’élancent dans le mouvement du Temps chinois, le Temps éternel qui est à bien l’embrasser, la plus belle des révolutions. Les beaux livres ne dorment jamais les pages fermées, elles s’ouvrent comme des fleurs du désert, pierres de sables qui glissent entre les doigts, et ne retombent jamais en poussière.