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Roman

Les quatre éborgnés, Alice Massat

Ecrit par Gilles Brancati , le Mardi, 08 Janvier 2013. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, La rentrée littéraire, Joelle Losfeld

Les quatre éborgnés, sortie : 10 janvier 2013, 160 p. 16,90 € . Ecrivain(s): Alice Massat Edition: Joelle Losfeld

 

Bienvenue chez vous, « frères humains ». Jusqu’à quel degré ressemblons-nous aux personnages du livre. Sommes-nous Lune, Jefferson, Gaspard, Ugolin ou bien plus sûrement un peu tous à la fois au gré des circonstances de nos vies. Par choix ou par nécessité ? Car c’est le propos de ce livre : jusqu’où sommes-nous capables d’aller pour satisfaire nos besoins ? Jusqu’à demander un sac rempli de billets de banque en échange d’une déclaration publique ? S’agit-il d’un « œil pour œil », d’individus en situation d’échanges permanents. Feutrée ou plus violente, la sollicitation des autres et l’ajustement de nos comportements est permanent.

Lune débute un stage dans un journal qui hésite pour sa une entre deux sujets et les traite parallèlement jusqu’au dernier moment. S’ensuivent des rencontres dans un univers beaucoup plus réduit qu’on ne le croit. La « une » la plus probable concerne un écrivain dont Lune est devenue la secrétaire par le hasard d’une rencontre et dont il est le protecteur. Elle n’a pas d’objectif précis, elle est en errance affective et professionnelle et sans les ressources qui lui offriraient une autonomie. Ses choix, comme ceux des autres, sont alors guidés par la nécessité. Elle n’y échappe pas, elle est une héroïne ordinaire.

Le pont des assassins, Arturo Perez-Reverte

Ecrit par Patryck Froissart , le Lundi, 17 Décembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Espagne, Seuil

Le Pont des Assassins (El Puente de los asesinos), traduit de l’espagnol par François Maspero, octobre 2012, 349 p. 19,50 € . Ecrivain(s): Arturo Pérez-Reverte Edition: Seuil

 

Voilà qui ravira les amateurs des romans de cape et d’épée, et en particulier, ceux dont l’enfance a retenti des cliquetis d’épée et des éclats de mousquetons des Pardaillan, de Lagardère, ou de nos mondialement célèbres Trois Mousquetaires.

Tout comme celles de Pardaillan ou de d’Artagnan, les aventures du Capitaine Diego Alatriste y Tenerio, le mercenaire espagnol que nous retrouvons en ce volume, se déclinent en plusieurs tomes. Celui-ci en est le septième.

Partageant la vision, tantôt critique, tantôt dubitative, souvent admirative, toujours respectueuse que porte le narrateur, le jeune spadassin basque Iňigo Balboa, sur les faits, les dires et les gestes du Capitaine Alatriste, dont il est à la fois le serviteur, le disciple, l’assistant, le sbire et le compagnon dévoué, nous suivons jour après jour le récit d’un complot visant à renverser, pour le compte de l’Espagne, le doge de Venise, Giovanni Cornari, trop lié avec la France au goût de Philippe IV.

L’objectif une fois annoncé, le décor se met en place, le complot s’ourdit, la stratégie se dessine, les protagonistes se rencontrent, font connaissance, s’organisent.

Knulp, Hermann Hesse

Ecrit par Lionel Bedin , le Lundi, 17 Décembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Langue allemande, Le Livre de Poche

Knulp, Hermann Hesse, traduit de l’allemand par Hervé du Cheyron de Beaumont, Calmann-Lévy, 1972, Le Livre de poche . Ecrivain(s): Hermann Hesse Edition: Le Livre de Poche

 

« La route s’enfonçait, toute droite, dans le bleu tendre du ciel, où le monde semblait prendre fin ». Knulp est un vagabond. Il n’a « aucune disposition pour le travail ». Il mène une existence de chômeur qui le voue à l’illégalité et au mépris. Toléré par les gendarmes qui respectent « sa supériorité intellectuelle, et à l’occasion, le sérieux », Knulp erre de par le monde. « On le laissait aller » ainsi qu’un chat qui partage la maison et la vie de ses maîtres. Chaque soir avant de s’endormir il tire « quelques feuillets de sa bibliothèque de route » qui se compose de « poésies et de maximes qu’il avait recopiées et d’une liasse de coupures de journaux ». Le sud de l’Allemagne est le territoire d’attache de ce nomade (si l’on peut dire…) Il y revient toujours. « Amour de la terre natale » ? ou « inquiétude singulière » de mourir éloigné de cette terre ?

Le roman commence alors que Knulp sort de l’hôpital et revient dans le village de son enfance. Il est malade et fatigué. Comme épuisé par des années d’errance. Mais on se presse pour l’accueillir.

Les greniers de Babel, Jean-Marie Blas de Roblès

Ecrit par Anne Morin , le Lundi, 17 Décembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Récits, Invenit

Les greniers de Babel, Invenit, collection Ekphrasis, 70 p.12 € . Ecrivain(s): Jean-Marie Blas de Roblès Edition: Invenit

Qui préside aux destinées qui se croisent dans cette Tour, dans cette représentation de la Tour par Bruegel dans laquelle Jean-Marie Blas de Roblès pénètre, apparemment sans effraction ? Quelle instance suprême préside à sa construction ? Est-elle même bien en construction ou en destruction, ruine de ce qu’elle a été, dont les ouvriers tels des Sisyphes sont condamnés à monter les pierres, puis à mourir sur elles, épuisés par la lourdeur de leur tâche ? Au dernier étage, encore inconçu, on meurt d’épuisement. Ce cimetière débouche sur des greniers à ciel ouvert, sorte de paradis après les ténèbres, la famine et l’incommunicabilité régnant aux étages inférieurs. Plus on monte, moins vastes sont les étages, plus la vie et la nourriture se raréfient. De loin en loin, une secousse plus ou moins violente abat une partie de la construction qui s’effondre debout, de l’intérieur. A quoi sert-il de noter sur les parois de la Tour, dans une obscurité trouée seule par la lueur des torches, des inscriptions pour la plupart dans des langues indéchiffrables ? Si ce n’est pour se prouver à soi-même qu’on est bien passé par là ? Qu’on a laissé une trace, sa trace, même si elle ne fait ni signe, ni sens. Cette Tour, symbole moins du temps qui passe, d’une impossible communauté, que d’une perpétuelle tentative d’évasion, que symbole de la réversibilité du temps : « Mon chamelier m’assure que la Tour existe de toute éternité, que ses ancêtres et les ancêtres de ses ancêtres la connaissent, et qu’elle fut non point bâtie, mais exhumée au cours des siècles précédents » (p. 19).

Grand Maître, Jim Harrison

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 13 Décembre 2012. , dans Roman, Les Livres, Critiques, La Une Livres, USA, Flammarion

Grand Maître. Trad. USA Brice Matthieussent. septembre 2012. 350 p. 21 € . Ecrivain(s): Jim Harrison Edition: Flammarion

 

Jim Harrison a pris la peine d’un sous-titre en 5ème page, en forme d’avertissement : « faux roman policier ». Précaution superflue, en quelques pages on a compris. On tient entre les mains un évident faux polar, mais un encore plus évident vrai Jim Harrison ! Et comme tous les vrais Jim Harrison, c’est un grand livre.

On va faire comme Big Jimmy : expédier la pseudo intrigue policière, la pseudo enquête. Le vieux Sunderson, flic du Michigan qui part juste à la retraite, se met sur les traces de Dwight, Le Grand Maître d’une secte sulfureuse et nauséabonde, prônant le sexe (y compris la pédophilie), les plaisirs terrestres et captant le fric de ses adeptes, nombreux en ces régions des USA. Il met ses derniers élans de flic dans sa volonté de faire tomber cet ignoble personnage.

Bon. Voilà. Il faut dire tout de suite que ce « prétexte » narratif n’occupe que peu de place dans ce livre et nul ne s’en plaindra car le propos, la matière, la grandeur de ce roman sont ailleurs, dans la présence énorme et fascinante de … Jim Harrison.