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Recensions

Des deux hémisphères, Françoise Cohen (par Mona)

Ecrit par Mona , le Mercredi, 11 Octobre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, L'Harmattan

Des deux hémisphères, Françoise Cohen, L’Harmattan, mars 2023, 128 pages, 14,50 € Edition: L'Harmattan

 

Françoise Cohen avait publié un petit recueil de nouvelles d’une écriture fine et sensible, L’Empreinte volée, et déjà les personnages baignaient dans un univers onirique tout empreint d’un sentiment « d’inquiétante étrangeté » où, selon le concept forgé par Freud, le familier surgit comme étranger et nous ôte toute quiétude. L’auteure publie à nouveau dix nouvelles autour de personnages expatriés, souvent d’Amérique latine, qui semblent flotter entre deux continents, entre veille et sommeil, entre une vie ordinaire et un monde extraordinaire, entre contraintes du réel et fantaisies de l’imagination. A l’instar d’un des personnages, Malena, qui préfère retirer ses lunettes de myope pour voir flou, Françoise Cohen dessine un paysage de brume. Les identités se brouillent, la narration oscille entre première, deuxième et troisième personne et une vague perturbation menace le cours des vies : la docteure, Nausicaa, s’apprête à greffer un grand brûlé et voit son père inconnu refaire surface. Un samedi, Francesca croule sous le poids de ses courses et se laisse troubler par une étrange rêverie. Une autre Francesca, en visite chez un cardiologue à Buenos Aires, reçoit un étonnant diagnostic tandis que, dans la même capitale, une famille se fait braquer.

Beauté(s), Camille Saint-Jacques, Éric Suchère (par Charles Duttine)

Ecrit par Charles Duttine , le Lundi, 09 Octobre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Arts, L'Atelier Contemporain

Beauté(s), Camille Saint-Jacques, Éric Suchère, éditions L’Atelier Contemporain, août 2023, 136 pages, 20 € Edition: L'Atelier Contemporain

 

Les déclinaisons de la beauté

Aborder la question de la beauté, c’est faire naître immanquablement toutes sortes de questions. Peut-on vivre sans elle ? Que nous apporte-t-elle ? De quelle nature est-elle ? Peut-on vraiment cerner l’essence de la beauté, dire ce qu’elle est ? Comment survient-elle ? Quel type de satisfaction nous procure-t-elle ? Quelle est sa place ? Qu’advient-il de la beauté dans un monde où l’art semble avoir été accaparé par l’univers de l’argent ? Ce sont toutes ces questions qui se voient soulevées dans cet ouvrage intitulé Beauté(s), édité par L’Atelier Contemporain. Le livre comporte dix contributions et deux entretiens, l’un avec l’anthropologue Philippe Descola et l’autre avec le philosophe Yves Michaud. Toutes ces interventions sont diverses, toutes intéressantes et enrichissantes. Impossible de rendre compte en détail de toute cette richesse et cette diversité.

Adieu Tanger, Salma El Moumni (par Stéphane Bret)

Ecrit par Stéphane Bret , le Vendredi, 06 Octobre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Grasset

Adieu Tanger, Salma El Moumni, Grasset, août 2023, 175 pages, 18 € Edition: Grasset

 

Le thème du premier roman de Salma El Moumni est ambitieux : le pouvoir et l’influence du regard des autres sur soi, sur les choix de sa propre vie.

Alia est marocaine, vit à Tanger. Elle fréquente Quentin, un jeune garçon scolarisé comme elle dans le même lycée. Ce qui préoccupe gravement Alia, ce qui l’obsède dès le départ de ce récit, c’est la sensation qu’elle éprouve de se voir scrutée, épiée, déshabillée du regard, méprisée de ses compatriotes. Serait-ce de la paranoïa ? Alia a le sentiment qu’elle dérange, que ses tentatives d’émancipation et d’ajout d’un peu de liberté dans sa vie sont vouées à l’échec.

Alia relève ce défi en postant des photos sur la toile, ce qui est passible de l’article 483 du Code pénal marocain, qui punit l’outrage public à la pudeur d’un mois à deux ans d’emprisonnement. C’est la résolution de ce dilemme qui va occuper Alia dès sa reprise de contact avec Quentin, qui ne l’aide pas vraiment : « Il t’a toisée du regard avec ses yeux bleus liquides en mordant dans sa fajita (…) Tu as immédiatement regretté d’être venue chez lui, tu n’avais soudain plus faim, tu voulais partir ».

Dernier émoi, Christine Hervé (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Mercredi, 04 Octobre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Dernier émoi, Christine Hervé, Editions Traversées, juin 2023, 114 pages, 20 €

 

Réjouissons-nous ! La poésie, la vraie, la belle, la puissante, qui émeut, n’est pas morte. Les Editions Traversées, comme, c’est fort heureux, quelques autres maisons indépendantes, nous la font vivre, nous la font lire, nous la font aimer. Les Editions Traversées sont wallonnes…

Les ouvrages publiés sont de beaux livres, d’élégante facture, visuellement attirants, tactilement agréables. C’est important. L’esthétique physique du volume incite à découvrir l’esthétique artistique de l’œuvre dont il est l’écrin. Les Editions Traversées ont le soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, qu’il faut remercier pour leur implication dans cette riche démarche culturelle.

A noter : Les Editions Traversées publient, à raison de trois numéros par an, une revue littéraire fort appréciée.

L’opus de Christine Hervé, le vingt-troisième, déjà, de la collection, est constitué de quatre corpus de longueur inégale :

Souvenirs sur Rainer Maria Rilke, Marie de la Tour et Taxis (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 02 Octobre 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Récits, Arfuyen

Souvenirs sur Rainer Maria Rilke, Marie de la Tour et Taxis, Arfuyen, janvier 2023, 188 pages, 17 € Edition: Arfuyen

 

Pour la postérité, la princesse Marie de la Tour et Taxis (1855-1934) survit et survivra dans la mesure où son nom figure au début des Élégies de Duino, qui portent le nom du château en bord de mer appartenant à cette très ancienne famille, où D’Annunzio fut également reçu, ainsi que d’autres membres des aristocraties européennes – tel l’archiduc François-Ferdinand, qui rencontrera quelques semaines plus tard son funeste destin à Sarajevo.

Née à Venise, décédée en République tchèque, Marie parlait couramment plusieurs langues et ce fut directement en français qu’elle rédigea ce volume de Souvenirs (qui, étrangement, parurent en traduction allemande trois ans avant que le texte original ne fût imprimé). Connaissant par cœur L’Enfer de Dante, citant Leconte de Lisle dans le texte, la princesse ne magnifiait pas forcément « son » poète : « Physiquement, il est laid au premier abord, très petit et chétif, quoique bien pris dans sa taille, une longue tête pointue, un grand nez, une bouche grande aussi, aux fortes lèvres très sinueuses qu’accentuent le menton un peu fuyant et sa fossette profonde » (p.27-28).