Identification

Poésie

Par la main dans les Enfers, Joyeux animaux de la misère II, Pierre Guyotat

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Samedi, 29 Octobre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Par la main dans les Enfers, Joyeux animaux de la misère II, Hors série Littérature, octobre 2016, 432 pages, 24 € . Ecrivain(s): Pierre Guyotat Edition: Gallimard

 

Le cycle Joyeux animaux de la misère est présenté par son auteur comme « des jactances ». Et Guyotat de préciser : « La jactance est la manifestation de celle ou celui qui veut prendre la place de l’autre ». Ce procédé permet à l’auteur une forme de détente puisqu’il n’est plus lui-même mais un autre. Néanmoins la tension revient vite étant donné la radicalité du propos. Et il faut à l’auteur, par instants, retrouver « sa » propre langue. D’où l’effet labyrinthique d’une telle fiction.

Tout est écrit dans le besoin d’écrire des sortes de répliques rapides créatrices d’une rythmique où les mots même courants se trouvent « ré-annexés » selon un propos sans doute insupportable pour un lectorat classique. Guyotat ose en effet l’excès non seulement de la langue mais de ce qu’elle crée. Et l’auteur de se « justifier » (si besoin était) : « Une grande œuvre, c’est effectivement une œuvre où il y a plutôt plus de choses que moins de choses. Il faut qu’il y ait de la musique dans la musique ».

Allant vers et autres escales, Colette Daviles-Estinès

Ecrit par Cathy Garcia , le Jeudi, 27 Octobre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Allant vers et autres escales, éd. de l’Aigrette, septembre 2016, illustration en couverture de Diane Saint-Honoré, 45 pages, 16 € . Ecrivain(s): Colette Daviles-Estinès

 

Voici des poèmes qui ne tiennent pas en place, comme l’indique la diversité des lieux mentionnés au-dessous avec les dates d’écriture, et il semblerait que la raison d’être de cette sorte d’instabilité soit à chercher dans un lointain ailleurs dont l’auteure aurait pu être arrachée, quelque part sur le vaste continent de l’Afrique, où seraient restés dispersés des morceaux d’elle-même. La bougeotte, parce que difficile de trouver sa place quand on vit une forme d’exil, de déracinement.

Un poème vient confirmer ce ressenti, bref et clair :

Mon pays

Je sais d’où je viens

Je viens d’Expatrie

De silence et de chair, Valérie Fontalirant

Ecrit par France Burghelle Rey , le Mardi, 25 Octobre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Les Vanneaux

De silence et de chair, juin 2016, 41 pages, 15 € . Ecrivain(s): Valérie Fontalirant Edition: Les Vanneaux

 

Le titre du recueil de Valérie Fontalirant aux éditions des Vanneaux fait appel aux sens avant même l’incipit où « les vents d’éther », par un jeu du lexique, surprennent d’emblée le lecteur. En même temps que le destinataire du texte, celui-ci voit et entend dans un monde en guerre passé au crible et où la matière se meurt : « plafond craquelé », « surface écaillée ».

La marche, métaphore de l’écriture, et ses « collets » est-elle une solution comme la symbiose à la terre jusqu’à « devenir limon » ? En effet, avec la présence quotidienne de la mendiante, elle conduit au Tiers-monde au milieu de « la rumeur de la faim ».

Pour montrer la résistance à cette misère, les verbes d’action s’énumèrent à l’infinitif dans des strophes en vers libres et aux mètres variés.

A la suite de cette réflexion surgissent la figure de « l’Autre » et, sournoise, la présence des mots du passé dont il faut « laisser (l’ombre) émerger ».

De corps, encore, Christophe Dekerpel

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Lundi, 17 Octobre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

De corps, encore, éd. Corps Puce, avril 2016, Préface de Jean-Louis Rambour, Décors de corps en agonie, 56 pages, 8 € . Ecrivain(s): Christophe Dekerpel

 

L’écriture de Christophe Dekerpel « opère tel un chirurgien », s’immisce dans les interstices où subterfuge, métamorphoses, « frelon virevoltant » dans la boîte crânienne, hallucinations, (d-)ébats dans le liquide nourricier amniotique, petites tortures et dévoration expriment la faim de corps, encore. Corps/Il-île d’élucidation et de pulsions ; corps/Elle-ailes engluées dans son cockpit charnel, affamées de cosmos & d’infini en aléas rêvés en métamorphoses (« avant (l’)ultime étape, avant cet anéantissement, il fallait (…) revenir au monde, renaître au monde dans le corps, dans la douleur, dans la douleur du corps »). Elle cogne, cette douleur, dans le ventre (au creux du ventre du cosmos-corps voué à la lumière ultime/extrême du monde galactique où la dissolution, l’extinction du corps singulier se répandra dans la matière du grand cosmos pour « devenir lumière (…), pour redevenir “hydrogène” et “hélium”, éléments numéro 1 et 2 dans le classement du tableau périodique des éléments de Mendeleiv et éléments constituant des étoiles, du soleil » (Christophe Dekerpel, in correspondance avec M.C-Demarcy, été 2016). Expansion post-mortem du corps que l’on retrouve dans le dernier texte du recueil :

Un peu de parole dans un âge de fer (pour un chant odeur de nouveau-né), Jean-Marc Fournier

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Lundi, 10 Octobre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, Livres décortiqués, La Une Livres, Les Vanneaux

Un peu de parole dans un âge de fer, mai 2016, 138 p. 18 € . Ecrivain(s): Jean-Marc Fournier Edition: Les Vanneaux

Dans le seau reste un peu d’eau,

Offrande aux bêtes et aux dieux,

Ne la buvez pas.

Quelque chose dans la vie

Ne doit pas nous servir.

Sinon la mélodie des mondes

Nous resterait inaudible.

Ce qu’écrit Jean Starobinski de l’acte poétique de Pierre Jean Jouve pourrait convenir parfaitement à celui de Jean-Marc Fournier : « [u]n tel acte poétique, qui met le mystère en lumière sans lui retirer sa qualité de mystère, peut apparaître comme un acte de connaissance, si nous acceptons l’idée d’une connaissance engagée sur d’autres voies que celles du savoir objectif.