William Hazlitt (1778-1830) plane sur les lettres anglaises, faucon prêt à fondre sur sa proie : on craint le moment où, assis en bout de table, convié à un souper, cet homme peu amène d’apparence ouvre la bouche pour lancer un trait définitif, parfois sarcastique, dont nul ne va se relever, et que nul ne pourra contredire. En ce début de XIXe siècle, à Londres, Hazlitt observe et écrit, d’un trait jubilatoire, ce qu’il ressent à cette observation – et tant pis pour qui n’a pas l’heur de plaire à son humeur du moment ! Cette liberté de ton, à quasi deux siècles de distance et malgré que certains propos échappent car ultra-référencés (mais les appareils critiques ne sont pas faits pour les chiens), est un pur délice, surtout dans une époque contemporaine confite au politiquement correct quand ce n’est pas à la déférence promotionnelle. Bref, lire Hazlitt, c’est retourner à une époque bénie, même si plus fantasmée qu’autre chose (Hazlitt n’était pas la règle, et c’est d’ailleurs pour ça qu’on se souvient de lui), où écrire pouvait fâcher sans nécessairement mener au lynchage médiatique façon Renaud Camus ou Richard Millet. Passons.