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Ecriture

L'immobilité

Ecrit par Didier Ayres , le Jeudi, 21 Juillet 2011. , dans Ecriture, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED, Récits

Ou la deuxième promenade


Déambuler, voir, revenir, revoir. Et cette fois-ci, le bâtiment comme une arche échouée, un vaisseau de science-fiction, la nef d’un manga, un bateau ivre arrêté ici. Oui, le squelette d’un tyrannosaure, l’armature d’un animal géant. D’autant plus que les charpentiers sont couleur citron, et comme de petits Play mobil. Puis cette impression me quitte, au profit d’un pur discours, d’une parole tenue par l’organisation des maillages d’acier, et, là, comme une virgule, la première charpente latérale du toit. Cependant, en m’approchant, ce que je prenais pour une virgule, devient un V, et très vite, un idéogramme, car sous l’étiage, se trouve une sorte de Y, fait du même bois clair, peut-être du mélèze, je ne sais pas. Je suis ainsi en Orient, dans la figuration d’un alphabet inconnu. Je regarde longtemps la minutie de l’arrimage de la structure. C’est la patience voulue de cette activité, qui me surprend. J’aurais refusé de m’attarder pour autre chose, mais, ici, je vois, je regarde, j’observe longuement, pris moi aussi par la lenteur de l’opération. La patience est à l’œuvre. Le petit homme couleur oranger, celui qui guide l’opération, gâche apparemment un temps précieux. Mais, ce n’est que l’apparence d’une perte ; le gain est supérieur.

A l'aube de l'humanité

Ecrit par Zoe Tisset , le Mardi, 19 Juillet 2011. , dans Ecriture, Ecrits suivis, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED

En hommage au film "Incendie"


L’origine ne sera pas bouleversée par la mort.

Sans affect, elle veut la vie et elle poursuit celle qui fauche et foudroie.

Son temps n’est pas le nôtre, le fils devient le père et la victime le bourreau.

Celui qui agit pâtit.


La rédemption sourcille de l’opposition, elle n’a que faire des soubresauts de « la bonne conscience ». Ici tout est entremêlé, on ne parvient plus à distinguer la quintessence de l’humanité. Magma de sang et d’amour ruisselant sur la femme qui accouche et sur l’homme qui crie lorsqu’on lui applique le fer forgé de la punition.

The killing of a chinese cookie *

Ecrit par Philippe Leven , le Dimanche, 17 Juillet 2011. , dans Ecriture, Nouvelles, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED


Au fond, les longues enfilades de quais gris et roides, les lignes droites sans fin des hangars, cassées par les jets verticaux des grues, font du port du Havre la suite imperturbable de la ville... Ou l’inverse, on ne sait plus ; dans un univers d’angles droits tout angle en vaut un autre : 90°. Droites et béton armé. La seule chose qui soit armée ici c’est le béton. Le reste est mou, veule, dans les ventres et dans les têtes. A part « Little Bob Story », pensait François. Il aimait bien LBS, très texan, gras, un peu sale. Le ZZ Top havrais, l’honneur du Havre.

François n’avait pas envie d’être là. Surtout pas au bord de ce bassin glauque et écoeurant, derrière la centrale thermique du port. La fébrilité de tous ces chinois et vietnamiens avait quelque chose d’inhumain, entre névrose et mécanique grotesque. Le pire naissait du contraste entre le sentiment morbide que provoquait la gestuelle et la raison de leur présence ici : ils PECHAIENT ! En pleine nuit, frénétiques, tendus, gris plomb, parfaitement silencieux, ils sortaient de l’eau sale et chaude des turbines de l’usine des poissons brillants et frétillants, seul élément vivant dans ce monde de spectres. A un rythme incroyable. Sans plaisir, sans humour, un par minute, le temps de renvoyer leur fil dans l’eau, silhouettes blafardes dans la lueur des réverbères. Mais ce soir-là, une tension de plus flottait dans l’air.

Le récit d'un arpentage

Ecrit par Didier Ayres , le Dimanche, 17 Juillet 2011. , dans Ecriture, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED, Récits

Ou les travaux du promeneur


Je sais marcher. Je sais déambuler. Oui, choisir une rue plutôt qu'une autre. Je sais cheminer, aussi, dans les sentiers. Et, ces marches sont des travaux pour moi. J'y réfléchis, et si je suis accompagné, je disserte. J'aime donc aller pour faire discours. Par exemple, en poursuivant lentement sur l'avenue qui longe les voies ferrées. Ne pas savoir. Divaguer. Juste à l'écoute de l'amble de la marche. Donc, me hasarder, suivre là, l'allée qui débouche sur Pompidou-Metz, et le mur vert-de-gris qui masque les lignes de la compagnie des transports ferrés. Puis, tourner, revenir, regarder. Voir les trois rectangles qui sont comme des tiges en équilibre d'un grand mikado de béton. Géants, mais qui paraissent fragiles comme des oiseaux. En une sorte de lévitation hasardeuse. Alors, je ne suis plus ici, mais aux côtés de Kagemusha, avec lui, la doublure du guerrier, près de sa tente de combattant, de samouraï, dans ce mélange de la force des armes et de la faiblesse de la toile de l'abri. Mais, pour finir, beaucoup de gris, de blanc, et les lignes de chemins de fer où, là encore, je regarde non pas la liaison ferroviaire, mais les petites gares d'Ozu et ses mariages difficiles. Donc, le cinéma. Donc ce qui nécessite l'identification. La catharsis. La confusion de soi et du paysage. Faire le discours de cette relation. Faire de mes propres yeux le parcours de la promenade, comme pour un plan rapproché.

Carnets d'un fou - XI

Ecrit par Michel Host , le Jeudi, 14 Juillet 2011. , dans Ecriture, Ecrits suivis, Chroniques Ecritures Dossiers, La Une CED

Michel Host

Le 4 juillet 2011


Rétrospectivité / Prospectivité / Objectivité / Subjectivité / Invectivité / Perspectivité / Salubrité

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Les intuitions des poètes sont les aventures oubliées de Dieu.

Elias Canetti, Le Territoire de l’homme


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