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Poésie

Partage de la nuit, Patrick Devaux (par François Baillon)

Ecrit par François Baillon , le Lundi, 09 Mars 2020. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Le Coudrier

Partage de la nuit, Patrick Devaux, Ill. Catherine Berael, 70 pages, 16 € Edition: Le Coudrier

 

Nous voici dans un moment où notre conscience se laisse glisser vers un autre niveau du monde, à moins qu’à l’inverse elle n’ait enfin le moyen de s’éveiller pleinement à ce monde. Nous voici dans ces instants déterminants où l’aube est sur le point d’apparaître, où le crépuscule est si bien installé qu’il nous place dans le mystère et l’expectative, qu’il nous invite à une observation plus minutieuse de l’espace, qu’il nous met face à quelques questionnements centraux.

C’est l’impression qu’apporte ce très délicat Partage de la nuit de Patrick Devaux qui, dans une langue poétique aussi épurée que suspendue (la disposition graphique elle-même semble faire état d’une suspension, suspension du temps, suspension du geste), nous emmène au sein d’une oscillation entre ombre et lumière, nous conduit à cette frontière incertaine où tentent de se rencontrer le jour et la nuit, où le jour et la nuit s’essayent à un partage des éléments.

Arcanes majeurs, Silvaine Arabo par Parme Ceriset

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 26 Février 2020. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Arcanes majeurs, Silvaine Arabo Editions Alcyone novembre 2018, 83 pages, 21 €

 

L’univers de Silvaine Arabo offre au lecteur une excursion poétique dont la beauté côtoie les rivages de l’absolu. Il s’agit d’une aventure mystérieuse, énigmatique, presque initiatique. L’auteure dessine de mot en mot, de souffle en souffle, les contours d’une mythologie qui lui est propre : «

On a des mots, des souffles autant dire : ce qui porte la vie

et qui germera. »

Par petites touches, comme une impressionniste du Verbe, la poète peint une fresque dont la magnificence appelle naturellement cette parole de René Char : « Dans nos ténèbres, il n’y a pas une place pour la beauté, toute la place est pour la beauté ».

On perçoit à travers les images et les métaphores tissées à l’or fin un rapport mystique à la Nature, aux éléments et au grand Tout : « On est ce mica brûlant sur le sol de déserts », « On est tout, on n’est rien ».

Le trésor des humbles de Maurice Maeterlinck : une poésie de l’occulte. (par Sophie Galabru)

Ecrit par Sophie Galabru , le Lundi, 27 Janvier 2020. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Grasset

Le trésor des humbles, Maurice Maeterlinck Edition: Grasset

 

Prix Nobel de littérature 1911, Maeterlinck est notamment l’auteur du Trésor des humbles où il se fait poète de l’occulte. Paru en 1896, l’année de la mort de Verlaine, la prose poétique de Maeterlinck est encore d’un langage symboliste, tout en s’en dégageant déjà. Témoin des énigmes, Maeterlinck lie l’infini et le fini, la mort et le sens, les évènements et leur vérité, notre ignorance et le secret de nos lignes de vie. Poète d’un monde invisible, cet écrivain belge écrit avec une conviction spirituelle : « Nous vivons à côté de notre véritable vie et nous sentons que nos pensées les plus intimes et les plus profondes ne nous regardent pas, que nous sommes autre chose que nos pensées et nos rêves » (p. 47). Nous ne pouvons donc pas comprendre Maeterlinck si nous n'acceptons pas l'idée selon laquelle « c’est par distraction que nous vivons nous mêmes » (ibid). Certain que de nous détenons plus de vérités que nous l’imaginons, l'auteur s’essaye à décrypter la vie souterraine et aérienne de nos âmes ; celle que l'on vit en toute absence à soi.

Préface à ce livre, Stéphane Sangral (par Claire-Neige Jaunet)

Ecrit par Claire-Neige Jaunet , le Lundi, 27 Janvier 2020. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Galilée

Préface à ce livre, Stéphane Sangral , 2019 . Ecrivain(s): Stéphane Sangral Edition: Editions Galilée

 

Préface : texte placé en tête d'un livre (dict.), autrement dit : texte qui précède le texte principal. Ici, confusion des deux ; le texte principal n'est autre que le propos d'une préface : faire apparaître ce qui précède l'écriture d'un texte, ce qui conduit à la décision d'écrire.

Et ici ce qui précède le texte c'est, en premier lieu, l'oeuvre antérieure, les textes déjà écrits. Préface à ce livre est structuré par une phrase qui déjà structurait Des dalles posées sur rien : "Sous la forme l'absence s'enfle et vient le soir / et l'azur épuisé jusqu'au bout du miroir". Le rythme binaire détermine deux parties où chaque mot détermine lui-même un chapitre. L'image même de la dalle est encore sollicitée, car elle habite le fond de la pensée : "aucune dalle d'immanentalité où poser le pied et avancer", "...les quelques dalles qui portent mon écriture jusqu'à son point final." Le silence, si important, si omniprésent, la noyade, le néant, l'impression de tourner en rond... en sont les harmoniques. Le philosophe et le poète y trouvent le langage approprié, en dépit de ses limites : "ce texte est un radeau de fortune".

Le feu d'Orphée, Patryck Froissart (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 17 Janvier 2020. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Ipagination

Le feu d’Orphée . Ecrivain(s): Patryck Froissart Edition: Ipagination

 

Le genre de ce livre dense de l’écrivain Patryck Froissart (romancier, nouvelliste, poète et chroniqueur littéraire) n’est pas commun, puisqu’il nous transporte avec Le feu d’Orphée dans l’univers du conte poétique. Le thème est décliné sous diverses formes (textes poétiques, récits prosaïques, contes fantastiques) jalonnant le combat d’Orphée contre le dieu solaire ravisseur de son Eurydice. La quête orphique résonne en chacune de nos existences, qu’elles soient vouées à l’adoration, à la passion amoureuse, ou à la recherche permanente d’un idéal marquant de son sceau nos mythologies personnelles et que l’on retrouve avec force et échos symboliques dans le voyage hallucinant de ce « personnage que dynamisent, paradoxalement, le rapt et l’intermittence de l’aimée… ». Reflet emblématique du désir essentiel vrillé à l’existence des hommes, ardentes/vaillantes sentinelles brûlant de se sentir vivre, Orphée capte et captive notre attention, notre regard, notre quête existentielle engagée dans cette attirance/répulsion vis-à-vis du dieu solaire, figure paradoxale du feu dont l’immanence et la transcendance nous élèvent et nous font trébucher autour de son foyer ardent dans l’espoir fou d’en approcher toujours davantage la flamme.