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Poésie

Jésus kill Juliette Eloïse, Jacques Cauda (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 17 Février 2022. , dans Poésie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Editions Douro

Jésus kill Juliette Eloïse, Editions Douro, juillet 2021, 80 pages, 15 € . Ecrivain(s): Jacques Cauda

 

Jacques Cauda est un créateur étonnant et détonnant, un poly-artiste foisonnant, intarissable, ubique et unique, écrivain, peintre, illustrateur, directeur de collection chez Douro, omniprésent sur les réseaux sociaux, jouant la provocation à tire-larigot, ce qui n’est assurément pas pour déplaire en cette époque où la bienséance et son corollaire la biendisance sont de plus en plus d’âcre rigueur avec pour conséquences immédiates les levées récurrentes d’étendards d’une morale archaïque, les accusations de blasphème et l’instauration insidieuse de l’autocensure.

Dans le présent ouvrage au titre énigmatique, le personnage narrateur raconte avec la verve truculente qui caractérise l’auteur son histoire avec Juliette, professeure d’anglais et d’autres moyens d’expression. Le prénom Juliette, rencontré récemment en relation intertextuelle explicite avec l’héroïne des Prospérités du Vice dans la recension pour La Cause Littéraire de Moby Dark, autre œuvre décalée de Cauda, semble être iconique chez notre auteur qui multiplie d’ailleurs malicieusement les références littéraires et philosophiques au Divin Marquis.

Perdre les traces, Jacques Ancet (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 14 Février 2022. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Perdre les traces, Jacques Ancet, éditions La Rumeur libre, novembre 2021, 163 pages, 17 €

 

Poèmes de l’extinction

Il est émouvant de parcourir le dernier recueil de Jacques Ancet tant la vérité nue de la vie et de la mort se côtoient. On y trouve une forme de mélancolie presque amère, où le poète se place dans un mouvement du temps, celui sans frein de l’heure ultime, inclination qui entraîne le langage et se fait entraîner vers la nudité et presque le néant. Ce je-ne-sais-quoi et ce-presque-rien, ce détail sobre de notre condition sonne très juste, et cantonne au domaine des larmes.

C’est le sentiment de la mort qui guide les pas du lecteur vers cette musique, ces fugues, cet ostinato de la forme. Perdre, tel est le mot essentiel. Laisser des traces sans savoir si elles resteront traces, traces voulant dire l’inquiétude du devenir du poème. Cette quête justifie pleinement l’écriture de ce livre.

La Maison loin de la mer, France Burghelle Rey (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mercredi, 09 Février 2022. , dans Poésie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Editions Douro

La Maison loin de la mer, éditions Douro, juin 2021, 72 pages, 15 € . Ecrivain(s): France Burghelle Rey

 

Dans une collection qui vise à honorer l’atelier de « fabrique » de l’écrivain et à offrir au lecteur le noyau même de l’écriture, France Burghelle Rey tisse tout à la fois le récit de l’écriture présente et les méandres d’une mémoire qui ceint le tilleul, l’odeur du village natal et les personnages précieux du passé, parfois difficiles à cerner tel cet homme, telle cette Rose, grand-mère pourvoyeuse.

Le talent de l’auteure est de montrer l’anamnèse difficile des moments clés d’une vie enfouie, de les éclairer avec les œuvres en train d’être lues ou rappelées.

Ainsi défilent les poèmes de soi ou d’autres, les extraits d’Ancet, de Singer ou de l’amie Geneviève Hutin, hélas disparue.

France Burghelle Rey tâtonne, revient à la cause, s’acharne pour dépecer ce mystère de la « maison » d’écriture (comme le nomme Dorion).

Pourquoi écrire ? Pourquoi passer tant de temps à orner sa vie des mots qu’il faut requérir, avec joie, avec peine ?

Capter l’indicible, Silvaine Arabo (par André Sagne)

Ecrit par Luc-André Sagne , le Lundi, 07 Février 2022. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Capter l’indicible, Silvaine Arabo, éd. Rafael de Surtis, Coll. Pour une Terre interdite, 2021, 80 pages, 15 €

 

 

C’est évidemment un paradoxe que de vouloir, comme le fait Silvaine Arabo, consacrer son dernier recueil à « capter l’indicible », c’est-à-dire à saisir, circonscrire, retenir par les mots ce qui par définition ne saurait l’être. Dès le titre s’installe donc une tension qui va traverser les soixante-six poèmes du recueil qui sont comme autant de tentatives pour la résoudre, ou mieux pour en tirer tout le potentiel poétique, tout le suc. Il s’agit de faire advenir, par une intensité d’observation et d’écoute, la véritable nature du monde qui nous entoure et que les vers vont s’efforcer de révéler. Avec peut-être, au bout du compte, l’éventualité de « n’aimer désormais /…Que l’aile et son reflet / Et l’eau de la rivière », de « descendre doucement vers le fleuve /…Pour s’y dissoudre », comme le suggèrent le premier et le dernier poème du recueil, horizon de cette quête qui est aussi un cheminement personnel.

Nos silences animaux, Serge Ritman (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 07 Février 2022. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Nos silences animaux, Serge Ritman, éditions Collodion, novembre 2021, dessins Laurence Maurel, 72 pages, 12 €

Acuité

Ce qui frappe tout de suite à la lecture de Nos silences animaux, c’est la certitude du trait. Il ne fait pas preuve d’hésitation. Le texte est donc décidé dès les premières lignes et il manifeste clairement son lien avec la langue, lieu sûr et presque stable, assuré, qui nous permet clairement d’entrer de plain-pied dans l’univers du poète. Je dis donc poésie nette, car encline à la force paisible du contour littéraire. Du reste, ces poèmes s’accompagnent des fusains et lavis de Laurence Maurel. J’y vois la revendication d’une volonté définie de s’intéresser au mouvement de la plume, sorte de certitude pour la peintre (et ici pour le poète) d’une confiance dans le geste sans repentir, directement présent à la figure (ici au poème). Cette opération du pinceau ou du stylographe se teinte d’une vérité du discours pictural ou poétique.

avec dessiner ou écrire

à vite qu’il signe à même mon tissu

de serge