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Encore et jamais, variations, Camille Laurens

Ecrit par Arnaud Genon , le Lundi, 25 Février 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Essais, Gallimard

Encore et jamais, variations, 2013, 192 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Camille Laurens Edition: Gallimard

 

C’est fini ? Recommence alors…

Il pourrait y avoir comme un paradoxe à écrire des « variations » sur la répétition. La variation, c’est le changement, la diversité, l’écart. On lui attribue des vertus : le changement est bénéfique, dit-on. La répétition, elle, est monotone, on l’associe à l’ennui. Or, dans Encore et jamais, Camille Laurens nous explique que la répétition se décline, elle est plurielle, toujours la même mais jamais identique. Encore, donc, mais jamais, aussi. Un recommencement renouvelé à chacun de ses débuts. Chaque répétition, quoi qu’on en dise, reste unique… Le paradoxe n’est alors qu’apparent.

38 variations se « proposent d’explorer les pouvoirs de la répétition dans nos vies ». « Répétons-nous pour notre malheur ou notre plaisir ? Répéter est-ce vivre à grandes guides ou bien mourir à petit feu ? » nous demande Camille Laurens, dans son « avant-dire ». Pour y répondre, elle chemine. Nous emporte d’abord à travers un souvenir, peut-être le premier lié à la répétition, où s’origine ce livre. C’est celui de sa grand-mère refaisant chaque jour les gestes immuables du ménage qui amène l’auteur, encore enfant, à s’interroger :

Les anagrammes de Varsovie, Richard Zimler

Ecrit par Gilles Brancati , le Lundi, 25 Février 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Buchet-Chastel

Les anagrammes de Varsovie, traduit (USA) par Sophie Bastide-Foltz, janvier 2013, 340 pages, 22 € . Ecrivain(s): Richard Zimler Edition: Buchet-Chastel

 

Il y a des romans qui marquent leurs lecteurs. Celui-ci en est un, qui ne sortira pas de ma mémoire de si tôt. J’ai été captivé et ému par ce livre que je ne peux que recommander. Les anagrammes de Varsovie… l’histoire se déroule au début de l’hiver 1940 dans le ghetto pendant la Seconde Guerre mondiale. Nous avons tous une mémoire précise de ces évènements et nous avons sans doute tous vu Le pianiste, le très bon film de Roman Polanski. Il n’est donc pas nécessaire de revenir sur l’aspect historique.

Je vais donc en parler pour le propos de ce livre et non pour l’Histoire du ghetto. Les deux y sont intimement liés et ce qui fait la force du récit, c’est qu’il ne tombe jamais dans un travers pathos. L’Histoire sous-tend le roman, elle en est indissociable, elle reste une douloureuse toile de fond, mais elle n’encombre pas, ne prend jamais le pas sur l’intrigue. Quel talent il faut pour nous décrire la douleur et la misère d’un quotidien unique, pour nous asséner des coups dans la poitrine, sans jamais nuire à la fiction. Ce qui fait la force de ce récit particulièrement bien conduit ? L’équilibre entre histoire et Histoire.

Pensées étranglées, Emil Michel Cioran

Ecrit par Cathy Garcia , le Samedi, 23 Février 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Essais, Folio (Gallimard)

Pensées étranglées, coll. Folio « sagesses », janvier 2013, 88 pages, 2 € . Ecrivain(s): Emil Michel Cioran Edition: Folio (Gallimard)

 

Ces textes sont extraits du Mauvais démiurge (Gallimard, collection NRF Essais, 1969). Plongeons-y sans rien savoir de Cioran ou tout du moins en oubliant ce que l’on sait, afin d’entrer directement dans l’essence de ce qui est écrit.

Toutes les voies peuvent mener à la sagesse, y compris celles du désespoir et du pessimisme les plus noirs, bien qu’on ne puisse imaginer qu’elles aient été délibérément choisies. Cioran, en tout cas, y est naturellement enclin, et on lui doit, outre une intelligente réflexion poussée parfois jusqu’à son extrême, des éclairs de génie qu’il traduit en phrases lapidaires, d’une force percutante et d’un humour ironique sans doute salvateur.

« Dieu est le deuil de l’ironie. Il suffit pourtant qu’elle se ressaisisse, qu’elle reprenne le dessus, pour que nos relations avec lui se brouillent et s’interrompent ».

La frontière entre les deux étant mince, son ironie flirte souvent avec le cynisme, mais Cioran est doté d’un sens aigu de la critique dont il ne s’exclut pas et d’un besoin sans doute intense de sincérité avec lui-même.

L'énergie spirituelle, Henri Bergson

Ecrit par Sophie Galabru , le Samedi, 23 Février 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Essais

L'énergie spirituelle, Editions PUF, 540 p. 18,30 € . Ecrivain(s): Henri Bergson

 

Premier recueil d'essais et de conférences paru en 1919 bien avant ce qui sera sa quatrième et dernière œuvre majeure, les Deux sources de la morale et de la religion (1932)LEnergie spirituelle est l’occasion pour Bergson d’intégrer plusieurs démarches : philosophique, psychologique, métaphysique, scientifique, biologique. Le recueil qui tend nettement à condenser les recherches des ouvrages précédents, notamment Matière mémoire et L'Evolution créatrice, nous place d'emblée dans le refus de la thèse du parallélisme psycho-physique. Cette thèse considère en effet qu'à tout état mental ou psychique correspond un état cérébral. Bergson s'oppose à toute recherche neuro-biologique qui ne peut que décrire des mouvements moléculaires et cérébraux sans pouvoir expliquer des opérations de la conscience, comme la pensée, le rêve, ou l'interprétation. Ainsi, ces sept conférences sont dominées par le grand problème métaphysique de l'union de l'âme et du corps, et par sa récupération scientifique. Les conférences La conscience et la vie, L'âme et le corps, Le cerveau et la pensée : une illusion philosophique explicitent la critique bergsonienne de cette théorie, notamment grâce aux analyses du rêve, de la fausse reconnaissance, du déjà vu, et de l'effort intellectuel.

La nuit tombée, Antoine Choplin

Ecrit par Anne Morin , le Vendredi, 22 Février 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman

La nuit tombée, La Fosse aux Ours 2012, 122 pages, 16 € . Ecrivain(s): Antoine Choplin

 

Une petite musique, celle de l’après, après la catastrophe, quand le désespoir est assimilé, qu’on l’a inclus dans le quotidien des jours, comme allant de soi.

Il y a ceux qui ne veulent pas partir en dépit du danger, qu’on arrache – littéralement – à leur maison dont ils emportent la clé à la fois comme gage de retour et comme le génie de la lampe, capable rien qu’en la regardant de faire surgir pour eux tout le passé, tout l’avant

Il y a ceux qui reviennent – ou qui viennent – piller.

Il y a ceux, hors zone contaminée, le border line, le no man’s land.

Il y a ceux qui reviennent comme Gouri, chercher trace de leur passé : une porte, la porte de la chambre de sa fille Xsenia – elle aussi malade, elle aussi touchée –, sur laquelle sont gravés les marques de sa taille, des dessins, des poèmes composés avec son père :