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Stupeur, Zeruya Shalev (2e partie) (par Mona)

Ecrit par Mona , le Jeudi, 21 Mars 2024. , dans Israël, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard

Stupeur, Zeruya Shalev, Gallimard, juin 2023, trad. hébreu, Laurence Sendrowicz, 364 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Zeruya Shalev Edition: Gallimard

 

II.

Une allégorie de la culpabilité

La malédiction qui hante le roman s’illustre par des allusions récurrentes au rite du bouc expiatoire, l’animal chargé des iniquités du peuple d’Israël poussé dans le vide du haut du mont Azazel le jour du Grand Pardon. Ce leitmotiv met l’accent sur le malheur des personnages, tous condamnés à battre leur coulpe : Rachel se revoit dans sa jeunesse avec Mano « tels les deux boucs propitiatoires », et compare sa chute dans un précipice à celle de l’animal sacrifié. Ses frères d’armes lui semblent avoir « servi de bouc émissaire, à l’instar du bouc chargé des péchés d’Israël qu’on envoyait du temple dans le désert le jour du Kippour ». Atara s’attribue la faute de l’enrôlement de son fils dans une brigade d’élite : « de tes propres mains, tu l’avais poussé du haut du précipice qui s’ouvrait au pied de l’antique ». La faute originelle, c’est celle de Mano qui s’est considéré l’assassin d’une jeune fille morte par hasard (« quel démon avait bien pu le saisir pour qu’il endosse une telle responsabilité ? »).

Stupeur, Zeruya Shalev (par Mona) 1ère partie

Ecrit par Mona , le Mercredi, 13 Mars 2024. , dans Israël, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Gallimard, En Vitrine, Cette semaine

Stupeur, Zeruya Shalev, Gallimard, juin 2023, trad. hébreu, Laurence Sendrowicz, 364 pages, 23,50 € . Ecrivain(s): Zeruya Shalev Edition: Gallimard

 

Stupeur, le titre du dernier roman de l’écrivaine israélienne Zeruya Shalev, publié quelques mois avant les attaques du 7 octobre, résonne involontairement avec l’actualité tragique. Son sixième livre traduit en français, l’un de ses plus denses, fruit d’un travail de six années, met en scène deux femmes de deux générations différentes, à l’idéologie et au caractère opposés, victimes de non-dits familiaux. Dans un précédent roman, Douleur, inspiré d’un attentat-suicide dont elle avait été victime à Jérusalem, l’auteure traitait déjà d’un passé douloureux venant hanter les protagonistes.

Atara, jeune femme moderne et sans tabous, se trouve frappée de stupeur quand sur son lit de mort, son père, Menahem dit Mano, l’appelle d’un prénom inconnu, Rachel, et lui fait une déclaration d’amour inspirée du Cantique des Cantiques.

La Stupeur, Aharon Appelfeld (par Anne Morin)

Ecrit par Anne Morin , le Mercredi, 06 Juillet 2022. , dans Israël, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, L'Olivier (Seuil), En Vitrine, Cette semaine

La Stupeur, avril 2022, trad. hébreu, Valérie Zenatti, 252 pages, 22 € . Ecrivain(s): Aharon Appelfeld Edition: L'Olivier (Seuil)

 

Tout quitter, comme on se dépouille d’un vêtement devenu trop petit et qui enserre. Mais que signifie tout quitter quand ce tout ne recouvre que souffrance, incompréhension, impossibilité à s’exprimer, à se dire ?

Iréna a vécu toute son enfance près d’Adéla, une compagne d’école et une des filles des épiciers juifs de son village. Mais l’heure est à l’épuration, les magasins sont pillés, les Juifs déportés ou exterminés sur place comme la famille Katz. Leur assassinat fait basculer Iréna dans une autre vie, un autre monde : « Iréna tourna la tête : sa vie ici était finie. Une autre vie l’attendait ailleurs. De quelle nature ? Elle n’essaya pas de le deviner. Ce départ ne la réjouissait pas. Elle marchait à petits pas, comme effrayée. Plus elle approchait de la gare, plus il lui semblait que la terre sous ses pieds allait s’ouvrir et qu’un autre sol allait surgir » (p.87).

Sans réfléchir, sans bagages elle quitte maison et mari et prend le train pour se rendre chez sa tante, Yanka, qui vit retirée du monde et « se suffisant à elle-même » : « Que fais-je ici ? se demanda-t-elle dans un vertige » (p.94).

Sur les rives de Tibériade, Rachel (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 26 Novembre 2021. , dans Israël, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Arfuyen

Sur les rives de Tibériade, Rachel, Arfuyen, octobre 2021, trad. hébreu, Bernard Grasset, 192 pages, 17 € Edition: Arfuyen

 

« Une île habitée par d’étranges créatures

En habits d’apparat…

Une île oubliée du cœur de Dieu

À tout jamais. (…)

Et si tu tentes de leur parler

D’une autre vie,

Elles se moqueront avec mépris, en leur cœur se diront :

“Invention de bien-portants !” » (L’hôpital, p.107)

Gazelle, je t’enverrai, Amir Gilboa (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 04 Juin 2021. , dans Israël, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Editions Lanskine

Gazelle, je t’enverrai, Amir Gilboa, LansKine éditions, mars 2021, trad. hébreu, Emmanuel Moses, 72 pages, 14 € Edition: Editions Lanskine

 

Venu d’Ukraine en Palestine en 1937, Gilboa a fait paraître en 1972 ce recueil, à la fois intime, engagé, onirique. Les poèmes y sont les expressions fortes et tendues de ce qui a tissé sa vie, fortes aussi des « chemins » qu’il a dû prendre pour la rendre égale, supportable.

En effet, nombre de chemins traversent en tous sens ce livre apaisé, où un cœur aimant, où un cœur se souvenant, trame l’épaisseur de sa vie. Il est toujours en quête, cet homme, il voit son cœur comme une « gazelle » blessée ; il chemine pour se retrouver ou se trouver. Sans doute le rêve est-il à même de l’approcher de sa vérité, encore qu’il faille trouver la frontière, ne plus entendre « aboyer sa vie », ne pas devoir quitter une ville qui est la sienne.

Peut-on entendre ici la quête du migrant qu’il fut à vingt ans ? Peut-être que, rêve mis à part, ce voyage premier lui est resté comme un périple intérieur.