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Essais

Lectures nouvelles du roman algérien, Charles Bonn

Ecrit par Dominique Ranaivoson , le Jeudi, 29 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Classiques Garnier

Lectures nouvelles du roman algérien, 280 pages . Ecrivain(s): Charles Bonn Edition: Classiques Garnier

 

Charles Bonn est pour tous ceux qui s’intéressent aux littératures maghrébines une des principales références. Après avoir enseigné en Algérie, il n’a cessé, durant quarante ans, de stimuler la recherche, d’encadrer des thèses, de publier sur ces littératures que l’on ne disait pas encore « émergentes ». Il a fondé et dirigé la revue Expressions maghrébines, créé et animé le site Limag.

Dans une vision encyclopédique, ce site rassemble les publications universitaires, les compte-rendu, les notices biographiques des auteurs, les multiples références de tout ce qui a trait à la région. Au terme de ce parcours, l’infatigable chercheur offre un volume qui se veut un récapitulatif de son itinéraire intellectuel à propos du roman algérien et, bien sûr, à travers lui, de son itinéraire personnel. La tonalité personnelle (qualifiée de « peut-être un peu narcissique », 10) inscrite au cœur de ses réflexions par ailleurs aussi fouillées que dans des ouvrages collectifs ordinaires fait toute l’originalité de ce livre. Charles Bonn se remet lui-même, avec lucidité et distance, dans les contextes qu’il a traversés et qui l’ont formé : 68 en France, la mémoire de la guerre d’Algérie, les années 70 en Algérie, la structure des champs littéraires dans chaque pays, le poids des idéologies, les attentes des étudiants et des lectorats, les grilles instaurées par les critiques français en vue, la rupture de l’islamisme.

Chronologie et critique biblique à l’époque des Lumières : Les travaux de Pierre Michel

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 27 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Honoré Champion

Chronologie et critique biblique à l’époque des Lumières : Les travaux de Pierre Michel, Miguel Benítez, Honoré-Champion, coll. Libre pensée et littérature clandestine, n°70, octobre 2017, 534 pages, 85 € Edition: Editions Honoré Champion

 

Ceux qui lisent la Bible en la prenant, selon l’expression consacrée, au pied de la lettre, se voient en général traités de fondamentalistes et ce n’est pas un compliment. Mais, comme le remarquait le comparatiste allemand Carsten Peter Thiede, un courant herméneutique dominant (dont le postulat principal se résume ainsi : « On ne peut pas et on ne doit pas faire confiance à la Bible, sauf s’il existe des preuves externes indiscutables ») a fini par imposer l’idée que la Bible, « Ancien » et « Nouveau » Testaments confondus, était tout ce que l’on veut – de la théologie, de la propagande nationaliste, de l’idéologie tribale, de la fiction, voire de la science-fiction – tout, sauf une source historique fiable. Autant l’interprétation du Coran, livre incréé et antérieur même à la création du monde (ce qui reprend une ancienne tradition juive, selon laquelle le Temple et la Torah auraient fait l’objet d’une pré-création) est close, voire verrouillée, autant l’herméneutique de la Bible est ouverte.

Et vous avez eu beau temps ?, Philippe Delerm

Ecrit par Sylvie Ferrando , le Mardi, 27 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Seuil

Et vous avez eu beau temps ?, janvier 2018, 176 pages, 15 € Edition: Seuil

 

A l’instar de La Bruyère et de ses Caractères, Philippe Delerm se livre ici à une critique fine et ironique des « petites phrases », ordinaires et perfides, qui émaillent nos conversations et fonctionnent comme des marqueurs de discours, entre intimité et vie sociale. Plus de soixante phrases sont ainsi analysées, parmi lesquelles le lecteur trouvera nécessairement quelques échos de ses propres habitudes de discours, ou des paroles régulièrement entendues dans l’espace social, qu’elles lui aient été ou non adressées.

Moraliste, linguiste, sociologue, ethnologue, entomologiste du langage, de la cognition et des interactions sociales, tel est Delerm dans ce nouvel opus où il décortique les travers et hypocrisies de la conversation.

L’amour est une géographie intérieure, Elysabeth Loos

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 26 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles

L’amour est une géographie intérieure, éd. Le Coudrier, 2018, 121 pages, 16 € . Ecrivain(s): Elysabeth Loos

 

Qu’importent les situations de temps, de lieu ou d’action dans ce que l’auteur annonce comme étant « des carnets de deuil ».

Ecrits par à-coups, hoquets, comme pour gérer, à petites doses progressives, le choc, à moins que cela ne soit le contraire et que la série de textes courts ne résulte de la brutalité de l’évènement.

En tout cas, l’auteur conjure la cendre. Son amour se fait urne funéraire, dépositaire de souvenirs : « Mes mains ne cherchent pas à toucher, pas à sentir la masse. Le corps ne pèse rien. A peine le poids de la peine. Il n’est pas besoin de le peser ».

Le vide se remplit d’une présence placardée jusque dans les détails. Les lieux deviennent obsessionnels. L’alchimie fonctionne à restituer : « Dans les grimoires du temps, je refais ce qu’il a défait. Je bande sa chair calcinée ».

La personne et le sacré, Simone Weil

Ecrit par Marc Wetzel , le Vendredi, 23 Mars 2018. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Rivages poche

La personne et le sacré, avril 2017, préface de Giorgio Agamben, 96 pages, 6 € . Ecrivain(s): Simone Weil Edition: Rivages poche

 

Simone Weil, dans cet extraordinaire opuscule, nous fait d’abord comprendre que l’effort qu’elle attend de nous ne sera pas essentiellement d’intelligence :

« Un homme intelligent et fier de son intelligence ressemble à un condamné qui serait fier d’avoir une grande cellule » (p.67-8).

C’est ensuite qu’elle y dégomme, sans appel et périlleusement le cœur même de notre exigence occidentale d’humanité, les droits démocratiques de la personne humaine.

« Mettre dans la bouche des malheureux des mots qui appartiennent à la région moyenne des valeurs, tels que démocratie, droit ou personne, c’est leur faire un présent qui n’est susceptible de leur amener aucun bien et qui leur fait inévitablement beaucoup de mal » (p.60).

Elle laisse d’ailleurs aux malheureux peu de marge d’illusions utiles sur eux-mêmes :