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Les Chroniques

Les Hospitaliers, Caroline Girard, Franck Magloire (par Mona)

Ecrit par Mona , le Mardi, 16 Mai 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Les Hospitaliers, Caroline Girard, Franck Magloire, Editions L’Ire des Marges, janvier 2023, 130 pages, 14 €

 

Les Hospitaliers ne renvoie pas à un lointain passé mais à la faillite bien actuelle d’un idéal : l’hôpital public. Jadis fierté nationale, il semble devenu le miroir de nos défaillances. On sait que l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris connaît un énorme déficit et que nombre de soignants, soumis à des cadences épuisantes, quittent l’hôpital, découragés par la déshumanisation des soins et les risques croissant d’erreurs. A partir de soixante-dix heures d’enregistrement audio effectués à la demande d’une soignante auprès de 35 agents travaillant dans les établissements publics de soins, c’est un véritable travail de réécriture que Caroline Girard et Franck Magloire ont entrepris pour nous livrer 108 pages incisives et percutantes d’une écriture dense.

En minuscules, Marie-Clotilde Roose (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 15 Mai 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED, Poésie

En minuscules, Marie-Clotilde Roose, éditions Le Taillis Pré, mars 2023, 82 pages, 14 €

 

Dieu en minuscule

Alors que j’entreprends ces lignes, j’écoute le Nisi Dominus de Vivaldi chanté par James Bowman – lequel vient de disparaître –, émouvante cantate sacrée, qui s’adresse à la beauté et à Dieu, ce que je retrouve en partie dans le dernier ouvrage de Marie-Clotilde Roose. Au surplus, ce sentiment de partage de la chose spirituelle construit bel et bien le poème, lui aussi appel métaphysique. Et je veux parler de deux immanences, celle du divin et celle de la créature, individu en conversation avec le général (si l’on suit cette idée dans Kierkegaard). Livre d’heures ainsi lié à la langue du poème qui devient quelque chose comme une prière, immanence qui se dirige vers le Créateur. Humilité de ces minuscules, effacement de l’égo, simplicité relative de la relation créateur/créature.

Le Diable dans le Beffroi (Nouvelles histoires extraordinaires, 1839), Edgar Poe (par Mona)

Ecrit par Mona , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans Les Chroniques, La Une CED, USA

 

Edgar Poe, précurseur du nonsense

Le Diable dans le beffroi, une nouvelle de huit pages, traduite par Baudelaire, a inspiré des artistes aussi divers que Debussy et Adriano Lualdi qui en ont fait un opéra et James Ensor, un tableau. L’intrigue insensée conte l’histoire d’un petit bourg hollandais où les villageois semblent ne s’occuper que d’horloges et de choux jusqu’à l’arrivée brutale d’un trouble-fête diabolique qui perturbe l’heure de la choucroute. L’intrus dont le portrait emprunte quelques traits à la caricature antisémite du Juif (« Il avait la face d’un noir de tabac, un long nez crochu, des yeux comme des pois, une grande bouche et une magnifique rangée de dents qu’il semblait jaloux de montrer en ricanant d’une oreille à l’autre »), pénètre dans le beffroi du village, affole les pendules en frappant de son violon « cinq fois plus grand que lui » le gardien de l’horloge et sème la zizanie pour son bon plaisir.

A propos de la revue "éléments" et BHL (par Patricia Trojman)

Ecrit par Patricia Trojman , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans Les Chroniques, La Une CED

 

François Bousquet dans la pitoyable revue d’extrême-droite, Eléments, « le magazine des idées à l’envers » ! daté fraîchement de Mars-Avril 2023 (p.43-45) alors qu’il sent le rance des années 30, déverse son venin de vieil entarteur professionnel sur Bernard Henri-Lévy. Pour ne citer qu’un mince passage, et c’est déjà grand honneur que de le citer : le titre de son article en première de couverture, « Comment j’ai entartré un fauteur de guerres », en dit long sur le grand courage combatif du pseudo-journaliste, qui déclare de BHL « c’est le plus fascinant chez lui, l’endurance. Increvable, il a survécu à tous ses échecs. Comme l’hydre de Lerne, vous lui coupez une tête, deux autres repoussent… Omniprésent, omniscient et omnipotent – comme Dieu », si on ne lisait que cet extrait sans lire les 3 pages d’une virulente et rageuse jalousie, on croirait à un panégyrique involontaire !

Dans la solitude inachevée, Marc Dugardin (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 11 Mai 2023. , dans Les Chroniques, Les Livres, La Une CED

Dans la solitude inachevée, Marc Dugardin, éditions Rougerie, avril 2023, 80 pages, 13 €

 

Tout poète est une sorte de Pythie lucide et prudente. Pythie parce qu’il constate une espèce de « dictée des mots » en lui, dont – dit Marc Dugardin – il se sent « tributaire », puisque sa propre expression prend en route ce quelque chose qui parlait déjà en lui. Mais lucide, parce qu’il sait bien que ce discours intérieur n’est peut-être qu’un bavardage inspiré, une révélation pour rire, au mieux un rêve un peu tenace. Et prudent parce que, même si une musique verbale s’amorce et s’avance en lui avec ferveur, il n’est pas bon de se laisser tout dire : si écrire ne servait pas la vie, ou même (par diversion, ou imposture) la trahissait, pourquoi lancer encore au large sa petite bouteille de mots, l’espérant un jour recueillie (comme dit Paul Celan) sur la « plage d’un cœur » lointain ?

Par le titre de son recueil, le poète belge Marc Dugardin (76 ans) répond ceci à son lecteur : parce que deux solitudes valent mieux qu’une, si et quand, du moins, aucune ne prétend achever (enclore, accomplir, faire cesser) l’autre.