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Asie

Dieu est rouge, Liao Yiwu

Ecrit par Cathy Garcia , le Mercredi, 08 Juillet 2015. , dans Asie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Histoire

Dieu est rouge, Books Edition Les Moutons Noirs, février 2015, traduit du chinois par Hervé Denès et Li Ru, 462 pages, 24 € . Ecrivain(s): Liao Yiwu

Un pavé ! Un pavé dans la grande mare de Chine. Liao Yiwu nous livre ici le fruit d’un long travail, difficile aussi, celui de réunir autant de témoignages que possible de cette « histoire vraie de la survie et de l’essor du Christianisme en Chine, de Mao à Xi Ping ». Il a parcouru la Chine pour rencontrer des hommes, des femmes, souvent très âgés, mais d’autres plus jeunes aussi, qui répondent à ses questions dans des entretiens rapportés ici, et entrecoupés de « préludes », qui permettent d’en comprendre les contextes. Beaucoup de noms vont défiler, on s’y perd, des lieux aussi, où morts et vivants se côtoient dans un effort de mémoire, qu’on ne lira probablement pas de la même façon, si l’on est croyant ou pas, mais toujours est-il qu’à travers cette quête assez singulière, Liao Yiwu, en toute humilité, et dans un style qui lui est propre, simple et profond, nous livre un pan très peu connu, car aujourd’hui encore tabou, de l’Histoire contemporaine chinoise, dans toute sa violence, avec ses drames et privations quasi ininterrompus. Avoir des témoignages directs, de personne à personne, des histoires individuelles aux destins souvent incroyables, est un trésor inestimable, car aujourd’hui encore il est extrêmement périlleux de fouiller dans ce récent passé et révéler des vérités. L’Histoire non officielle, non autorisée par le régime. L’auteur – qui a connu lui-même l’incarcération pour ses opinions – a dû souvent prendre de grandes précautions pour recueillir toutes ces confidences.

Le cri de l’oiseau de pluie, Nadeem Aslam

Ecrit par Victoire NGuyen , le Mardi, 07 Juillet 2015. , dans Asie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Seuil

Le cri de l’oiseau de pluie, février 2015, trad. de l’Anglais (Pakistan) par Claude et Jean Demanuelli, 282 pages, 21 € . Ecrivain(s): Nadeem Aslam Edition: Seuil

 

Chronique d’une vie ordinaire

A l’ouverture du roman, il est mercredi et le maulana Hafeez, l’imam d’une des deux mosquées d’une petite bourgade du Pakistan, rentre chez lui après la fin des premières prières. Sa femme l’attend car la journée est spéciale :

« J’ai entendu le chant de papiha, dit-elle. Ça doit être la mousson.

– Il chante depuis l’aube », confirma le mollah en hochant la tête.

Or la présence de cet oiseau au nom étrange est annonciatrice de pluie. La mousson arrive donc. Mais à y réfléchir de près, l’animal est aussi porteur de mauvaises nouvelles : d’abord celle de la mort du puissant juge Anwar et ensuite celle de l’apparition de lettres non distribuées depuis 19 ans après l’accident du chemin de fer.

De haute lutte, Ambai

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 10 Avril 2015. , dans Asie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Nouvelles, Zulma

De haute lutte, février 2015, traduit du tamoul par Dominique Vitalyos et Krishna Nagarathinam, 215 pages, 18 € . Ecrivain(s): Ambai Edition: Zulma

 

Ce recueil incisif rassemble quatre nouvelles, qu’on pourrait presque qualifier de romans par leur longueur, par le nombre des fragments constitutifs de leur déroulement narratif, par l’amplitude spatio-temporelle de l’intrigue et par la richesse contextuelle de l’histoire individuelle de leur personnage principal.

Le manuscrit : Chentamarai baigne depuis l’enfance dans un milieu d’artistes où sa mère, Tirumakal, une universitaire férue de littérature, de poésie, de chansons et musiques classiques indiennes qui tient salon tous les vendredis, ayant quitté son mari, fait figure de femme libre au sein d’une société dominée par les hommes. Chentamarai découvre un jour un manuscrit dans lequel sa mère raconte les difficultés et humiliations qu’elle a connues dans sa vie conjugale, dans sa relation avec son époux.

Mais dites-moi, qu’y a-t-il de révolutionnaire à dire qu’une veuve ne peut espérer retrouver l’accès à une vie digne de ce nom qu’en se remariant ? […] Quand vous affirmez qu’il est nécessaire de lui associer un homme pour lui offrir une nouvelle vie, c’est comme si vous disiez qu’elle doit toujours rester sous le contrôle d’un représentant du genre masculin…

Nous l’appelions Em, Jerry Pinto

Ecrit par Martine L. Petauton , le Vendredi, 10 Avril 2015. , dans Asie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Roman, Actes Sud

Nous l’appelions Em, février 2015, traduit de l’anglais (Inde) par Myriam Bellehigue, 260 pages, 22 € . Ecrivain(s): Jerry Pinto Edition: Actes Sud

 

Et l’enfer s’appela bipolarité…

« Je grandis en entendant dire que ma mère avait un problème de nerfs. Plus tard, on m’expliqua qu’il s’agissait d’une dépression nerveuse… on nous dit qu’elle était schizophrène… finalement, tout le monde s’accorda à dire qu’elle était maniaco-dépressive. Tout au long, elle n’utilisa pour elle-même qu’un seul mot : folle ».

Alors, adulte, il en fit un livre : sa mère, sa sœur, lui et son père, plus quelques autres, parents, amis, psychiatres, face à ce qu’on nomme maladie chronique bipolaire, et qu’on devrait plutôt nommer : monstre ou fauve, qui épuise, et terrorise, revient en boucle, et s’accroche. Un de ses proches mentalement atteint ; un drôle de voyage. Parce qu’il y a sa mère malade, et puis, eux tous, et encore le reste du monde qui regarde et juge. Une douleur fragmentée. Infinie, mâtinée pour autant ça et là de l’émotionnel « normal » et banal de toute vie. Et au bout, ce livre, magnifique, écrit de main de fils, avec la pudeur, l’humanité, le juste, que pas un documentaire ne parvient à rendre (tout en en étant pourtant un, et des meilleurs).

Ce que l’on voit en s’arrêtant, Haemin

Ecrit par Marie-Josée Desvignes , le Jeudi, 19 Février 2015. , dans Asie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Decrescenzo Editeurs

Ce que l’on voit en s’arrêtant, décembre 2014, traduit du coréen par Lee Hyonhee et Julien Paolucci, 217 pages, 12 € . Ecrivain(s): Haemin Edition: Decrescenzo Editeurs

 

Haemin est un moine coréen, bouddhiste, diplômé des plus grandes universités américaines. Habitué à dialoguer pour dispenser enseignement et sagesse, il se prend un jour au jeu des réseaux sociaux, immense réservoir humain comme on sait, et va dialoguer avec plus de 850.000 correspondants.

« Haemin,

n’essaie pas de devenir un grand moine

mais essaie de devenir un moine humaniste », lui avait dit un de ses maitres, le moine Hyegwang.

Sans l’avoir réellement décidé mais pris par sa « passion » (dont il nous expliquera comment elle peut aussi être un piège si on n’apprend pas à la maîtriser), passion de transmettre, il va réaliser au fil de ces tweets remplis de sagesse et d’amour l’un des livres qui sera le plus lu en Corée et vendu à plus de 2,5 millions d’exemplaires.