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Recensions

Le dîner de l’exposition, Michèle Dassas (par Fawaz Hussain)

Ecrit par Fawaz Hussain , le Mardi, 07 Juin 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Ramsay

Le dîner de l’exposition, Michèle Dassas, 281 p., 19 € Edition: Ramsay

 

D’emblée, tout en douceur, et avec une écriture veloutée, Michèle Dassas situe l’action de son roman dans le temps et l’espace. On est en juillet 1858, à l’aube de la révolution industrielle en Europe et la gare du Nord, telle que nous la connaissons, n’existe que depuis dix ans. Les premiers trains en partent bruyamment, enveloppés d’une épaisse fumée noire, fin prêts pour des pointes de vitesse atteignant les 54 km par heure. La romancière multiplie ainsi les détails qui témoignent d’un minutieux travail de documentation sur l’esprit de l’époque servant de toile de fond à un fait divers scandaleux, le dîner de l’exposition, que  relaye largement la presse. Aurélia, la protagoniste du roman, gratifie d’une pièce de « cinq centimes » le porteur qui l’aide à transporter sa lourde malle sur son chariot. Le couple anglais avec lequel elle partage son compartiment se déplace avec une bonne, « des couverts en argent armoriés et différents aliments enroulés dans des linges ». On est au milieu du xixe siècle, et bourgeois et aristocrates ne badinent pas avec l’étiquette.

Pourquoi les poètes n’ont jamais de ticket pour le paradis, Claude Donnay (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 02 Juin 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie

Pourquoi les poètes n’ont jamais de ticket pour le paradis, L’Arbre à paroles, mai 2022, 110 pages, 14 € . Ecrivain(s): Claude Donnay

L’anaphore (poème) ordonne les titres des quarante longs poèmes que Donnay consacre à « la rouille des jours », période noire « de la guerre à exporter » ou autres « ondes noires/ qui suintent des murs ». Friand de poésie et de prose américaines, le poète anime « la route » de ces textes empreints d’actuelle vérité, le « vide des écrans » et la mélancolie sourde qui les nourrit car ces poèmes de souffle, de long cours, respirent une connaissance du monde d’aujourd’hui, tactile et bienveillante quels que soient les accrocs, les avanies. Et tout n’est pas sombre, il y a « le bonheur à gober », les villes enamourées comme Paris pour donner le change et équilibrer ce regard de poète dense :

 

« Il me reste Paris pour toiser les réverbères

et filer les faux prophètes aux dents jaunes,

un papillon de nuit épinglé au revers de ma veste

conjurer les stylets plantés dans les pupilles » (p.99)

Grand-Chien, Mickaël El Fathi (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Jeudi, 02 Juin 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Jeunesse

Grand-Chien, Mickaël El Fathi, éditions Cipango, octobre 2021, 40 pages, 16 €

 

Nous ne voulons pas d’hommes blancs ici. Les Black Hills nous appartiennent. Si l’homme blanc veut les prendre, je me battrai.

Sitting Bull

Consécration du cheval en terre indienne

Mickaël El Fathi, après avoir beaucoup voyagé et exercé divers métiers, illustre et écrit pour la jeunesse. Il est ainsi l’auteur de plus d’une dizaine de livres. Et c’est sous les auspices de la nation première amérindienne de l’ethnie Lakota, longtemps appelée Sioux, que l’auteur jeunesse nous conte le destin de Grand-Chien. Grand-Chien est la qualification du cheval, « Tashunka, ou Shunka Wakan, le Chien Sacré », comme nous l’indique Maurice Rebeix, dans sa postface. La théogonie animiste stipule que l’ensemble des espèces vivantes et la nature sont profondément reliés, et ce, depuis l’aube des temps. L’acception de ne figurer qu’en relation et contiguïté dans l’univers est la loi adoptée par les tribus des Indiens des Plaines d’Amérique.

Petite encyclopédie du génocide arménien, Denis Donikian (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 24 Mai 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Histoire

Petite encyclopédie du génocide arménien, Editions Geuthner, décembre 2021, 661 pages, 75 € . Ecrivain(s): Denis Donikian

 

« A l’origine de ce livre constitué de fiches présida l’idée d’apporter aux profanes autant qu’aux intéressés eux-mêmes, un éclairage précis et fiable sur les événements qui ont préparé, marqué et suivi le génocide des Arméniens en 1915. Comme les travaux universitaires épousant la complexité des faits pouvaient conduire à décourager même les plus curieux, il parut opportun de les rendre assimilables sans pour autant amoindrir leur violence. » Ce sont deux phrases extraites de l’introduction écrite par l’auteur qui précisent la volonté et le contenu de l’ouvrage. Denis Donikian a entrepris la création de fiches, initialement prévues pour Internet, en commençant par celle consacrée au mot génocide. Les fiches se sont ensuite accumulées, abordant les différents aspects d’un génocide demeuré impuni et dont les causes et les conséquences méritaient une approche synthétique.

Tout ce qui est à toi brûlera, Will Dean (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 20 Mai 2022. , dans Recensions, Les Livres, Polars, La Une Livres, Roman, Belfond

Tout ce qui est à toi brûlera (The last thing to burn), Will Dean, mars 2022, trad. anglais, Laurent Bury, 267 pages, 20 € Edition: Belfond

 

Un roman de l’horreur, qui semble tout droit sorti de la sinistre cave d’un Dutroux, ou inspiré par ce qu’a vécu la jeune autrichienne Natascha Kampusch pendant huit ans. Si l’auteur a eu le dessein de montrer un exemple de la monstruosité qui peut animer un individu dans son rapport à certains de ses semblables sur lesquels il lui est permis circonstanciellement de s’arroger un pouvoir absolu, il y a réussi.

La narratrice, Thanh Dao, qui parle à la première personne, obligeant ainsi le lecteur à ressentir conjointement les horreurs de sa captivité, est une jeune Vietnamienne, arrivée clandestinement dans un conteneur en Angleterre avec sa sœur Kim-Ly dans un « lot » de migrantes attirées par la promesse d’un travail correctement rémunéré leur permettant de poursuivre des études universitaires tout en faisant parvenir une aide financière à leur famille. A leur arrivée, les passeurs les louent puis les vendent en catimini à divers « patrons » – ici un propriétaire terrien vivant reculs dans une ferme isolée – qui ont tout loisir de les exploiter à leur gré de façon évidemment totalement occulte. Alors se met en place l’emprise, alors commence un long, un terrifiant calvaire.