Identification

Recensions

Rue des fleurs, Jean-Michel Maulpoix (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Jeudi, 24 Mars 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Mercure de France

Rue des fleurs, Jean-Michel Maulpoix, Mercure de France, février 2022, 88 pages, 10,50 € . Ecrivain(s): Jean-Michel Maulpoix Edition: Mercure de France

 

Près de cinquante livres : vingt-cinq livres de poésie et presque autant d’essais ; sur le lyrisme, sur « les mots de la poésie », sur Verlaine.

Le poète est aussi professeur d’université, spécialiste du lyrisme et grand connaisseur des poètes contemporains de premier ordre.

Je retrouve dans ce beau livre de poèmes, les grandes qualité de regard et de scansion qui m’avaient déjà tant frappé dans Le Voyageur à son retour, ou L’Hirondelle rouge.

L’écriture instille une mélancolie douce et prenante à l’égard du réel frôlé, ressuscité, au fil des saisons, au gré des images de rues ou de banlieue « pauvre ». Tout en s’interrogeant sur son art, sur cette « fonction » du poète dans un monde devenu sans regard, Maulpoix déploie, en de brefs poèmes – il affectionne le douzain –, une vision d’un monde perdu, qu’il faut sauvegarder de l’oubli.

La cité de mon père, Mehdi Charef (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 18 Mars 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

La cité de mon père, Mehdi Charef, éditons Hors d’atteinte, août 2021, 144 pages, 16 €

 

Ce septième roman de l’auteur est un cri d’écriture et de vie, lancé par un adulte qui est resté l’enfant algérien de là-bas, qui continue d’évoquer le pays quitté pour l’exil.

Arrivé en France avec sa famille, huit enfants dont l’une, Amaria, restée au pays, en terre familière, Mehdi a connu les cités de transit, la laideur et la misère du bidonville de Nanterre.

Un jour, ce fut un autre décor, avec salle de bain et eau courante, « la cité de mon père », un fameux changement.

Dans ce roman-récit autobiographique, l’on sent sans cesse cette ferveur du fils pour le père, qui connaît dans le corps les tressaillements du marteau-piqueur, pour la mère, courageuse. Rien n’est faux dans cette description des années noires, du rappel incessant des heures d’Algérie, du temps des colons et de la guerre meurtrière.

Les villes de papier, Une vie d’Emily Dickinson, Dominique Fortier (par Jacques Desrosiers)

Ecrit par Jacques Desrosiers , le Jeudi, 17 Mars 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Biographie, Grasset

Les villes de papier, Une vie d’Emily Dickinson, Dominique Fortier, septembre 2020, 208 pages, 18,50 € Edition: Grasset

 

Dominique Fortier nous fait découvrir une Emily Dickinson attentive presque sensuellement au monde à la portée de son regard : son jardin, un nid de brindilles, l’érable devant sa fenêtre, le blanc immaculé de ses robes, effacés à l’occasion par la voix inopportune d’un visiteur au rez-de-chaussée. Cette femme qui finira par se cloîtrer dans sa chambre, ne voulant plus voir personne sauf ses proches, Les villes de papier ne la présente pas comme une recluse attendant d’être délivrée par quelque expert en psychose (la légende a d’ailleurs exagéré sa réclusion), mais comme une écrivaine qui a donné sa vie à la poésie, sans même se soucier de publier les centaines de poèmes qu’elle jetait dans le tiroir de sa commode. Elle a choisi de vivre à l’écart non de l’ordre social, mais de la société. C’est la ligne de force sur laquelle avance la prose délicate de Dominique Fortier : dédramatiser la solitude d’Emily Dickinson.

Le Diable est une Femme, Gérald Wittock (par Jean-Jacques Bretou)

Ecrit par Jean-Jacques Bretou , le Lundi, 14 Mars 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

Le Diable est une Femme, Gérald Wittock, Éditions Vérone, février 2022, 418 pages, 25 €

 

S’appuyant sur force chiffres et statistiques, l’auteur se livre, dans sa préface, à une démonstration menant à conclure qu’un homme ordinaire ne peut vraiment connaître que sept villes dans sa vie, ce qui semble à peu près aussi vrai que dire qu’un chat a sept vies. Prenons cette proposition comme un axiome et acceptons-la pour vraie comme nous prenons pour exact les chiffres de l’OMS donnant comme âge moyen d’un être humain soixante-neuf ans et voyons voir où veut en venir Wittock.

La première partie de son livre, qui en comporte quatre, a tout du récit autobiographique si l’on accepte que de la naissance à l’âge de sept ans ses souvenirs lui ont été plutôt relatés et n’ont pas imprimé sa mémoire enfantine (comment pourrait-il se souvenir qu’il est né à 23 heures 50 et qu’il faisait 27°C avec un vent de force 7). Gérald est donc né à Rome le 27 septembre 1966 accueilli par le Ecco il Bèbè. Eccolo ! de sœur Bernadetta et émaille déjà son récit de nombreux jeux de mots et paroles de chanson. À presque six ans (il respecte ses statistiques), il déménage pour Bruxelles, nous sommes le dimanche 3 septembre 1972 et Gérald est devenu Gerry.

Aux vents de noroît Ouessant, L’infini des limites, Arnaud Montoux (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Vendredi, 11 Mars 2022. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman

Aux vents de noroît Ouessant, L’infini des limites, Arnaud Montoux, éditions du Mont-Ailé, décembre 2021, 84 pages, 15 €


L’Ouessant insulaire et légendaire, situé en territoire de « fin de la terre » nommé Finistère, ne pouvait que résonner d’une poésie fouettée par la vigueur des éléments, à l’instar des photographies qui accompagnent les textes d’Arnaud Montoux dans ce beau livre publié par les éditions du Mont-Ailé dans leur Collection Patrimoine « Des pierres et des ailes » dont l’objectif est de « mieux habiter nos lieux de mémoire ». Le prêtre-poète (Arnaud Montoux officie au Diocèse de Sens-Auxerre et est Professeur de Théologie à l’Institut Catholique de Paris), auteur à la fois des photographies et de leur vis-à-vis textuel, porte son passage « au travers des ressacs de chaos » diffusés sur des arrière-plans de couleur noire, il passe « en ruse / au risque d’y briser mâture, équipage, pavillon » sans lâcher sa prise face à la force atlantique, exposé «aux vents de noroît », ce vent du nord-ouest froid et sec qui travaille les hommes, les paysages de la mer.