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Recensions

Boire la lumière à la source, Parme Ceriset (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Mercredi, 22 Mars 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Poésie, Editions du Cygne

Boire la lumière à la source, Parme Ceriset, éditions du Cygne, janvier 2023, 54 pages, 10 € . Ecrivain(s): Parme Ceriset Edition: Editions du Cygne

 

Affichant un « nous » participatif à plusieurs niveaux, Parme Ceriset se sentant multiple comme les étoiles qui lui sont chères, savoure la conquête de multiples naissances ou renaissances ; celle de la vie elle-même, bien sûr, et celle de la poétesse en voie de confirmation définitive parmi les meilleurs.

Devenue fille de « l’aube éternisée », cette voix sortie de la nuit s’exprime désormais au grand jour.

Elle s’en réfère aux sources de l’être et de l’Humanité : « Dans le mystère évanescent/ de l’aube primordiale/tous creusaient déjà la terre/en quête de clartés vives/ puis les yeux se levaient vers le ciel » et ramène l’émotion primordiale avec le « nous pluriel » évoqué par des amants combatifs sur la durée à promouvoir cette grandiose complicité où « plus rien ne vit en dehors de leurs yeux ».

Les Miscellanées d’un bouquineur, Virgile Stark (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Mardi, 21 Mars 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Anthologie, Les Belles Lettres

Les Miscellanées d’un bouquineur, Virgile Stark, Les Belles-Lettres, novembre 2022, 156 pages, 17,70 € Edition: Les Belles Lettres

 

On peut passer sa vie professionnelle à vendre des livres dans une librairie ou à les prêter et en assurer le retour dans une bibliothèque publique sans jamais en lire un seul. Le fait que le prix d’un volume soit désormais imprimé au bas de sa quatrième de couverture évite au commerçant de feuilleter le volume pour établir sa facture. Dans les bibliothèques publiques où un ouvrage se réduit désormais à un code-barre, le seul membre du personnel amené à ouvrir un volume est celui chargé de le cataloguer – et encore peut-il se contenter de copier les informations fournies par une base de données. Bref, ceux qui vivent au milieu des livres ne sont pas ipso facto les mieux placés pour en parler. Bien entendu, il existe d’heureuses exceptions et Virgile Stark en constitue une, qui manipule des livres les jours ouvrables à la bibliothèque où il travaille et bouquine sur ses heures de loisir. De sa longue et assidue fréquentation des livres, il a tiré un volume de Miscellanées d’un bouquineur, auxquelles les Belles-Lettres ont donné une forme particulièrement agréable, originale et réussie.

La Rafle du Vel d’Hiv, Laurent Joly (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 17 Mars 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Grasset, Histoire

La Rafle du Vel d’Hiv, Laurent Joly, Grasset, mai 2022, 400 pages, 24 € Edition: Grasset

 

Voilà un livre-événement qui va réveiller les consciences car il est la somme de recherches sur l’histoire de l’Occupation et d’un de ses plus sinistres faits, la Rafle de juillet 1942 qui coûta la déportation à plus de treize mille Juifs. Basé sur une documentation féconde (une soixantaine de pages de références bibliographiques, en fin de volume), l’essai historique fouille véritablement les circonstances qui préparèrent l’horreur.

Jamais un livre sur le sujet ne mit en cause d’une façon aussi argumentée et éclairante que ce document de Joly, qui pointe la totale responsabilité de la Police parisienne qui usa de tous ses ressorts pour « réussir » l’opération et faire plaisir (que de zèle du côté de nombre de commissaires) à l’Occupant. Bien sûr, Bousquet, Darquier de Pellepoix et autres pontes du gouvernement de Vichy sont aux sources mêmes de la tragédie.

Pas la défaite, Gilles Moraton (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 16 Mars 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Roman, Editions Maurice Nadeau

Pas la défaite, Gilles Moraton, Editions Maurice Nadeau, janvier 2023, 240 pages, 18 € Edition: Editions Maurice Nadeau

 

Faire d’un déserteur un héros, ce peut paraître un paradoxe, une gageure, une boutade, ou un contresens. Il n’en est rien en ce roman de Gilles Moraton faisant du franco-espagnol Paco un personnage on ne peut plus sympathique qui, se retrouvant seul dans la tourmente et le chaos de la débâcle de 1940, aux environs de Noyon, son régiment ayant été décimé par les Allemands, jette l’uniforme aux orties et le fusil au fossé et tente de rentrer chez lui, dans le sud, en se cachant à la fois des forces ennemies qui avancent sur la même ligne que lui, voire devant lui, des autorités françaises qui pourraient le condamner pour désertion ou le remettre aux forces d’occupation par zèle pétainiste, et de villageois xénophobes enclins en ces temps troublés à agresser tout étranger de passage.

Quant à lui, « Il ne se considère pas comme un déserteur mais comme un vaincu en fuite ».

« Enlever l’uniforme, c’est déjà mettre fin symboliquement à la guerre. A la sienne en tout cas ».

Le Festin sauvage, De la Minsk soviétique au Brooklyn d’aujourd’hui, le récit et les recettes de cuisine d’une famille juive athée, Boris Fishman (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 09 Mars 2023. , dans Recensions, Les Livres, La Une Livres, Récits, Editions Noir sur Blanc

Le Festin sauvage, Boris Fishman, Les Éditions Noir sur Blanc, mars 2022, trad. anglais (USA) Stéphane Roques, 382 pages, 23 € Edition: Editions Noir sur Blanc

 

On est (ou on devient) ce que l’on mange, affirme la sagesse populaire. Encore faut-il qu’il y ait quelque chose à manger. La faim est une sensation qui renvoie l’être humain le plus éloigné de la nature à l’état primitif, animal. Nous ne parlons pas du petit creux qui se manifeste quelques heures après le repas précédent et dont on sait qu’il sera comblé un peu plus tard, fût-ce en mangeant de la mauvaise restauration collective. Non, nous parlons de la faim qui dure, depuis si longtemps qu’on ne sait plus à quand remonte le dernier repas digne de ce nom, ni quand aura lieu le prochain, d’une faim qui vous accompagne jour et nuit, même dans vos rêves. La vision d’épouvante qu’offrent les marchés traditionnels chinois, dont les étals présentent les animaux les plus improbables – pas seulement du pangolin – s’explique dans la mesure où la grande majorité de cette immense population croupit dans la misère la plus noire et qu’au bout d’une semaine sans manger, même le végan le plus résolu, le plus fanatique, se précipitera sur n’importe quel bout de viande.