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Poésie

Les Roses bleues de Ravensbrück, Jeanine Baude (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 21 Septembre 2021. , dans Poésie, Les Livres, Recensions, La Une Livres

Les Roses bleues de Ravensbrück, Jeanine Baude, Éditions La Rumeur Libre, avril 2021, 80 pages, 15 €

 

Dédié à nombre de femmes qui ont subi les camps, ici Ravensbrück, et en particulier à sa tante Adrienne, le livre de Jeanine Baude tente un hommage désespéré à toutes celles qui ont souffert des camps nazis et ont « entamé » littéralement leur vie aux griffures des camps de la mort. Parallèlement à ces destins broyés, la poète souligne son propre destin, de souffrante. Elle a connu le cancer et ses affres. Elle chante ainsi à deux tons la destinée des femmes, des blessées, des souffrantes de la vie ordinaire.

La poète sait mieux que quiconque que l’histoire ne se balaie pas d’un coup de déni (comme ces falsificateurs nombreux qui inventent, faussent, mentent sur l’histoire). Baude restitue l’histoire vraie de ces femmes, enfermées dans un camp pour femmes, avec tous les « bleus » de leur histoire. Les voilà traquées, haïes, violentées. Les voilà parquées comme du bétail, prêtes à subir poux, maladies, blessures, faim, viols. Elles sont les « roses bleues », ces roses anéanties, qu’une couleur du bleu de la peau abîmée et meurtrie hisse au destin funeste des victimes, des affligées.

N’être que ça, Yves Namur (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 20 Septembre 2021. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

N’être que ça, Yves Namur, éditions Lettres Vives, juin 2021, 96 pages, 16 €

 

Être, silence, oiseau

Cette poésie très claire et très travaillée, qui côtoie l’essentiel, est satisfaisante en tout point. J’y ai deviné par exemple, un tempérament, et vu nettement le poète lui-même, retrouvant dans l’écume de la réalité poétique, le sens du vrai et de la quintessence, en gros, d’une présence, de la Présence. Donc, l’être. Donc le Dasein de l’être, de l’être en train d’être.

Le poète est au présent – même si ce recueil a été rédigé durant une décennie. Car son poème tire vers le contemplatif, à la japonaise peut-être, en tout cas comme décantation de l’observation, qui, en silence, veille pour l’être, parmi les oiseaux, créatures qui ne sèment ni ne récoltent. La récolte du poète, c’est son poème et sa timide apparition, sa façon de faire place, de rendre vacant ou d’éblouir.

Face aux maisons, Philippe Fumery (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Jeudi, 16 Septembre 2021. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Face aux maisons, Philippe Fumery, éditions Henry, Coll. Les Ecrits du Nord, avril 2021, 89 pages, 12 €


Le titre de ce nouvel opus poétique de Philippe Fumery, édité chez Henry dans la collection dirigée par Jean Le Boël, Les Écrits du Nord, se trouve explicité à la dernière page. Nous n’en révèlerons pas bien sûr le contenu ici mais indiquons qu’il s’agit d’une citation du poète Pierre Dhainaut, ce qui n’est pas anodin, et qu’elle reste valable non seulement en toutes circonstances mais plus particulièrement au vu du travail du poète. Ainsi ce que le poète nous donne à voir dans le détail des contingences simples, des aléas soulevés par le regard dès que celui-ci se révèle curieux, constitue une mise en abyme de son activité, ce qui revient à dire qu’écrire le poème de chaque jour le respire en ses pores, en mange les instants de tristesse et la joie, en visualise les odeurs, en écoute les humeurs – dans une synesthésie fabuleuse qui nous fait palpitation intégrante d’un cosmos aussi vivant que l’inconnu sidéral est fascinant.

Le temps appris, Patrick Devaux (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Mercredi, 15 Septembre 2021. , dans Poésie, Les Livres, Recensions, La Une Livres, Le Coudrier

Le temps appris, Patrick Devaux, mai 2021, 67 pages, 16 € Edition: Le Coudrier

 

Le temps appris, recueil de poésie de Patrick Devaux, illustré par de magnifiques aquarelles de Catherine Berael, est une immersion poétique au cœur du thème du souvenir, des mots adressés aux disparus. Au-delà de l’absence, du temps écoulé, le poète a la conviction qu’il demeure quelque chose des aimés, de l’amie disparue devenue « ange » : « Il est tard / mais je la sais / vivante / entre les mots du sommeil ».

Dans la continuité de Rimbaud et de sa célèbre « mer allée avec le soleil », le ciel et les oiseaux offrent à l’auteur une porte d’accès vers l’éternité. Au souvenir de la mystérieuse défunte, il dédie « des milliers de mots que jamais elle n’aura lus ».

Il y a également, en toile de fond, une réflexion philosophique passionnante sur le temps qui passe. Le temps est cet ennemi, cet assassin insidieux contre lequel nul ne peut lutter : « L’abeille /à / la fenêtre / ne sait rien /du / temps appris / qui /malgré / sa transparence / va /lui briser les ailes ». Le poète s’interroge sur la toute-puissance du temps qui a malheureusement le pouvoir de tout détruire : « Le temps / n’a pas bien / compris / des dieux /les ailes / qu’il avait / reçues ».

Nos voix persistent dans le noir, Sylvie Fabre G. (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Mercredi, 15 Septembre 2021. , dans Poésie, Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Nos voix persistent dans le noir, Sylvie Fabre G., éditions L’Herbe qui tremble, juin 2021, ill. Jean-Gilles Badaire, 100 pages, 15 €

 

Habitation

On rencontre dans ce livre, si l’on essaye de discerner une tendance appuyée dans la trame générale de ce recueil, des concepts universaux et transversaux. Car il y a dans ce recueil, vie et mort, désir et crainte, soi-même et autrui qui se balancent, s’opposent et se scindent harmonieusement. De cet état de chose, je puis déterminer dans cet ouvrage de dizains, une sorte d’alternance entre le noir et le blanc, la force et la faiblesse, peut-être tout bonnement le yin et le yang chinois, inspirés du taoïsme. En tout cas, une préoccupation spirituelle malgré tout. Donc lumière et obscurité alternent, et le lecteur est obligé de trouver par les « huis » du poème le dessin de la « maison » céleste. Oui, car amour et haine, joie et angoisse cohabitent tellement dans notre monde matériel que le poème ne peut que s’aliéner à sa tâche de représentation de l’esprit.