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Poésie

Derrière le dos de Dieu, Lorand Gaspar

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Samedi, 17 Septembre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Derrière le dos de Dieu, 111 pages, 14,90 € . Ecrivain(s): Lorand Gaspar Edition: Gallimard

 

Par le seul titre de son nouveau recueil de poèmes, qui s’inscrit dans l’œuvre complète de telle sorte qu’il semble inséparable du précédent recueil intitulé Patmos, et publié chez Gallimard en 2001, Lorand Gaspar parle tout à la fois de son goût pour Dieu et de son goût pour les voyages, l’un et l’autre se révélant inséparables.

En effet, « Derrière le dos de Dieu » est le « nom donné à cette région de la Transylvanie orientale où se situent les rudes villages des hauts plateaux des Carpates ». Les grands-parents de l’auteur viennent de cette belle région rocailleuse et inhumaine. D’où, peut-être, en partie, le goût de toujours de l’auteur pour l’austérité des déserts (la montagne et le désert étant plus proches qu’on pourrait le penser, l’un et l’autre forçant l’homme à ne s’intéresser qu’à son environnement, à cette chair de la terre qui prend soudain toute la place, physique et psychique).

A Oui, Boris Wolowiec

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Mardi, 06 Septembre 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres

A Oui, Editions du Vide Immédiat, 2016, 432 pages, 20 € . Ecrivain(s): Boris Wolowiec

 

L’œuvre de Boris Wolowiec s’inscrit, quant à la structure, plus du côté de Levinas que de l’aphorisme. S’il reprend la formulation de ce dernier, c’est pour immédiatement le mettre an abîme afin de casser ce que ce type d’écriture a de trop fringant et de faussement définitif.

L’auteur ne pense et n’écrit jamais par idées distinctes et simples ou dichotomiques, mais par un feuilletage progressif fondé sur l’exactitude et l’épaisseur du sentiment. Il faut son tribunal de nécessaire déraison sans quoi tout jugement rationnel ne serait qu’une vue de l’esprit, une quintessence statique. A l’inverse, tout chez Wolowiec est en mouvement.

Les textes eux-mêmes ne cessent de muter et restent en état provisoire même lorsqu’ils paraissent définitifs. Proche d’un Michaux (l’ironie en moins), il démaquille les apparats. Si bien que l’aphorisme devient l’apostille qui évite les réductions simplistes au profit d’une diaphonie.

Dans ce livre, division du discours n’est qu’apparente : s’y instaure tout un jeu de « répons » visant à embrasser l’humain un peu à la manière dont Ponge embrasse les choses entre altération et confrontation.

Vitraux de songes, Francis Etienne Sicard Lundquist

Ecrit par Patryck Froissart , le Mardi, 30 Août 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Ipagination

Vitraux de songes, 2015, 132 pages, 13,60 € . Ecrivain(s): Francis Etienne Sicard Lundquist Edition: Ipagination

 

Cent vingt-et-un poèmes.

Cent vingt-et-un sonnets.

Cent vingt-et-un morceaux d’architecture.

 

Francis Sicard fait dans la dentelle (c’est un de ses termes récurrents).

Francis Sicard remet le sonnet à l’honneur.

Francis Sicard cisèle ses sonnets comme un orfèvre.

 

Les cent vingt-et-un sonnets de ce recueil ont tous exactement la même forme, exactement la même composition, exactement le même rythme.

Comme un rire de lumière, Charles Tomlinson

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Lundi, 29 Août 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Iles britanniques

Comme un rire de lumière, Éditions Caractères, édition bilingue, trad. anglais Michèle Duclos, préface Michael Edwards, dessins Charles Tomlinson, 128 pages, 20 € . Ecrivain(s): Charles Tomlinson

 

Michael Edwards constate avec justesse que la poésie de Tomlinson, « vibrant de tant de présences observées, élucidées et mises en œuvre, s’intéresse souvent […] à l’inaperçu et à l’absent ». Il n’est que de se reporter au poème « The Track of the Deer » (« La Trace du chevreuil ») pour s’en rendre compte.

 

… The track of the deer

That strayed last night into the garden,

Stops beneath the fruitless apple tree,

Shaped out and shimmering with that frost

You can feel here at the edge of all imaginings :

Présente absence, Mahmoud Darwich

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 26 Août 2016. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Bassin méditerranéen, Moyen Orient, Sindbad, Actes Sud

Présente absence (Fî hadrat al-ghiyâb), trad. arabe palestinien Farouk Mardam-Bey, Elias Sanbar, 148 pages, 17 € . Ecrivain(s): Mahmoud Darwich Edition: Sindbad, Actes Sud

 

Le titre de ce puissant ouvrage exprime toute la nostalgie de Mahmoud Darwich, et, davantage, au-delà de la souffrance individuelle de l’homme, condense toute celle d’un peuple victime de l’une des brûlantes injustices de l’Histoire et de la froide et implacable application de décisions politiques prises sans qu’il ait eu un mot à dire.

Car quelle est l’absence ? Il s’agit bien de celle du pays natal, la Palestine, que l’auteur a dû quitter, enfant, aux sombres heures de la Nakba, pour vivre l’errance, le déracinement et la précarité des réfugiés au Liban, puis les dangers d’un retour clandestin et d’une ré-infiltration familiale cachée, au pays, mais loin de la maison et du village natals que se sont appropriés les colons, suivie, beaucoup plus tard, par un long exil aux Etats-Unis avant un retour définitif à Ramallah.

Tous ces départs, tous ces retours, sous le signe d’une absence toujours présente.

Absence présente, jour après jour, jusqu’à la mort.

Absence vécue, au présent, au passé, au futur, à jamais.