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Poésie

Les Paroles Communes, Lancelot Roumier (par Patryck Froissart)

Ecrit par Patryck Froissart , le Vendredi, 21 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Les Paroles Communes, Lancelot Roumier, Editions La Renverse, 2017, 120 pages, 15 € . Ecrivain(s): Lancelot Roumier

 

Lancelot Roumier, poète obsédé-possédé par le MOT, fait partager en publiant ce recueil aux Editions de La Renverse sa fascination pour le langage, ses mécanismes, ses fonctions, son rôle social, ses limites en matière de communicabilité entre émetteur et récepteur d’une part, entre la chose et lui d’autre part et, subtilement, sa nature dans les relations qui le constituent en tant que tel entre référent, signifiant et signifié selon les concepts saussuriens.

L’ouvrage est en fait une somme de trois recueils :

– Les Paroles Communes

– La Carte des Eaux

– Album photo

Après la nuit après, Thierry Radière (par Murielle Compère-Demarcy)

Ecrit par MCDEM (Murielle Compère-Demarcy) , le Mercredi, 19 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Après la nuit après, éd. Alcyone, coll. Surya, mai 2018, 67 pages, 18 € . Ecrivain(s): Thierry Radière

 

Le miel se fabrique ici dans la ruche des songes, Après la nuit après, juste au sortir du Rêve. La singularité de ce nouveau recueil de Thierry Radière se tient, non entre chien et loup mais, à ses antipodes analogues, dans l’entre-deux communicant du sommeil en phase terminale et du réveil qui n’a pas encore tout à fait mis pied à terre (« (…) cet instant-là entre deux nuits où le jour (sera) court (…) »).

La situation du paroxysme plonge l’auteur et les lecteurs de ces lignes dans le plaisir de l’Écrire, passerelle sous laquelle court l’appel de la lumière, suspendue dans « la nuit en apnée ».

Nous connaissions L’Expérience de la nuit ainsi que Marcel Béalu nous l’a retranscrite – pour citer en exemple un auteur s’étant toujours tenu, comme ici et souvent Thierry Radière, dans l’entre-deux créatif du rêve et du réel –, son écart énigmatique fascinant dans l’entre-deux où se meut le mystérieux pouvoir des mots quand les clés de la poésie y forgent des portes entrouvertes.

Ce long sillage du cœur, Philippe Leuckx (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Ce long sillage du cœur, éd. La Tête à l’envers, avril 2018, 90 pages, 15 € . Ecrivain(s): Philippe Leuckx

 

Avec un certain décalage horaire du cœur (« Vous alliez à l’ombre Quand je désirais la lumière ») et son sens de l’observation codant les idées sous-jacentes (« Je m’égarais alors A lire entre les fils De clôture Les taches De vaches pie »), inversant l’idée de manière à donner du tonus à une image pouvant suggérer une forme d’écriture – je songe à celle de Dotremont –, Philippe Leuckx laisse surgir des mots une sorte d’animalité sauvage imprévisible et naturelle semblant inverser les rôles dans le temps, à rebours d’enfance car « chaque poème rend pèlerin de soi ».

Avec ses Murs de pierres grises comme semées par le Petit Poucet de son devenir, Philippe arpente son « long sillage du cœur » avec une tendresse menant le lecteur attentif à la « langue douce de l’errance ».

Les textes plus longs alternent parfois avec une seule idée reprise à la page suivante donnant au livre cette impression de dénivelé suggérant la progressivité de la démarche accentuant encore la rumeur d’écrire.

Oiseau-moi, Edith Azam (par France Burghelle Rey)

Ecrit par France Burghelle Rey , le Lundi, 17 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Lanskine

Oiseau-moi, avril 2018, 36 pages, 12 € . Ecrivain(s): Edith Azam Edition: Editions Lanskine

 

Le nouvel opus d’Edith Azam s’ouvre sur un vers performatif qui, en même temps que la parole, fait naître, dans son identité, celle ici d’un oiseau, celle qui semble bien le double de la narratrice, comme l’indique le titre formé de chaque côté du trait d’union des deux termes équivalents. Il convient également de rapprocher deux noms, celui d’Hannah, premier mot de l’incipit, et le patronyme Azam. Tous les deux sont d’origine hébraïque puisque l’un est issu de l’hébreu et signifie « grâce », mère du prophète Samuel ou de la Vierge Marie selon les testaments, et le second est une variante régionale du nomde baptême Adam.

Dans son recueil précédent publié en 2015 chez POL, Edith Azam a déjà donné à une autre un nom, éponyme du titre, Caméra, qui comme il l’indique scrute lucidement la vie et, du même coup, le néant. Trouvera-t-elle dans ce nouvel opus une raison à espérer ? Car, avant encore, elle a écrit à propos de l’autre : « Il contamine notre espace, veut nous réduire à petit feu ».

Dès les premiers poèmes, apparaissent des affirmations de solutions possibles : l’eau, l’air, les éléments qui peuvent sauver et, au milieu d’eux, le corps, évident, avec ses souffrances, qui entre en résonance avec les mots malgré leur chute.

Ajoie, précédé de Passage des ombres et de Cette âme perdue, Jean-Claude Pirotte (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Gallimard

Ajoie, précédé de Passage des ombres et de Cette âme perdue, février 2018, préface Sylvie Doizelet, 424 pages, 7,30 € . Ecrivain(s): Jean-Claude Pirotte Edition: Gallimard

« Je m’appelle Montjoie et je viens en Ajoie vous apporter la joie ». L’Ajoie est cette pointe que pousse la Suisse en territoire français, au Sud de Belfort (analogue à la pointe de Givet, dans les Ardennes). Au XVIesiècle, le prince-évêque de Bâle, chassé de la cité rhénane par la Réforme protestante, se replia vers l’Ajoie et vint s’installer dans la petite ville de Porrentruy, dont il fit la capitale de son pouvoir temporel et spirituel. Ses successeurs poursuivirent l’œuvre d’embellissement et, de nos jours, Porrentruy est une magnifique cité ancienne, veillée par le château des princes-évêques, avec de nombreux bâtiments du XVIIIesiècle, qui lui confèrent unité et harmonie. Ce fut précisément un des princes-évêques de Bâle, Simon Nicolas de Montjoie (1698-1775), qui, selon la tradition locale, prononça à son arrivée en Ajoie (1762) la formule citée plus haut. En 1793, l’Ajoie se trouva rattachée à la France et forma le département du Mont-Terrible (du nom d’une montagne proche, le Mont-Terri), avant d’être incorporée au département du Haut-Rhin, puis de revenir à la Confédération helvétique. Peu touchée par l’urbanisation, l’Ajoie offre aux rêveurs et aux hommes libres des paysages intacts, où le temps s’écoule paisiblement.