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Poésie

Opus Niger, Pierre Stans (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Lundi, 10 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Opus Niger, PhB éditions, juin 2018, 100 pages, 10 € . Ecrivain(s): Pierre Stans

 

Ce sont presque 40 années d’écriture que ce recueil de poèmes offre au lecteur (1976-2014). Opus Niger, le titre de l’ouvrage, est également le titre de l’un des six « chapitres » qui ponctuent la publication. Lire Pierre Stans, c’est s’immerger dans une écriture que caractérisent le souci des « petits riens » et une extrême sensibilité. C’est aussi confirmer que la poésie est sans doute le dernier bastion d’une réelle écriture face à l’hégémonie du roman qui voit aujourd’hui se succéder des truismes dont le poème n’a que faire. Il ne s’agit plus de (se) raconter des histoires, mais de souligner ce que toute civilisation a mis au jour, un rapport on ne peut plus sensible au réel, qui tient du paradoxe puisque c’est l’impalpable qui se meut dans les vers, cet impalpable qui fait de nous des êtres bourrés de vibrations pour exprimer le plus intime de chacun. La « musicalité », la scansion donnent aussi au texte une épaisseur que les termes révèlent essentiellement dans ces circonstances.

Suites, Roman fleuve, Bruno Fern (par Philippe Chauché)

Ecrit par Philippe Chauché , le Vendredi, 07 Septembre 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Editions Louise Bottu

Suites, Roman fleuve, mai 2018, 162 pages, 14 € . Ecrivain(s): Bruno Fern Edition: Editions Louise Bottu

 

« Et c’est parti : à la guêtre comme à la grêle, à la guigne comme à la gloire, à la glu comme à la gagne, à l’agrippe comme à la garde, à la gale comme à la glaise, à la glace comme à la gerce, à l’aggrave comme à la grise et à la gueule comme à la gorge où il est pris ».

Suites s’ouvre sur un départ à la guerre, départ pour le front des bords de l’Adour, entre Gascogne et Pays Basque. Départ pour la canonnade – la respiration de l’océan (Cendrars) – la cendre, la boue, la peur, les rats et la pisse dans le falzar (rouge garance) et les copains plombés à 2-3 mètres, et en un rien de temps, il s’incorpore à la chair de poule & à canon. Il lance ses mots en basque, comme une pelote de cuir, pour se souvenir qu’il est encore vivant, ou qu’il est en colère, puis il revient au pays, mais il n’est plus le même, il ne chante plus pour ses espadrilles. Suites n’est pas un énième roman sur la Grande Guerre, mais tout autre chose, une esquisse, une fugue qui se joue de la géographie et de la langue qui virevolte comme La Nive à sa source, un cahier romanesque où l’on croise Apollinaire, autre trafiquant de mots et de résonnances, Cendrars, et l’Odyssée. Bruno Fern sait que la mémoire est fragile, qu’elle se dissout facilement et que pour la saisir, il faut la romancer, la transformer, la provoquer, la faire bondir, et la laisser s’envoler.

Première version du monde, Esther Tellermann

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Vendredi, 31 Août 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Première version du monde, Editions Unes, août 2018, 148 pages, 20 € . Ecrivain(s): Esther Tellermann

 

La recréation du monde selon Esther Tellermann

La poétesse reste la maîtresse en poésie d’un imaginaire particulier. Elle mêle les éléments de sa psyché personnelle à divers symboles en un long poème qui n’a plus rien à voir avec un brouet dispendieux qui ramènerait le texte à une autofiction.

Se pénètre un monde labyrinthique et gnomique fait d’un langage abrupt et sans concession. Ce long poème réunit le chant et ses fractions au sein d’une voix intérieure qui semble toujours sur le point de se casser. La poétesse évite tous les effets là où l’ésotérisme se transforme en fulgurance afin de donner à l’intimité une face nouvelle. A travers elle Esther Tellermann ouvre des interrogations là où elle feint de n’offrir que des états de constatation.

Soluble dans l’œil, Yusuf Kadel

Ecrit par Patryck Froissart , le Jeudi, 30 Août 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Soluble dans l’œil, éd. Acoria, Coll. Paroles poétiques, 2010, Préface Shenaz Patel, 100 pages, 14 € . Ecrivain(s): Yusuf Kadel

 

Yusuf Kadel figure assurément parmi les poètes mauriciens contemporains les plus talentueux. Son écriture poétique brille par une recherche incessante d’originalité, par la spontanéité avec laquelle elle sort des sentiers littéraires battus, par l’audace (certes non singulière ni véritablement novatrice si on pense à Apollinaire, ce précurseur de la rupture des codes de la poésie dite classique) avec laquelle elle défie le lecteur et cherche constamment à le dérouter de toute possibilité de sens unique.

Le recueil est en deux parties, intitulées respectivement Soluble dans l’œil et En marge des messes.

Chacun de ces ensembles fonde sa propre problématique, qu’il convient donc de distinguer, même si le second est l’illustration et l’amplification des spécificités poétiques du premier.

Soluble dans l’œil :

Dans le vert des montagnes En cheminant avec Gaspard, Jacques Viallebesset

Ecrit par Philippe Leuckx , le Mardi, 28 Août 2018. , dans Poésie, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Contes

Dans le vert des montagnes En cheminant avec Gaspard, éditions Entrelacs, janvier 2018, 82 pages, 16,50 € . Ecrivain(s): Jacques Viallebesset

 

Entre conte et récit raconté à la lumière de l’âtre, et dans l’esprit des beaux romans nature d’Henri Pourrat (1887-1959) et de l’un de ses héros fétiches, Gaspard, Jacques Viallebesset nous offre un beau brin de montagne et d’aventure retour dans le passé « chaumières, escapades au frais de la forêt, amitié et solidarité des pauvres ».

Son héros, dont le recueil donne à lire toute l’histoire, vit au vert, dans le vert de ces hauteurs suisses et autres, à « l’appel de la forêt » – London, ses trappeurs, ses neiges, ses forêts ombreuses, ne sont pas loin –, devient un proche familier du lecteur, au fil de ces très longs poèmes aux titres éclairants : « La forêt d’enfance », « Par monts… », « Batailles du haut pays »…

Il y est question de bandits qui dépouillent, de héros au grand cœur, de pauvres qui se portent les uns les autres.