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Les Livres

La fille du sculpteur, Tove Jansson (par Delphine Crahay)

Ecrit par Delphine Crahay , le Lundi, 10 Mai 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Pays nordiques, Roman

La fille du sculpteur, Tove Jansson, éd. La Peuplade, février 2021, trad. suédois, Catherine Renaud, 176 pages, 18 €

 

Traduit intégralement et édité pour la première fois en français, La fille du sculpteur a été publié en Suède en 1968. C’est le récit d’une enfance inspirée de celle de Tove Jansson, au début du XXe siècle, entre Helsinki et l’archipel de Porvoo, entre le port et l’atelier, les hommes et les animaux, le réel et l’imaginaire, les sculptures du père et les dessins de la mère, l’art et les fêtes.

Il s’agit d’un recueil d’épisodes assez brefs – scènes ou anecdotes et, çà et là, petites histoires qui ressemblent à des fables – peuplés par la famille et la ménagerie du sculpteur, ainsi que par quelques figures pittoresques – telle Fanny, la vieille dame qui collectionne les cailloux, les coquillages et les animaux morts, allume le feu du sauna et chante pour appeler la pluie, ou « la vieille fille qui avait une idée ». Il s’ouvre bibliquement, en Paradis ou presque, sous le regard débonnaire d’un grand-père avatar de dieu – de chute, point, l’auteure ayant pris, entre autres licences heureuses, quelques libertés avec le texte sacré – et se ferme sur le récit d’une fête de Noël.

Café Néon et autres îles, Chemins grecs, Jean-Christophe Bailly (par Didier Ayres)

Ecrit par Didier Ayres , le Lundi, 10 Mai 2021. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Café Néon et autres îles, Chemins grecs, Jean-Christophe Bailly, éditions Arléa, mars 2021, 144 pages, 17 €

 

De l’identification

Pour relater le sentiment d’empathie que j’ai éprouvé à la lecture de ce texte, je crois que le meilleur moyen était d’user d’une catharsis, se rapprocher ainsi des visions de la Grèce, du voyage, avec en regard une purgation de mes peines, celle que préconise la tragédie grecque justement. Car j’y ai trouvé une représentation du désespoir kierkegaardien. En tout cas, ce désespoir que j’ai ressenti durant mes voyages en Grèce, où à dix-sept ans, avec Les Fleurs du mal pour seul livre dans mon bagage, je cultivais sans le savoir une plaie douloureuse et brûlante : ma jeunesse. C’est encore là que je quittai le continent européen du point de vue physique pour la première fois de ma très jeune vie, puisque le bateau vers la Crète faisait physiquement le pas hors de l’Europe continentale. Ma famille a depuis des liens avec la Grèce (mes sœurs ayant fréquenté longuement des étudiants Grecs de la Sorbonne).

Le Domaine, Federigo Tozzi (par Philippe Leuckx)

Ecrit par Philippe Leuckx , le Vendredi, 07 Mai 2021. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman, Italie, La Baconnière

Le Domaine, avril 2021, trad. italien, Philippe Di Meo, 224 pages, 20 € . Ecrivain(s): Federigo Tozzi Edition: La Baconnière

 

Talent incontestable du premier quart du XXe siècle, avec Pirandello et Svevo, Federigo Tozzi eut le temps d’écrire quelques romans. Il mourut à trente-sept ans en 1920.

La Baconnière depuis quelques années réédite ses ouvrages. L’histoire particulièrement dramatique de ce Domaine a sans doute des relents autobiographiques : Federigo était le fils d’un propriétaire terrien de la région de Sienne.

Rappelé au chevet de son père qu’il n’a plus vu depuis longtemps, Remigio, seul enfant de Giacomo, est amené, sans aucune compétence, à gérer un vaste domaine. Il y retrouve sa belle-mère Luigia et les ouvriers agricoles, dont l’irritable Berto, qui, dès le départ, lui en veut pour ne pas être à la hauteur de sa tâche. Sans compter la maîtresse spoliée de la succession, Giulia, qui va tout mettre en œuvre pour regagner son dû.

Meurtres à Mahim, Jerry Pinto (par Patrick Abraham)

Ecrit par Patrick Abraham , le Vendredi, 07 Mai 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Asie, Roman

Meurtres à Mahim, Editions Banyan, mars 2021, trad. anglais (Inde) Patrice Ghirardi, 230 pages, 17,50 € . Ecrivain(s): Jerry Pinto

 

On peut lire Meurtres à Mahim, le deuxième roman de Jerry Pinto à être traduit en français après Nous l’appelions Em (Actes Sud, Lettres indiennes, 2015), comme un polar particulièrement bien ficelé : qui a tué Lachhman S. Parthusta, alias « Proxy », jeune homme d’une vingtaine d’années dont on a retrouvé le corps poignardé et mutilé (un rein grossièrement prélevé) près des urinoirs publics de la gare de Matunga, dans une banlieue de Bombay ? Est-ce un assassinat homophobe, un règlement de compte, une vengeance, une affaire de trafic d’organes ? Peter Fernandes, journaliste d’investigation à la retraite, avec l’aide de l’inspecteur de police Shiva Jende, un camarade d’études, va mener l’enquête. Rebondissements, fausses pistes, faux suicide, nouveaux meurtres, dénouement à la fois surprenant et prévisible tiendront en haleine jusqu’à l’ultime page selon les conventions du genre.

Et puis prendre l’air, Etienne Faure (par Patrick Devaux)

Ecrit par Patrick Devaux , le Vendredi, 07 Mai 2021. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, Gallimard

Et puis prendre l’air, Etienne Faure, décembre 2020, poèmes en prose, 136 pages, 14,50 €

 

Ambiance mais aussi expressions anciennes font office de guide touristique littéraire d’un monde dilué dans les mémoires où le temps joue les compte-gouttes ou au sablier entre les monuments et autres lieux-dits aux appellations immuables. De « la perte de vue à la perte tout court » il n’y a qu’un pas si l’oubli l’emporte sur le reste. Il y a tout de l’attente dans ce rêve écrit où « le banc à mi-chemin devient point de rencontre entre la solution cherchée et celle qui doit venir, à pied par l’allée centrale – ou jamais ».

Le Piéton de Paris de Léon-Paul Fargue trouve là une contemporaine continuité toute en rappelant des nostalgies évanescentes qui doucement entrent en dissidence pour faire apparaître un Paris neuf distribué en images accélérées dans le temps : « vivre et survivre, vitesse incertaine des vies » pour poursuivre la route.

La vie de tous les jours passe par des rencontres sur les bancs publics qui deviennent des sortes de partition à se rencontrer, à observer : « Se poser, comme on parle de s’assagir, en siégeant là, sans rien faire, du moins d’apparent. C’est à ça qu’on rêve subitement ».