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Les Livres

Woman hating, De la misogynie, Andrea Dworkin (par Yasmina Mahdi)

Ecrit par Yasmina Mahdi , le Vendredi, 12 Mai 2023. , dans Les Livres, Recensions, Essais, La Une Livres, USA, Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Woman hating, De la misogynie, Andrea Dworkin, éditions Des femmes Antoinette Fouque, mars 2023, trad. anglais (USA), Camille Chaplain, Harmony Devillard, 256 pages, 18 € Edition: Editions Des Femmes - Antoinette Fouque

Perturber le genre

Andrea Dworkin, issue d’une famille de rescapés de la Shoah, née le 26 septembre 1946 à Camden, morte le 9 avril 2005 à Washington, est une essayiste et théoricienne américaine du féminisme radical. Dans cet essai très argumenté, elle dénonce la doxa qui repose sur un ensemble disparate d’opinions confuses, de préjugés, de présuppositions sur les femmes.

L’essayiste remonte aux origines de ces constructions négatives à travers mythes, fables et contes, et déconstruit, défait leur structure et leur imprégnation dans la culture, l’éducation et l’histoire, ainsi que leur influence (nocive) : « On veut situer l’instant précis où la fiction pénètre la psyché comme réalité, et où l’histoire commence à en devenir le reflet ; ou vice versa. Nonobstant, les contes véhiculent une représentation binaire et dichotomique des femmes et des hommes : la bonne jeune fille pure, incapable de se défendre (Cendrillon) ou mariée à un monstre (La Barbe-Bleue), prisonnière, et la marâtre cruelle, jalouse et criminelle.

Abécédaire, Mots et rites d’ailleurs, Tobie Nathan (par Didier Smal)

Ecrit par Didier Smal , le Jeudi, 11 Mai 2023. , dans Les Livres, Critiques, Essais, La Une Livres, Folio (Gallimard)

Abécédaire, Mots et rites d’ailleurs, Tobie Nathan, Folio Essais, mars 2023, 178 pages, 7,50 € Edition: Folio (Gallimard)

 

Tant romancier qu’essayiste, Tobie Nathan se reconnaît comme maître Georges Devereux (1908-1985), l’un des premiers à avoir entremêlé l’anthropologie et la psychanalyse, sortant ainsi l’Homme de ses méandres mentaux individuels et l’invitant à se confronter à la société dans laquelle il vit pour se comprendre – vision brève, trop brève. Enfin, Georges Devereux… Plutôt « Georges, Gyorgyi, Devereux, Dobó, Weismayer… », comme l’apprit Nathan après une enquête menée dans les archives de la désormais réduite communauté juive de la ville de Lugos, en Hongrie. C’est tout le sens des chroniques précédemment publiées dans Psychologie Magazine et ici réunies, plus détaillées, dans le présent volume : rendre aux mots leurs sens (car oui, certains en ont plusieurs), leurs poids existentiels aurait-on envie de dire.

Un été andalou, Eva Garcia (par Parme Ceriset)

Ecrit par Parme Ceriset , le Jeudi, 11 Mai 2023. , dans Les Livres, Recensions, La Une Livres, Roman

Un été andalou, Eva Garcia, MVO Editions, mars 2022, 350 pages, 19 €

 

Le roman d’Eva Garcia est un livre solaire. Ses mots empruntent au soleil la joie des terres andalouses, la chaleur humaine et la lumière qui y règnent, mais également la brûlure, celle du deuil et de la séparation. Roman d’ancrage, plume ancrée, « encrée » aussi, dans la mer espagnole, à Malaga, dans la mère enfin, celle dont le souvenir ardent demeure comme un inaltérable joyau scintillant dans le cœur de la poète.

Dès les premières pages, on perçoit l’importance de la nature qui structure la pensée et les êtres : « mon frère, vaste comme un grand arbre » (…) « mes feuilles se détachent, le vent va m’emporter » (…).

« Je ne suis plus qu’un battement d’ailes d’oiseau sur un arbre immobile. Le ciel est sec dans ma gorge ».

Dans la solitude inachevée, Marc Dugardin (par Marc Wetzel)

Ecrit par Marc Wetzel , le Jeudi, 11 Mai 2023. , dans Les Livres, Les Chroniques, La Une CED

Dans la solitude inachevée, Marc Dugardin, éditions Rougerie, avril 2023, 80 pages, 13 €

 

Tout poète est une sorte de Pythie lucide et prudente. Pythie parce qu’il constate une espèce de « dictée des mots » en lui, dont – dit Marc Dugardin – il se sent « tributaire », puisque sa propre expression prend en route ce quelque chose qui parlait déjà en lui. Mais lucide, parce qu’il sait bien que ce discours intérieur n’est peut-être qu’un bavardage inspiré, une révélation pour rire, au mieux un rêve un peu tenace. Et prudent parce que, même si une musique verbale s’amorce et s’avance en lui avec ferveur, il n’est pas bon de se laisser tout dire : si écrire ne servait pas la vie, ou même (par diversion, ou imposture) la trahissait, pourquoi lancer encore au large sa petite bouteille de mots, l’espérant un jour recueillie (comme dit Paul Celan) sur la « plage d’un cœur » lointain ?

Par le titre de son recueil, le poète belge Marc Dugardin (76 ans) répond ceci à son lecteur : parce que deux solitudes valent mieux qu’une, si et quand, du moins, aucune ne prétend achever (enclore, accomplir, faire cesser) l’autre.

Œuvres poétiques, Yves Bonnefoy, La Pléiade-Gallimard (par Léon-Marc Levy)

, le Mercredi, 10 Mai 2023. , dans Les Livres, Critiques, La Une Livres, Poésie, La Pléiade Gallimard

Œuvres poétiques, Yves Bonnefoy, La Pléiade-Gallimard, avril 2023 (Édition d’Odile Bombarde, Patrick Labarthe, Daniel Lançon, Patrick Née, Jérôme Thélot), 1808 pages, 79 € jusqu’en octobre 2023 Edition: La Pléiade Gallimard

 

Inquiétude est le chemin sans cesse recommencé de Bonnefoy. Sa source, sa chair et, on peut se demander, sa quête. Car jamais il ne se plaint de cette angoisse de l’âme, parce qu’il sait que c’est là que naît sa poésie. Que naît la poésie.

Cette magistrale édition de l’œuvre de Yves Bonnefoy en La Pléiade-Gallimard met à jour l’immense diversité de son inspiration en même temps qu’elle révèle, comme une évidence, son immense unité. Toute l’œuvre, prose et vers, est frappée au sceau de l’inquiétude qui insère dans ses textes une tension extrême qui jouxte sans cesse la rupture de ton, de rythme, de respiration.