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La Une Livres

Shangrila, Malcolm Knox (2ème recension)

Ecrit par Yann Suty , le Vendredi, 18 Janvier 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Océanie, Asphalte éditions

Shangrila (The Life), trad. de l’anglais (Australie) Patricia Barbe-Girault, 512 p. 22 € . Ecrivain(s): Malcolm Knox Edition: Asphalte éditions

 

A la fin des années 60, il était le plus grand des surfeurs. Une légende. « Le Grand Homme », le surnommait-on. Dennis Keith alias DK. « Tout a été dit sur lui, le plus grand surfeur sur la planche, le fumeur de joints, l’accro à l’héroïne, le génie complètement allumé, le taré, le schizo, le type qui fait pschitt, le ouais mais c’est ».

« Dans l’eau, j’étais un génie, un pur génie ».

Dans l’eau, DK savait quoi faire. Il regardait les vagues et tout devenait naturel. Les autres surfeurs étaient ébahis par son talent, sa maîtrise, sa capacité à exécuter des figures que personne n’avait jamais vues. Il était un pionnier, un créateur, qui a complètement défini une discipline. Tous les autres se sont mis à le copier.

« Y’avait quelque chose dans l’eau qui m’aplanissait. Sur la terre ferme, j’étais qu’un ado balourd, un poisson sans eau, je suffoquais ».

Il a le profil du mythe. Une vie à 150 à l’heure et une mort jeune.

Les forêts du Maine, Henry David Thoreau

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 17 Janvier 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, USA, Récits, Rivages poche

Les forêts du Maine, Henry David Thoreau. Trad. de l'anglais (USA) et présenté par Thierry Gillyboeuf. septembre 2012. 216 p. 8,65 € . Ecrivain(s): Henry David Thoreau Edition: Rivages poche

 

Si écologistes, panthéistes et autres adorateurs de la nature se réclament depuis toujours de Henry David Thoreau, il en est qui pourraient le faire de toute évidence mais qui n’en ont pas eu l’occasion, ce sont les romantiques européens. Remarquez l’inverse est tout aussi vrai. Thoreau partage assurément des sources d’inspiration littéraire avec le vaste courant romantique, de Rousseau à Goethe, à Hugo – avec un arrêt important du côté de chez Chateaubriand. Des pages entières du Génie du christianisme – toutes celles qui concernent les forêts du Nouveau-Monde – évoquent Thoreau à s’y méprendre. Qu’on en juge :

« La rivière qui coulait à mes pieds, tour à tour se perdait dans les bois, tour à tour reparaissait toute brillante des constellations de la nuit, qu'elle répétait dans son sein. Dans une vaste prairie, de l'autre côté de cette rivière, la clarté de la lune dormait sans mouvement, sur les gazons. Des bouleaux agités par les brises, et dispersés çà et là dans la savane, formaient des îles d'ombres flottantes, sur une mer immobile de lumière. Auprès, tout était silence et repos, hors la chute de quelques feuilles, le passage brusque d'un vent subit, les gémissements rares et interrompus de la hulotte ; »

Recommencer ailleurs, Sophie Stern

Ecrit par Anne Morin , le Jeudi, 17 Janvier 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Roman, Moyen Orient

Recommencer ailleurs, Editions Avant-Propos, Collection Matanel, 206 p. 17,95 € . Ecrivain(s): Sophie Stern

 

« Aliya, monter », ou « s’élever par l’esprit »… La narratrice de ce livre installée en France, retourne à son pays d’attache : Israël. Ce récit sonne à la fois comme une explication – et d’abord à soi-même – des raisons qui peuvent pousser des Juifs – en l’occurrence français – à « recommencer ailleurs ».

« Quand on change de lieu, on change de chance » (p.69), cette phrase, extraite de la Michna est peut-être le fil conducteur, le fil d’Ariane, qui guide, ou dont cherchent à retrouver l’origine, ceux qui viennent s’installer en Israël, habiter Israël…

L’Aliya, dans le cas de la narratrice, se présente à elle un peu comme un jeu de piste. Ce n’est pas la décision mûrie, ni l’arrachement brutal, ni même un concours de circonstances : elle a passé, adolescente et jeune femme, ses vacances chez sa grand-mère à Tel Aviv, et chez une de ses tantes. Elle découvre, dans les bagages de son mari quand il revient de Londres où il travaille, passer ses week-ends à Paris avec femme et plus tard enfants, des brochures sur le Neguev, et aussi qu’il apprend l’hébreu à temps perdu.

Venise, Jean-Paul Bota et David Hébert

Ecrit par Matthieu Gosztola , le Jeudi, 17 Janvier 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Arts

Venise, « été-hiver 2009-été 2010, automne 2011-printemps 2012 », texte Jean-Paul Bota, dessins David Hébert, Éditions des Vanneaux, Carnets nomades, 2012, 48-[48] p. 15 € . Ecrivain(s): Jean-Paul Bota et David Hébert

 

Une Venise musicale

 

Ce très beau petit livre est le premier né de la nouvelle collection Carnets nomades aux éditions des Vanneaux. Cette collection consiste en l’irruption du tracé de l’écriture sensible, qui donne à la pensée sa voix, d’un écrivain, en un lieu singulier, une ville à chaque fois différente. Avec comme compagnon de route, au trait frémissant, David Hébert.

Ce premier volume est une vraie réussite. Destination Venise donc. Et c’est un bonheur pour le lecteur, qui se découvre à son tour voyageur par les mots, par les traits conduits qui sont autant de façons de donner au visible, à son cours, tout le noir et le blanc qu’il recelait en lui-même. Il s’agit de donner au visible qui était comme ignorant de lui-même sa vraie musicalité. Contenue, mais perceptible à chaque pas qu’il fait dans la lumière, ou dans la nuit, quand les yeux sont vraiment là pour être ce qui, en étant chevillé à l’émotion, est chevillé au plus intime de soi.

Le Diable en France, Lion Feuchtwanger

Ecrit par Arnaud Genon , le Mercredi, 16 Janvier 2013. , dans La Une Livres, Les Livres, Recensions, Langue allemande, Récits, Le Livre de Poche

Le Diable en France, Préface Alexandre Adler, Trad. Allemand Jean-Claude Capele. 2012, 360 p. 6,60 € . Ecrivain(s): Lion Feuchtwanger Edition: Le Livre de Poche

 

La France en eaux troubles

 

« L’Histoire consiste à donner un sens à l’absurde » lit-on dans les premières pages du Diable en France, autobiographie rédigée par celui qui fut, de son temps, un des écrivains allemands les plus lus. Ce qui lui arriva à lui et à beaucoup d’autres, reste, il est vrai, incompréhensible même si les historiens nous expliquent l’enchaînement des causes et des effets.

C’est au début des années 40, après avoir échappé à l’incarcération avec d’autres artistes juifs allemands ou autrichiens en exil et être arrivé aux Etats-Unis, qu’il commence cette entreprise testimoniale. Dès ses propos liminaires, il remarque qu’il aurait pu écrire un livre qui aurait expliqué les raisons de ce qu’il nomme les « petites péripéties de [s]a vie personnelle » : « Moi-même, je pourrais écrire un livre sur ce sujet et exposer avec une logique implacable les tenants et les aboutissants de cette situation. Mais au tréfonds de moi-même, je sais que je ne connais pas la moindre cause de cette confusion barbare dans laquelle nous nous débattons tous aujourd’hui ».