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Essais

La Société ouverte et ses ennemis, Karl Popper (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Lundi, 27 Mai 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Points

La Société ouverte et ses ennemis, juin 2018, trad. anglais Jacqueline Bernard, Philippe Monod, deux volumes, 342 et 336 pages, 9,50 € chaque volume . Ecrivain(s): Karl Popper Edition: Points

 

Karl Popper eut le privilège à la fois douteux et involontaire de fêter ses seize ans lorsque s’acheva la Première Guerre mondiale et d’être né dans une ville qui, à bien des égards, fut à la fois la matrice de la modernité européenne et le centre géométrique de ses névroses : Vienne. Dans le bouillonnement intellectuel qui caractérisait la capitale de la jeune Autriche, Popper publia ses premiers travaux scientifiques, portant sur l’épistémologie. Il jugea ensuite préférable de s’éloigner du continent européen, se rendant en Grande-Bretagne, puis aussi loin de Vienne qu’il soit possible d’aller sans changer de planète : en Nouvelle-Zélande. Ce fut depuis ce pays lointain, dernière escale avant le Pôle Sud, qu’il assista à l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie et à tout ce qui suivit, même si les informations ne lui parvenaient que lentement. Ce fut également en Nouvelle-Zélande que Popper rédigea La Société ouverte et ses ennemis, qu’il déclara avoir récrit une trentaine de fois. À la fin de 1945, il fut recruté par l’université de Londres où il travailla jusqu’à sa retraite. Il ne retourna dans le monde germanique que pour donner des conférences et Vienne ne recueillit que ses cendres.

Le Nouveau Féminisme, Barbara Polla (par Jean-Paul Gavard-Perret)

Ecrit par Jean-Paul Gavard-Perret , le Vendredi, 24 Mai 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Odile Jacob

Le Nouveau Féminisme, mai 2019, 272 pages, 21,90 € . Ecrivain(s): Barbara Polla Edition: Odile Jacob

 

Libre, indépendante, boulimique, Barbara Polla ose transgresser les lignes de partage. C’est sa manière d’aborder le politique et le féminisme pour en dégager certaines limites et normes. Elle aboutit à une distillation d’écriture qui dépasse les frontières classiques de la rationalité discursive qui engendre des schémas trompeurs car réducteurs.

L’auteure aborde donc les féminismes en dépassant effrontément les barrages qu’ils dressent. Dans son travail de synthèse, Barbara Polla trouve de nouvelles voix vers la paix des genres à travers les ambitions affichées des nouveaux mouvements (pro-choix, pro-désir, intersectionnel, LGBTQI, écoféminisme, antispéciste, etc.). Chaque fois elle montre les ambitions et les risques de tels mouvements pour ouvrir leurs possibilités plutôt que de les fermer à des fins de non-recevoir.

Eros Capital, Les lois du marché amoureux, François de Smet (par Guy Donikian)

Ecrit par Guy Donikian , le Mardi, 14 Mai 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Flammarion

Eros Capital, Les lois du marché amoureux, janvier 2019, 320 pages, 21 € . Ecrivain(s): François de Smet Edition: Flammarion

 

On se souvient tous des propos d’une vulgarité sans nom d’un certain Donald Trump dans une vidéo où il déclarait éhontément : « Grab’m by the Pussy ». C’était en 2005, les propos d’un futur président… Cette citation fait partie de celles qu’utilise François de Smet dans cet Eros Capital, dont l’objet n’est rien moins que de démonter les thèses romantiques des unions amoureuses quelles qu’elles soient et de démontrer des équivalences a priori surprenantes : le mariage romantique et la relation sexuelle rétribuée ont un dénominateur commun qui n’est autre qu’un échange économico-sexuel.

Chez l’épouse bourgeoise l’échange est implicite alors qu’il est clair chez la putain avec un billet de 50 euros. Quand Trump fait cette déclaration, il choque évidemment nos éthiques en même temps qu’il nous remémore des réalités étouffées par une morale qui n’aura fait qu’entériner des nécessités sociales et économiques.

Le temps des livres est passé, Juan Asensio (par Léon-Marc Levy)

Ecrit par Léon-Marc Levy , le Jeudi, 09 Mai 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres

Le temps des livres est passé, éditions Ovadia, mars 2019, 655 pages, 35 € . Ecrivain(s): Juan Asensio

 

Pour quiconque aime vraiment la littérature, la vraie, celle dont l’unique projet est la justesse et la perfection, ce livre est un don du ciel. Juan Asensio, dont on sait la force de travail et le talent qu’il déploie dans son Blog littéraire Stalker*, nous y offre quelques-unes de ses études critiques, plus de soixante au total. Travail de Titan qui fait et qui fera trace dans l’histoire de la critique littéraire.

Le mot est dit, critique littéraire – ce qui semble tirer l’objet de ce livre vers un exercice dont il faut dire qu’il n’existe quasiment plus. Aujourd’hui – les Américains nous ont tendu le mot – on fait des « revues » (reviews) de livres, on dit aussi en français des recensions. De quoi s’agit-il ? D’un exercice de compte-rendu de lecture : de quoi parle ce livre (ah les résumés de livres !), comment c’est écrit, quel en est le degré, non pas d’intérêt mais de plaisir qu’il procure. Le journaliste littéraire aujourd’hui est un bateleur du livre. Les plus intelligents d’entre eux parlent aussi de la situation du livre, de son champ de signification et de son importance littéraire. Les autres se contentent de leur propre plaisir (« J’ai aimé », « J’ai adoré », délayés à l’envi…) brandi comme une preuve de la grandeur du livre traité.

Sigmund Freud et Romain Rolland, Un dialogue, Henri Vermorel (par Gilles Banderier)

Ecrit par Gilles Banderier , le Jeudi, 09 Mai 2019. , dans Essais, Les Livres, Critiques, La Une Livres, Albin Michel

Sigmund Freud et Romain Rolland, Un dialogue, août 2018, 632 pages, 29 € . Ecrivain(s): Henri Vermorel Edition: Albin Michel

 

La correspondance entre Sigmund Freud et Romain Rolland fut publiée pour la première fois en 1966, dans une thèse de la Faculté de médecine de Paris. À qui s’en étonnerait, on rappellera que Freud était médecin et que la psychanalyse entretient avec la médecine des rapports, certes ambigus, mais réels. Cette correspondance est d’un faible volume et l’on peut de prime abord s’étonner que la republication d’une vingtaine de lettres (il n’y en a pas davantage) aboutisse à un volume de six cents pages. C’est que l’intérêt de cette correspondance est inversement proportionnel à ses modestes dimensions matérielles et Henri Vermorel, qui les republie, les annote et les éclaire, a fait un authentique acte de lecture, digne de tous les éloges. Il reprend le livre qu’il avait publié en 1993 (Sigmund Freud et Romain Rolland, Correspondance 1923-1936, Presses Universitaires de France), en le mettant à jour pour tenir compte de la découverte de nouveaux documents dans les archives de la maison Fischer, l’éditeur de Freud.